06 septembre 2014
Fellation et irrumation
La dernière note de « Paris Derrière », amusant blog informatif sur toutes les dépravations parisiennes, m’a suggéré quelques réflexions complémentaires sur la fellation, trop souvent confondue avec l’irrumation.
Dans le cas de l’irrumation, celui ou celle qui « suce » se fait prendre la bouche « passivement ». Dans l’antiquité, cette pratique était celle du maître qui pouvait prendre la bouche de son esclave sans lui demander son avis. L’action de prendre son plaisir aux dépends de l’autre était une caractéristique du pouvoir.
La fellation est effectivement plus subtile car celui ou celle qui est actif donne du plaisir à son partenaire passif. Donner du plaisir sexuel à l’autre sans en prendre soi-même, était sujet de moquerie dans l’antiquité, sans doute comme l’imbécile qui se fait duper dans une comédie et qui en redemande. Mais si les partenaires sont à égalité sociale, le pouvoir change alors de camp : le plaisir pris par l’homme sucé passivement n’est plus pris aux dépends de son partenaire, mais dépend du bon vouloir de son partenaire actif. Françoise Rey a écrit de très belles lignes à ce sujet, que je cite dans une de mes notes intitulée le pouvoir du plaisir .
Aujourd’hui comme dans l’antiquité, le pouvoir est bien du côté des actifs, et le plaisir est généralement la rétribution du pouvoir. Dans le cadre de la sexualité, la fellation entre deux partenaires égaux fait exception à cette règle, car l’essentiel du plaisir sexuel est du côté de celui qui est passif. Celui ou celle qui est actif a le pouvoir du plaisir et par conséquent le plaisir du pouvoir du plaisir.
Dans l’univers du X, assistons-nous à des fellations ou à des irrumations ? La plupart du temps, les hommes ne posent-ils pas leur main sur la tête de leur partenaire féminine pour enfoncer leur bite bien au fond d’une glotte plus ou moins consentante ? Les femmes essentiellement passives ne sont-elles pas prises sans ménagement par des hommes hyper-actifs (en dehors des productions spécialisées de type « femdom » où les femmes versent dans la caricature de la domination). Avec le retour en force de l’irrumation aux dépends de la fellation, le X qui sert de modèle d’éducation sexuelle à la jeunesse contemporaine ne renforce-t-il pas un antique modèle du pouvoir machiste ?
08:54 Publié dans Réflexions | Lien permanent | Commentaires (20) | Tags : plaisir, pouvoir, fellation, irrumation
09 mars 2007
Un peu de physique (1)
Soient deux vases, Madeleine et Georges, reliés ensemble par un tuyau conjugal libre et flexible.
Madeleine et Georges ont chacun une certaine contenance mesurée en frustrations. En première approximation, nous supposerons que la contenance de Georges est égale à la contenance de Madeleine, soit X frustrations.
Soit un escabeau permettant d'accéder au plaisir. Au début de l'expérience, Madeleine et Georges sont tous les deux sur la même marche de cet escabeau, au même échelon de l'échelle du plaisir. On remplit alors Madeleine et Georges de quotidien et autres obligations correspondant à Y frustrations.
Question 1: En supposant négligeable la contenance du tuyau conjugal, quel est alors le niveau de frustration de Georges et Madeleine ? Quelle est la limite supérieure de Y avant que Georges ou Madeleine ne déborde ?
On monte simultanément Georges et Madeleine d'un échelon sur l'échelle du plaisir.
Question 2: Le niveau de frustration de Georges et Madeleine a t'il changé ?
On redescend Georges d'un échelon sur l'échelle du plaisir.
Question 3: Le niveau de frustration de Georges et Madeleine reste t'il le même ? Qui, de Madeleine ou de Georges risque de déborder ?
On place maintenant Madeleine et Georges sur le même échelon de l'échelle du plaisir, et on bouche hermétiquement le tuyau conjugal avec du mensonge et de la cachotterie. On monte Georges de trois échelons sur l'échelle du plaisir.
Questions 4: Madeleine risque t'elle de déborder ?
Je ramasse les copies dans une semaine !
08:30 Publié dans Réflexions | Lien permanent | Commentaires (11) | Tags : frustration, plaisir, libertinage
02 février 2007
Le plaisir du désir
J'ai rencontré Coralie fin 2005, à l'occasion d'un de ces dîners organisés sur un forum libertin. Il eut lieu dans un restaurant fétichiste désormais fermé, "La Cave de Justine". Il fallait effectivement être masochiste pour payer une cinquantaine d'euros pour ce qui nous a été servi, mais cela ne m'empêcha pas de passer une soirée amusante même si le trip SM n'est définitivement pas ma tasse de thé. A cette occasion, j'avais d'ailleurs pu voir les égéries de ce forum toutes de cuir dévêtues, dont une qui arborait sans conviction un collier de chien. Son maître de mari la tenait par la laisse. J'avais un peu tiré dessus, pour voir. Elle avait alors posé sur moi un regard de cocker ahuri qui m'a fait saisir la notion d'inconvenance dans le burlesque. Dans cette ambiance improbable, Coralie portait une jupe de cuir, et un gilet noir sur lequel tombait la cascade de ses cheveux bouclés, ce qui la mettait à la fois en valeur et dans le ton de la soirée. Si vous voulez vous faire une image mentale de Coralie, pensez à Carrie Bradshaw dans "sex in the city", mais en brune, et vous ne serez pas loin de la vérité, même si mon regard s'attache plus au fond qu'à la surface comme je l'ai déjà dit. Stéréotype de la célibatante à l'orée de la quarantaine flamboyante, Coralie m'a tout de suite impressionné par sa conversation mondaine et la finesse de ses remarques, en l'occurrence sur "le plaisir du désir" qui donne naissance à un enfant parenticide: "le désir de plaisir". J'ai tenté de faire bonne figure face à une femme qui côtoie Beigbeder entre autres créatifs à la mode, au point de parvenir à la séduire en lui parlant d'un défi basé sur la frustration que j'étais sur le point d'organiser. Je l'ai invitée à se détendre en ma compagnie, dès le lendemain après-midi, dans un sauna libertin.
Cette virée au sauna était prévue de longue date. J'avais organisé un déjeuner avec pour objectif avoué de nous rendre ensuite à l'hyppocampe, sauna parisien assez sympathique en période "couple". Ce déjeuner étant ouvert à tous, Coralie et son ami Anthony pouvaient nous y rejoindre, une aubaine. En fin de compte, nous fûmes 6 à franchir les portes du sauna: Angelina, Pascal, Coralie, Anthony, Nadine et moi. Angelina partit rapidement s'amuser avec Pascal, et nous avons donc passé un bon moment à quatre, entre hammam et sauna, tout en papotage, discrètes caresses et volupté ostentatoire. J'ai fini par proposer de prodiguer un voluptueux massage à celles qui le voudraient bien. Nadine et Coralie se sont portées aussitôt volontaires, nous avons trouvé un petit coin câlin privatif, et pour la première fois de ma vie, j'ai eu la délicate mission de masser en même temps deux femmes côte à côte.
Voici ce que Coralie à écrit sur le forum quelques jours plus tard...
Il faisait déjà frais en cette après- midi naissante. Inclinée contre son dos sans pour autant m'y appuyer, je laissais les accélérations et les ralentissements nous apporter les frôlements de l'aléatoire. Mes cuisses remontées le long des siennes auraient pu lui communiquer les évocations qui traversaient mes sens mais je choisis de lui laisser les imaginer et les attendre. En traversant le vent, de douces courbes inclinaient nos bassins de concert, un ronronnement grave et rond montait en volume, puis s'assagissait pour reprendre encore. Comme pour bien d'autres moments, qu'il est bon daller à 2 à moto !
L'hippocampe est un petit animal très gracieux qui change de sexe comme d'autres gardent le leur, mais aiment en connaître de nouveaux. Ce doit être un animal un peu farouche car les vitres de son bocal sont toutes noires et il est sans nul doute de nature tropical tant son habitat est fait de tiédeur. Derrière ces vitres noires est un espace tout blanc, de vapeurs et de mirages, où les silhouettes se ressemblent et les courbes s'unissent. Le temps s'y étire et les peaux s'adoucissent. L'apaisement des âmes ouvre la faim des sens. Sur l'épiderme humide glissent des gestes tendres.
De l'intérêt de ne pas être ambidextre : se demander, mue seulement par l'inspiration, le plaisir ou le désir, quelle main sera la plus habile ? La plus entraînée, aguerrie de techniques, d'habitudes et de réflexes acquis, opérationnelle par des millions de gestes répétés, ou celle qui a le moins l'occasion de s'exprimer, et, faisant fi de la maîtrise ira à l'intuitif, se délecter de gestes à elle plus rares ?
Nous étions 2 femmes à nous prêter à l'expérience, en 3 l'huile qui est peut être la mieux lotie, au contact de 2 épidermes qui l'épandent en 4, et à lui tout seul, notre dit-non ambidextre à qui nous confiions nos corps allongés côte à côte, et coté pile. Mais c'est sans doute à 3 que nous devrions établir le verdict (laissant à l'huile ses secrets dont nous sommes tant friands), bien moins pour en faire émaner une hiérarchie que pour témoigner d'un unisson rêveur que chacune des mains et leur auteur, prenaient par l'une ce qu'ils donnaient par l'autre, puis revenaient à l'inverse autant qu'en symétrie, nous faire ressentir l'ardeur comme la douceur, la fermeté et la tendresse, le geste sûr autant qu'un autre plus aventureux, le tout naviguant entre réel et à peine rêvé.
Un grand merci à un certain extravagant et ses sujets pour cette initiative d'après-midi, après laquelle il faisait si doux.
Ce à quoi j'ai répondu...
Lorsque l'apaisement des âmes ouvre la faim des sens, ce peut être une fin en soi, une faim sans fin sur laquelle on jouit de rester: le plaisir du désir. Ce plaisir là se nourrit du manque. La frustration est son viatique. Il est à l'amour ce que la cuisine nouvelle est à la gastronomie: de l'inconsistance sublimée. Le plaisir du désir n'est pas pour les affamés. S'il y a consommation, elle est pour le moins frugale, et elle exacerbe les sens au lieu de les rassasier.
Après ce plaisir étiré comme l'huile sur la peau, ce corps à corps en accords sans à-coups, tout en langueurs, tel qu'il pourrait se prolonger au point d'oublier l'heure, pourquoi donc un verdict qui claquerait comme un point final ? S'il devait y en avoir un, il tiendrait en un seul mot: encore...
Vous l'aurez compris, ce massage fût presque chaste. La belle Coralie était pressée par le temps, Anthony devait la raccompagner en moto, et je suis donc resté seul avec Nadine où nous nous sommes livrés à des activités moins vertueuses: Le plaisir du désir à ses limites, et le plaisir tout court avait repris ses droits.
08:45 Publié dans Réflexions | Lien permanent | Commentaires (3) | Tags : Expériences, sauna, Hyppocampe, Erotisme, plaisir, désir, coralie
01 février 2007
Le pouvoir du plaisir
Une tendre amie, volontiers féministe à ses heures, fait une claire distinction entre l'excitation psychologique et l'excitation physiologique, en fonction de la position prise par deux amants. Lorsqu'elle regarde les autres, en club libertin par exemple, elle trouve excitant de voir une femme chevaucher son amant, car cette position féminine dominante prouve le libre arbitre de la femme. Paradoxalement, son plaisir est bien plus vif lorsqu'elle se trouve sous les coups de boutoir de son amant, que lorsqu'elle le chevauche. J'ai moi-même pu en faire l'expérience lorsque j'ai été dans un sauna libertin avec cette jeune femme si sensible à la position des uns et des autres.
C'était à l'hyppocampe l'été dernier, un vendredi après-midi exclusivement réservé aux couples, et l'ambiance sensuelle était propice au langoureux massage que je lui ai prodigué. Je l'ai faite jouir avec mes doigts, et j'ai maintenu son état d'excitation en poursuivant mes caresses tout en lui léchant l'anus. Ma position, à priori dominée, pour ne pas dire servile, était pourtant bien celle du dominateur car j'étais le pourvoyeur de plaisir. Elle voulait que je la prenne, elle me le demandait timidement, et je lui refusais ma queue tant qu'elle ne me supplierait pas crûment. Bien plus réservée dans ses paroles que dans ses actes, Sylvie se montra bien incapable de crier le "baise moi !" que je voulais entendre, surtout dans un lieu ou d'autres couples allaient et venaient, dans tous les sens du terme.
Bon prince, j'ai fini par glisser mon mandrin dans son ventre chaud, sans me départir de ma douce cruauté. J'ai utilisé la prise dite "du marteau". Je l'apprécie beaucoup pour la maîtrise qu'elle me donne, et les vives sensations qu'elle procure à ma partenaire. Ses jambes tendues tout au long de mon torse, je la maintenais fermement, avec mes mains sur ses cuisses, mortaisée sur mon tenon, qui coulissait dans sa fente bien ajustée avec une lenteur calculée. Chacun de mes mouvements nous maintenait l'un et l'autre à la limite de l'orgasme, sans en franchir le seuil irrémédiable. C'est moi qui en contrôlais l'accès et qui la dominais encore tant au niveau symbolique que physiologique, aux antipodes de l'assouvissement égoïste que la plupart des femmes fustigent. Etait-ce pour autant de l'altruisme de ma part ? Certainement pas ! Je reviendrai plus tard sur ce point.
De temps à autre je desserrais ma prise, laissant ma compagne extatique entourer mes hanches avec ses cuisses ouvertes, ce qui me permettait de me pencher sur elle pour lui susurrer, non pas des mots doux mielleux, mais les mots que mon phallus mimait:
- Je te prends
- ...
- Je te possède
- ...
- Je t'envahis, j'assaille ton ventre avec ma queue brûlante
- Oui...
- Ca te plait que je te domine comme ça n'est-ce pas ?
- Oui !
- Et maintenant, tu rêves que je te défonce, que je me lâche ?
- Oh oui !
Croyez-vous, ami lecteur, que j'ai joint le geste à la parole ? Certainement pas ! J'ai continué à lui déverser mes obscénités tout en plantant mon regard dans ses yeux hagards, pour mieux jouir de l'ivresse que je lui procurais. Autour de nous, quelques couples arrêtés, nous regardaient. Mais à force de jouer avec le feu, on finit par se brûler. N'y tenant plus, Sylvie posa ses pieds à plat sur le matelas, pour imposer son rythme. Elle prenait le pouvoir. Elle allait me faire jouir. Tu me baises, que je lui dis ! Et aussitôt, j'accompagnais son mouvement pour nous catapulter dans l'orgasme. Ivre de plaisir après avoir été ivre de pouvoir, j'ai surfé sur la jouissance avec elle, arrimée à mon sexe qui ne voulait pas débander. Sans changer de position, je l'ai prise plusieurs fois, coup sur coup, avec râge, celle du désespoir qui précède la fin, le déclin ennemi.
Dans sa nouvelle intitulée "question de goût", Françoise Rey ne dit pas autre chose en expliquant son dégoût pour la fellation, qu'elle a pourtant pratiqué, pour ne pas passer pour une gourde d'une part, et d'autre part pour l'ivresse du pouvoir:
"J'ai retrouvé plus tard, chez des hommes, des hommes faits, mûrs déjà, imbus de leur rôle de dispensateur de plaisir, la même joie passionnée du don, le même orgueil narcissique, la même fausse générosité. Régner sur le plaisir de l'autre, c'est se voir magnifique dans son regard chaviré, magnifique et redoutable, car c'est aussi, quelque part, le dominer et le réduire. Il y a sans doute la même ivresse à prodiguer la volupté que la douleur, et il n'est pas hasardeux que parfois les deux se rejoignent sous le fouet d'un bourreau raffiné.
Oui, à genoux devant mes amants, ou courbée sur leurs trésors palpitants, j'étais un mec, celui qui décide, qui donne, qui reprend pour donner encore, et leurs vertiges m'étaient chers qui consacraient mon pouvoir..."
08:15 Publié dans Réflexions | Lien permanent | Commentaires (12) | Tags : sauna, pouvoir, plaisir, sylvie, expériences, hyppocampe, erotisme