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10 janvier 2008

La voie lactée (2)

    Muriel reçut la réponse à ses questions de la bouche même de Rocco, sans qu'il ne dise un seul mot. Ses lèvres abandonnèrent celles de Muriel pour se poser sur ses pieds, remonter le long de ses jambes fuselées, glisser entre ses cuisses, toujours plus haut sous sa robe qu’il retroussait dans un même mouvement, jusqu’à s'aventurer sur sa vulve pas même protégée par la moindre dentelle. Il y débusqua le plaisir de Muriel d'une langue experte. Elle eut l’impression qu’on lui déménageait les neurones. Non seulement elle ne savait toujours pas comment réagir, mais son corps s’était mis en pilotage automatique à dix mille pieds. À cette altitude, les seules pensées fugaces qui traversaient le vide stratosphérique de son esprit étaient du genre : « Heureusement que je me suis fait faire une épilation du maillot avant-hier pour mon anniversaire de mariage »,  « Non, je ne participe pas à une reconstitution historique pour tout public », « Oui, les gémissements qui sortent de ma bouche doivent probablement faire partie du script vu le calme relatif du frisé »…
    Soudain, un rire sardonique éclata au-dessus de sa tête. Muriel ouvrit les yeux et découvrit avec effroi un horrible personnage moustachu, affublé d'un costume de pirate, et qui brandissait une prothèse à la place de sa main, dont la forme n’était pas celle d'un crochet. Rocco, qui léchait consciencieusement le minou de Muriel, dégagea son visage barbouillé de cyprine et s'exclama:

- Capitaine Godemiché !
- Pousse-toi de là, prince charmant, je vais te montrer comment on réveille une belle au bois Dormant ! Eructa l'horrible personnage en faisant vibrer sa prothèse.
- Yamais yé né la laisserai entre vos mains, si y'ose dire! Répondit le prince charmant plein d'humour.
- Tais-toi! La mienne est plus grosse que la tienne, dit l'affreux capitaine avant d’assener un coup de son gourdin sur la tête du prince charmant qui s'écroula sur le pont, théâtral.
- Plus grosse et plus dure aussi... maintenant, à nous deux ma belle, dit l'ignoble capitaine Godemiché en approchant son monstrueux appendice.

Le visage grimaçant qui se pencha sur Muriel la fit suffoquer, certes de terreur mais pas seulement : Après avoir assommé le téméraire prince charmant, l’abominable capitaine godemiché tentait de l’asphyxier à l’aïoli ! Trop c'est trop ! Prête à affronter les vociférations du frisé et l’abandon prématuré d’une prometteuse carrière cinématographique, Muriel poussa un hurlement d’effroi avant de sauter du hamac et de s’enfuir sur le pont en carton pâte, aussitôt poursuivie par l’odieux capitaine, qui finit par la coincer face au bastingage. Penchée en avant, le visage rougi par l’effort de la course poursuite, toutes ces émotions, et l’abominable verge en caoutchouc qui s’immisçait entre ses fesses, Muriel hurla à l’adresse du frisé et de sa caméra impudique:

e52c70e6a64f28dd90e5027a383951cd.jpg- Non! Laissez-moi tranquille! Au secouuuuurs!
- Allez Peter Pan! Clama le metteur en scène extatique, sous les yeux de Muriel, arrondis par la prise et la surprise.

    « Peter Pan ? Mais non, c’est bien le capitaine godemiché », allait protester Muriel qui était bien placée pour le savoir, mais tout ce qu’elle parvint à articuler fut un vague « Ouille ! »
    Tandis qu’elle commençait à s’ouvrir à la pressante prothèse, apparu un homme en collants verts. Suspendu à une corde, les pieds en avant, il envoya valser l’épouvantable capitaine dans le décor. L’héroïque bellâtre atterrit sur le pont juste derrière Muriel. « C’est moi ! Peter Pan ! » Fanfaronna-t-il aussitôt à son endroit, ou plutôt son envers qui venait d’échapper aux ultimes outrages. Les jambes encore tremblantes, Muriel se retourna pour faire face au sauveur de sa vertu, tentant vainement de remettre un peu d’ordre dans sa robe de dentelle toute chiffonnée.
    « Mais, mais c’est le beau Christopher Clark ! » balbutia-t-elle en regardant son héro s’avancer vers elle avec la démarche assurée d’un macho italien, un sourire conquérant agrafé au visage. D’un geste à l’ampleur romantique, il la prit par la taille, plaqua ses hanches contre les siennes, et il planta son regard mâle d’acier entre les paupières féminines papillonnantes, conformément aux poncifs du genre.

- Qu’est ce qu’on dit à son sauveur préféré ?
- Je crois que je vous dois une fière chandelle.
- C’est le cas de le dire. Il ne vous reste plus qu’à l’allumer.
- J’ai pourtant cru sentir que mon regard de braise a déjà enflammé vos sens.
- De désir je me consume. A vous d’en faire jaillir la flamme.
- Action! Action! Hurla le frisé, vous vous croyez à la Comédie Française?

    Cette fois-ci, Muriel obtempéra bien volontiers aux injonctions tyranniques. Ce n’est pas tous les jours que se présente une telle opportunité, songeait-elle en regardant la fameuse opportunité déformer outrageusement le collant vert de Peter Pan – à prononcer piteu panne avec l’accent anglais, ce qui en l’occurrence n’est pas très adapté. Muriel s’agenouilla opportunément, parsema de petits baisers les cuisses musclées du héro, et elle libéra enfin sa glorieuse virilité. Il va voir ce qu’il va voir, ce Peter Pan, pensa Muriel qui poussa sa science de la flatterie orale jusqu’à la flagornerie : pour le repos du valeureux guerrier, rien ne fut épargné, de ses testicules consciencieusement léchouillées à la pointe de son gland littéralement avalé. Muriel éprouva un plaisir mâtiné d’orgueil à le sentir grandir, durcir entre ses lèvres humides. Captivée par ce phallus tant convoité avec lequel elle pouvait enfin jouer à sa guise – car derrière ses airs de sainte nitouche, elle connaissait par cœur toute la filmographie de Christopher Clark dont elle matait les films en cachette à la moindre occasion -  Muriel n’avait même pas senti les doigts experts qui faisaient glisser sa robe à terre, mais elle sursauta en sentant un souffle chaud sur son intimité brûlante. Une tignasse blonde s’était glissée entre ses cuisses, tignasse sous la quelle elle reconnu le regard langoureux du prince charmant qui lança une tirade d’anthologie : « Yé repris mes esprits, à moi de vous faire perdre les vôtres… »
    Le prince charmant joignit aussitôt le geste à la parole, dans tous les sens du terme. Sa langue agile explora les méandres de la vulve humide avec une verve insoupçonnée, jouant d’une rhétorique linguale d’une étourdissante efficacité, et qui battit en retrait les dernières pudeurs de Muriel. De peur de perdre un soupçon de ce torride argumentaire, elle se prêta aux exigences techniques du pornographe qui l’assaillait de minuscules caméras tendues au bout de perches indiscrètes. « Lève la cuisse droite ma chérie, oui plus haut, c’est ça. Rocco mon coco, lèche lui le clito que du bout de la langue, hein, sinon on voit rien. La caméra anale est prête, tu peux lui mettre un doigt dans le cul… Non, ne t’arrête pas de le sucer ma cocotte ! Ca va Christopher, tu tiens le coup ? ».
    Christopher n’a pas tenu le coup. Il se recula pour éjaculer une épaisse giclée de sperme entre les lèvres entre ouvertes de Muriel. Une bavure dont elle se lécha les babines, mais qui contraria le frisé. « Merde ! Christopher qu’est ce que tu fous ! Bon, on rattrapera ça au montage. » N’écoutant que son désir et anticipant ceux du frisé, Muriel sauta au coup de Peter Pan, plaqua ses cuisses autour de la taille de son partenaire, et elle s’empala sur sa verge encore raide. Ça c’est du montage, depuis le temps qu’elle en avait envie. Ragaillardi par tant d’audace, Peter pan déposa délicatement les fesses de sa partenaire sur la rambarde du pont, pour mieux la besogner avec la dernière énergie. Le frisé avait beau maugréer, il dut suivre caméra au poing l’action qui s’emballait, l’irrésistible flot des pulsions, et l’orgasme qui ne tarda pas à submerger Muriel. Psalmodiant une litanie contradictoire de « oui » et de « non », encore frissonnante de la jouissance qui s’attardait, elle sentit à peine le corps musculeux auquel elle était accrochée la soulever, et écarter ses fesses pour livrer sa croupe à l’énorme dard du prince charmant. Son oeillet bien calé sur la pointe de ce gland imposant, Muriel fût abandonnée à la gravitation, seulement retenue par deux phallus inflexibles qui s’enfonçaient irrésistiblement dans ses entrailles. La puissance de la prise était telle qu’elle en eut le souffle coupé. Sa bouche grande ouverte happait l’air, et hoqueta une jouissance sauvage, tandis qu’elle encaissait les assauts furieux de ces males en rut, le va et vient alterné de leur piston de chair que rien ne semblait pouvoir arrêter, jusqu’à l’explosion finale, la lave brûlante et vaine qu’elle reçut au plus profond de son fond.
    Tant pis pour la liturgie pornographique moderne et son Saint-Sacrement spermeux. Tant pis pour le phallus secoué comme un goupillon sur le bénitier d’un cul impie, accompagné par l’oraison des jouissances simulées. La voie lactée coulait en elle comme une sève interdite, semence de désirs illicites et de mort.

    Muriel se réveilla en sueur dans la banquette du salon. Seule. Elle éteignit la télé où tournait un de ses vieux films X, et elle jeta un coup d’œil au réveil. 2h35. Plus que quelques heures à dormir avant que son ex ne dépose leur fille unique. Muriel ne se sentait pas en état de l’emmener au parc d’attraction, mais une promesse est une promesse. Il y avait eu bien assez de trahisons comme ça. Comme un robot, elle chercha ses médicaments à tâtons. Elle retrouva le dernier tube sous le sapin aux guirlandes clignotantes. Elle aurait pu y voir un signe de bon augure mais elle avait passé l’âge de croire au père Noël. Elle n’espérait plus que son mari revienne habiter avec elle. Elle n’en était pas encore à espérer un miracle. Elle espérait juste que demain, elle supporterait les effets secondaires de sa trithérapie.
    Bienvenue dans la réalité, princesse.

07:15 Publié dans Fictions | Lien permanent | Commentaires (22) | Tags : La voie lactée

03 janvier 2008

La voie lactée (1)

Pour ma première note de l'année, jouez les étoiles et filez chez Ysé : la voie lactée vous y attend !

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Au fait, meilleurs voeux etc...