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30 novembre 2007

La marche du monde

FEMME 1 : Je n'ai pas mis les bonnes chaussures ce matin. Avec ces grèves, ce que j’ai mal aux pieds !

FEMME 2 : Moi, j’ai fait l’impasse sur l’élégance au boulot. Avec mes tennis, je peux même  courir. Regarde !

FEMME 1 : Attention !

La seconde femme trébuche sur Diogène assis par terre, avant que toutes deux ne prennent la fuite devant ses furieuses invectives.

DIOGENE : Pouvez pas regarder où vous mettez les pieds, non ? C’est incroyable ça ! Qu’est-ce que les gens ont à toujours cavaler ! Ils ne savent même pas où ils vont, mais ils y courent. Et ceux qui ont peur de se perdre, ils courent sur place sur des tapis roulant dans leur salle de gym ! Avant, c’était autre chose. Ce qui comptait, c’était l’être, qu’il soit individuel ou collectif.  Soit on était de naissance, comme Louis XIV le disait : « L’état, c’est moi ! ». Soit on naissait pas grand-chose et il suffisait d’y penser comme Descartes : « Je pense, donc je suis. ». C’est le capitalisme qui a tout bouleversé avec l’avoir. Pour être il n'est capital que d’avoir du capital, au point de ne même plus avoir besoin d’exister pour être une « personne morale ». Mais maintenant, il ne suffit plus d’avoir : on est passé à l’âge du faire. Faire croire qu’on fait ce qu’on a dit, et dire ce qu’on va faire croire. Faut s’agiter, se montrer partout, s’oublier dans l’action quand on ne se supporte plus ; paraître ce qu’on ne parvient pas à être. Tout ça pour réaliser, en fin de compte, qu’on s’est fait avoir. Le bougisme, voilà le mal du siècle ! Moi je vous le dis : Il est urgent de ne rien faire ! Il faut réapprendre les vertus de la méditation pour contempler la marche du monde. Qui peut observer la danse des  rayons du soleil levant dans la brume, la lumière dans le prisme du givre qui fond lentement, et qui s’écoule en rosée délicate ? Qui sait s’oublier dans le souffle de l’être suprême, virevolter en esprit et en vérité, comme une poussière parmi les poussières…

Une autre femme approche à pas vifs.

DIOGENE : À votre bon cœur m’dame ! Ayez pitié d’un cul-de-jatte philosophe !

26 novembre 2007

Mission libertine - VI

e89c3febe9d02a8b7cf622148dd4b7d9.jpg    Tranquillement assis sur le quai de la station Jussieu, ma discrète télécommande en main, je regardais s’éloigner le métro qui emportait Sarah vers de nouvelles aventures. Tandis que je montais dans la rame suivante, j’avais la certitude que Sarah n’était pas en mesure de me reconnaître, ce qui était moins surprenant que cela l’aurait été pour des amants ordinaires : si un bandeau avait recouvert la moitié de mon visage au cours de notre troisième rencontre, c’est la pénombre qui l’avait enveloppé tout au long de notre second rendez-vous.

    Le défi de cette seconde rencontre, c’est Sarah qui me l’avait lancé. Il tenait en quelques tabous : « Notre seul droit sera de nous parcourir avec nos doigts et nos mains ; l'usage de la bouche quel qu'il soit nous sera interdit ; il nous sera également défendu de toucher le sexe ou la poitrine de notre partenaire ».
    La veille de ce rendez-vous dans une chambre hôtel où nous nous apprêtions à passer toute une nuit blanche dans le noir, la débauche et un silence monacal, Sarah m’avait fait part d’un souci typiquement féminin, et elle m’avait proposé d’ajourner notre « entrevue » si je le souhaitais. J’avais immédiatement répondu que je lui laissais le choix dans la date, qu’elle pouvait l’ajuster à sa convenance, masquant au mieux ma déception de devoir patienter quelques jours de plus ou bien de ne pouvoir jouir l’un de l’autre autant que nous le souhaitions. Et puis j’avais réalisé tout le piquant que pouvait m’offrir cette restriction physiologique, et que Sarah insinuait en me laissant ce choix qui aurait dû lui revenir. Aussi lui avais-je concocté une réponse aussi diplomatique que suggestive :

    Ma chère Sarah,

    Je pense avoir répondu un peu trop rapidement à votre message ce matin, sans avoir bien pesé le choix que vous me donnez. Si votre état supposé (je note le conditionnel que vous avez employé) me frustrerait de ne pouvoir partager avec vous une grande partie des plaisirs escomptés, la frustration serait bien plus grande pour vous que pour moi.
    En effet, cet état ne nous interdirait pas d’autres pratiques dont nous sommes tous deux friands, et si vous les aimez au point de les pratiquer abondamment - car c’est abondamment que je voulais vous honorer - alors je ne serais frustré que du plaisir que je ne vous aurais pas donné.
    Je vous renvoie donc la balle et je vous laisse décider selon votre agenda, vos possibilités physiques, et surtout vos envies. Sachez seulement que votre indisposition ne diminue pas le désir que j’ai de vous.

    Dans l’impatience de vous lire, entre autres choses…

Vagant

    Sarah, dont la souplesse anale était plus grande que celle de son agenda conjugal, avait finalement confirmé notre rendez-vous. Deux jours plus tard, je lui écrivais ceci :

    Très chère Sarah,

    Vous avez gagné ! Pour la seconde fois vous avez remporté la victoire, vous êtes la meilleure ! « Sarah ! Sarah ! » Crie la foule extatique devant vos exploits sensuels ! J’ai bien compris que la victoire était votre seule motivation pour me voir, j’ai vu les trésors d’imagination que vous avez su déployer pour arriver à vos fins, moi qui croyais naïvement que vous souhaitiez juste apprendre les courbes de mon corps, par cœur, sur le bout des doigts. A vous la victoire, donc à vous d’en choisir les fruits. Vous avez décidé de me laisser choisir le prochain défi, qu’il en soit ainsi, je vous laisse en retour me donner un gage. Je trouve d’ailleurs cette règle plus équitable. Au perdant de proposer le défi suivant, contre un gage imposé par le vainqueur.
    Laissez-moi cependant revenir sur les délices de notre nuit passée, pour le plaisir de les revivre encore un peu, avec en point d’orgue l’enfilage de vos gants en latex ! Tout cela pour pouvoir me toucher partout tout en respectant les règles de votre jeu, et me faire découvrir au passage la sensualité affolante de cette matière. Que de savantes caresses avez-vous ainsi su me procurer, du frôlement de vos cheveux lâchés sur mon corps énervé, à votre souffle brûlant sur ma peau préalablement aspergée d’eau tiède par vos soins sadiques. Devant un tel déploiement de sensualité perverse, je ne pouvais que rendre les armes, après une héroïque résistance convenez-en, moi qui n’avais pour botte secrète que l’idée de vous taquiner de mon souffle sur vos lèvres ourlées que j’imaginais blanchies par l’écume de vos désirs. Je me souviens avec émotion du baiser libérateur qui signa ma perte, baiser rageur, ravageur, cannibale tant mon désir de vous était violent. Et après cette attente délicieusement exaspérante, combien fût-il doux de vous demander de poser vos lèvres sur mon sexe embrasé, de le lécher jusqu’à tirer mon nectar, pour le partager aussitôt avec moi dans un baiser sirupeux. Il serait fastidieux d’énumérer toutes les escarmouches qui suivirent, les assauts de vos seins sur ma verge dressée, les attaques de mes doigts sur votre intimité, votre langue tendue en guet-apens sur mes couilles, l’offensive déterminante de ma bouche dans votre raie, tranchée abandonnée, offerte à ma vindicte, copieusement embrassée, léchée en un ample mouvement de mon visage entre vos fesses écartées, et qui me procuraient un doux massage autant que je vous baisais. Mais comment pourrai-je ne pas citer l’invasion qui suivit, celle de ma queue dans votre cul souple et gourmand.
    Je n’ai pas tenu le compte de nos orgasmes - mes doigts étaient bien trop occupés - mais je garde en mémoire le jour qui s’est levé sur vous. Vous m’aviez rejoint la nuit tombée dans une chambre totalement obscure, et au petit matin, entre chaque étreinte, la pénombre pâlissante vous révélait un peu plus. J’aime avoir ainsi découvert vos traits, avoir constaté combien vous aviez tort de les trouver quelconques, bref, avoir été en tous points ravi de me réveiller à vos côtés, à l’inverse de ces amants éthyliques honteux de découvrir leur partenaire au petit matin blême. Notre rencontre - inversée puisque nous avons découvert ce qui est le plus souvent couvert avant de découvrir ce qui l’est plus rarement - s’avère définitivement délicieuse, et je ne répéterai pas davantage combien je m’en félicite. […]

    La réponse de Sarah avait été à la mesure de notre première nuit d’amour et de nos conventions épistolaires délirantes:

    Très cher Vagant,
 
    Lentement, peu à peu, je sors de ma torpeur moelleuse, souvenir d'une nuit remplie de délices tous plus audacieux les uns que les autres, et je mets ainsi mon esprit à peine rétabli à votre service pour vous écrire sans détour.
Vous souvenez-vous que je vous avais avoué avoir rencontré un amant exquis dans des conditions nébuleuses pour une étreinte torride ? C'est ce même homme qui m'amène à vous confier ma débauche, parce que je vous sais d'une oreille réceptive et compatissante. Aussi, c'est dans les mêmes conditions que les premières, à quelques détails près, que je me suis rendue le coeur léger dans une chambre d'hôtel où régnait, en plus de son parfum enivrant qui flottait dans l'air, une obscurité digne de ce nom. Il était là, dans cette même pièce, à m'attendre comme nous l'avions convenu. Aussitôt, nous avons mis en pratique ce gage dont je vous ai touché un mot, vous savez, cette mise en jambe du bout des doigts...
    Je le désirais ardemment, j'avais une telle envie de goûter à nouveau ses lèvres, son corps et sa peau qu'il était évident que je ne pourrai me contenir très longtemps. C'est du moins ce que je croyais. Alors que le jeu prenait tout son sens sous nos lascives caresses, c'est à mon grand étonnement qu'il m'avoua, dans un fougueux baiser, que l'envie était si forte qu’il ne pouvait plus supporter ce qui lui semblait déjà du le domaine de l'insupportable ! Enfin je le retrouvai, lui et ses envies lubriques, son être et les folies grisantes qui en découlent, son corps enfin offert à mes caprices audacieux. Après une double attente, nous prenions à nouveau possession de nos convoitises sans autre restriction que l'obscurité imposée, et  une indisposition qui ne me permettait pas de jouir de son sexe en chacun des passages que je pouvais lui offrir. Nous ponctuâmes donc nos ébats, ô combien torrides, par une succession de sodomies plus qu'exaltantes. Mon anus lui était dédié avec toute l'envie qu'il pouvait y glisser. C'est avec volupté que j'accueillis son sexe dans mon orifice sûrement étroit un jour précédent. J'aimai le sentir s'y introduire doucement dans un premier temps, puis prendre possession de ce domaine si convoité dans une palette de rythmes aussi différents qu'envoûtants. Tantôt langoureux, tantôt bestial, son assaut rectal me fit jouir plus d'une fois. Ses mains kleptomanes volèrent toutes mes gourmandises. Sa bouche insatiable vint explorer chaque parcelle de ma peau, en apprit le grain, en dégusta la saveur. Je ne me lassais pas de ses caresses aussi délicates qu'insolentes, de ses baisers sensuellement amoureux, de son souffle posé sur ma féminité ruisselante. Chacune de ses tendresses est tatouée sur mon corps, chaque émotion est gravée dans mon âme, qui me rendent encore plus libertine...
    Je suis sûre que ces mots attisent vos envies naissantes, comme ce fut le cas avec mon amant mystérieux puisque nous décidâmes de ne plus garder le silence complet mais de joindre la parole au geste à des fins purement sexuelles. C'est sans complexe que nous ajoutâmes des mots crus à nos ébats pour le moins passionnés : Je lui avouai aimer sentir sa verge bien au fond de mon cul puisqu'elle ne pouvait se trouver ailleurs, avant qu'il ne me demande de boire son foutre puis d'en partager le goût si particulier. Je criai mon orgasme quand il prenait possession de la chienne que j'étais devenue pour lui.
    J'ignore pourquoi nos mots ne se limitèrent pas à des paroles obscènes entrecoupées de souffles courts. C'est presque naturellement que nous nous laissâmes aller à des propos qui tenaient plus de la confidence sur l'oreiller que du "suce-moi salope". Bien que ce soit un écart par rapport à nos conventions d'origine, je lui fis assez confiance pour le laisser me glisser des mots doux au creux de l'oreille, et même pour le suivre dans cette nouvelle voie qui levait un peu de son mystère.
    Pourvu que cela n’entâche notre correspondance.
    Parce que l'essentiel, pour lui et moi, est bien là. […]

    Oui, l’essentiel était là, le mystérieux mobile qui donnait à notre adultère ce double parfum d’interdit, et qui poussait Sarah à parler de moi à la troisième personne du singulier lorsqu’elle évoquait nos étreintes, comme si elle pouvait ainsi prendre une distance salvatrice. J’en étais à cette réflexion rétrospective lorsque je réalisai que mes pas m’avaient mené à la devanture d’une boite de strip-tease, Chochotte, située au trente-quatre rue Saint-André des Arts.

À suivre…

22 novembre 2007

Les 7 familles libertines (1)

Je vous avais promis un jeu de carte coquin, le voilà ! 

Présentation : Ce jeu de société pour adultes est composé de 42 cartes, chaque carte représentant un des 6 membres d’une des 7 familles comme dans la version classique de ce jeu. La particularité de cette version libertine est un gage illustré sur chaque carte, à réaliser par les joueurs au cours de la partie. Vous devrez faire preuve d’une bonne mémoire, d’une certaine appétence sexuelle plus que d’autres compétences et d’un bon sens de l’humour. Si la bisexualité est un atout, elle n’est pas obligatoire car les règles du jeu adaptent les gages aux goûts de chacun. Compte tenu de la nature sexuelle de ces gages, il est préférable de jouer à ce jeu dans un lieu confortable, avec des préservatifs à disposition ainsi qu’un peu de musique suave.

la famille Kamasutra...Bien entendu, il ne s’agit pour l’instant que d’un prototype dont voici les règles au format pdf ainsi que les cartes à imprimer sur du papier prédécoupé pour cartes de visite :
- Famille Effeuillage
- Famille Erotica
- Famille Câlins
- Famille Bisous
- Famille Slow
- Famille Domina
- Famille Kamasutra

Maintenant, amis lecteurs, j’ai besoin de vous :

  1. Je recherche des groupes d’amis libertins pour essayer mon jeu et me faire part de leurs opinions et suggestions afin de l’améliorer.
  2. Je recherche de talentueux illustrateurs bénévoles pour illustrer les gages de mon jeu. Idéalement, j’aimerais que chaque illustrateur prenne en charge une famille complète pour que le même style s’applique à la même famille. L’adresse du site de l’illustrateur apparaîtra sur chaque carte.

Si je parviens à mobiliser assez de libertins pour tester mon jeu et de dessinateurs pour illustrer toutes les cartes, alors je me lancerai peut-être dans une petite production avec un imprimeur spécialisé.

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Edit du 07/02/2008: il est maintenant possible d'y jouer en couple !

19 novembre 2007

Mission libertine - V (2)

    Les yeux dans le vague mais le sourire aux lèvres, Sarah vit le garçon s’approcher et déposer sur la table une soupière brûlante qui exhalait des parfums d’agneau grillé et de poivron vert.

- Désirez-vous quelque chose d’autre, mesdemoiselles ?
- Je vous remercie, c’est bon, répondit Marina.
- Oh oui ! c’est bon ! renchérit Sarah.

    En pouffant de rire, elles regardèrent le garçon s’éloigner. Marina interrogea Sarah du regard.

- Les vibrations viennent de s’arrêter. C’est surprenant au début, mais pas désagréable en fin de compte.
- Je me demande jusqu’à quelle distance il peut les déclencher.
- Tu crois qu’il est dans la salle ?
- Je ne le vois pas en tous cas.
- Ça recommence…

76408151e143da59d28aa4a02615c0e4.jpg    Elles balayèrent du regard le restaurant aux murs décorés de faïence et de bois sculpté aux motifs hispano mauresques. Pas un seul homme solitaire n’était assis aux petites tables rondes avoisinantes, où couscous, tagines et thé à la menthe offraient l'opulence de leurs appâts aux papilles des gourmandes, sur des plateaux de cuivre ouvragés. Sarah n’était pas en mesure de poursuivre davantage ses investigations. Elle ferma les yeux et mordit sa lèvre inférieure tout en se dandinant sur sa chaise. Lorsqu’elle portait son corps vers l’avant, la pression de la tête du papillon s’intensifiait sur son clitoris au point que les vibrations devenaient insoutenables. Elle se rejetait alors en arrière jusqu’à s’appuyer sur le dossier de son siège, et c’est alors le petit pénis bourdonnant qui s’immisçait profondément entre ses lèvres humides, au cœur de ses chairs déjà suintantes de plaisir. Sa vulve ouverte, aux lèvres épanouies, lui donnait l’impression d’être une fleur aux pétales épaisses, et au calice gorgé de sucs qu’un bourdon vibrant venait butiner sans vergogne. Des ondes de plaisir irradiaient de son bas ventre en langoureux frissons qui lui remontaient jusqu’à l’échine, en passant par sa poitrine dont elle sentait les tétons durcir. Les vibrations cessèrent enfin et Sarah put répondre à Marina d’une voix qui ne risquait plus de se muer en feulement lascif.

- C’est si bon que ça, Sarah ?
- Tu n’imagines pas.
- Dis moi, comment en es tu arrivée là, avec Vagant. Ce n’est pas banal de se prêter à de tels scenarii avec un homme dont on n’a jamais vu le visage !
- C’est vrai. Sans doute pour inscrire notre relation dans le domaine de l’irréel... Comme si le jeu pouvait nous protéger… n’as-tu jamais eu envie de vivre une autre vie Marina ?
- Vous protéger de quoi ?
- Enfantin, en deux lettres.
- Pardon ?
- J’ai deux définitions supplémentaires en post-scriptum. g-4 horizontalement : enfantin ; h-1 verticalement : pronom qui nous est indicible.
- C’est tout ?
- Oui, tout le reste est dans le message codé. Tu m’aides ? Oh, voilà que ça recommence…

    Sarah avait esquivé la question de Marina, mais en connaissait-elle seulement la réponse, au-delà de l’angoissante sensation que tout pouvait s’arrêter du jour au lendemain si cette liaison devenait plus conventionnelle ? Après avoir commencée sur des bases aussi étranges, Sarah était convaincue que cette relation ne survivrait pas à la perte de ses atours oniriques, tel un mirage qui disparaît lorsqu’on tente de le toucher. Elle en jouissait éperdument comme sous une épée de Damoclès, refusant de mettre des mots sur son angoisse de la rupture par peur de la déclencher ainsi.
    Marina et Sarah se concentrèrent tant bien que mal sur l’énigme, entre les bouchées de couscous aux merguez et les rafales vibratoires aussi piquantes les unes que les autres, qui maintenaient toutes leurs muqueuses humides sans pour autant assouvir tous leurs appétits. Elles en étaient au thé à la menthe lorsque Sarah fût à peu près certaine de l’adresse où elle devait se rendre, et elles durent expédier le dessert bien plus rapidement que ses douces saveurs ne le méritaient. Elles quittèrent le restaurant avec une bonne demi-heure de retard, remontèrent côte à côte la rue Geoffroy Saint Hilaire sans que le papillon ne se manifeste, et elles se séparèrent à l’entrée du métro Jussieu en se promettant de se donner des nouvelles mutuelles, mais sans s’engager à se revoir. Sarah avait trouvé Marina fort sympathique, mais pas assez attirante pour aborder avec elle les plaisirs saphiques qui titillaient sa curiosité, à moins qu’elle ne fût pas dans les meilleures conditions pour apprécier son charme, car l’homme qui la faisait vibrer à loisir captivait toute son attention.
    Lorsque Sarah monta dans la rame, le papillon la fit à nouveau frémir. Elle balaya d’un regard éperdu les voyageurs tranquilles, et les vibrations s’interrompirent lorsque les portes se refermèrent derrière elle. Sarah jaugea chaque homme présent dans la voiture, partagée entre le désir de voir le visage de celui qui la soumettait à cette torture, et l’envie de laisser encore un peu le mystère envelopper cet homme qui lui faisait subtilement – mais si efficacement – sentir sa présence. Assise en face d’elle, une sémillante sexagénaire savourait une revue de potins mondains. Sur la banquette voisine, un barbu lisait l’Humanité en face d’un ado en plein Sudoku. « Vagant est-il assis juste derrière moi ? », songeait Sarah tandis que les vibrations du papillon avaient été relayées par celles du métro, dont les cahots imprévisibles qui frottaient sporadiquement le jouet contre sa vulve à vif lui faisaient à chaque fois pousser un petit gémissement incontrôlable ? Allait-elle satisfaire sa curiosité après des mois de correspondance avec ce mystérieux inconnu, ou bien les besoins impérieux de son corps tendu par une jouissance imminente ? Était-elle vraiment obligée de choisir ? Elle se retourna et vit un homme brun, en blouson de cuir, qui lui tournait les dos. Le seul Vagant potentiel. Alors s’imposa l’idée folle d’aller jouir devant lui, sans un mot, sans un geste ambigu sinon le balancement de son corps sur la banquette, avec un regard de bête traquée pour seul aveu de son plaisir clandestin.
    Sarah se leva, s’agrippa aux barres et fit quelques pas maladroits en direction de l’homme impassible. Tandis qu’elle s’assit juste en face de lui dans la voiture presque déserte, l’homme ne leva pas les yeux de son roman dont la couverture était cachée par ses mains fines, comme s’il était tout entier absorbé par une lecture inavouable. Sarah s’installa juste au bord de la banquette, là où sa rotondité est la plus marquée, afin d’en augmenter la pression sur le papillon, et mieux le planter dans son sexe trempé. En croisant les jambes et en se cambrant un peu, elle parvenait à contrôler le mouvement du petit pénis dans ses chairs extatiques. Accélérations et freinages successifs la massait comme la main d’un amant aux doigts inquisiteurs, bien qu’un peu courts. Ses mains à plat sur ses genoux, haletante et les narines frémissantes, Sarah sentait les pointes de ses seins saillir de son corsage blanc tant sa poitrine était bombée par les larges goulées d’air qu’elle inspirait pour ne pas perdre tout contrôle. Elle fixait l’homme impassible entre ses paupières à demi closes, à la fois vexée qu’il ne lui accordât pas le moindre regard et surprise que cela ne brisât pas l’ascension de son plaisir. En vérité, elle ruisselait à un point tel qu’elle s’attendait à ce que le jouet en latex couinât sur sa vulve à l’unisson des pneus du métro sur les rails. Son regard s’échappa vers le tunnel obscur. Le reflet de la vitre lui renvoya l’image d’un visage dévasté. Elle était prise au piège, clouée sur son siège comme un papillon en vitrine, incapable de décoller son cul de la banquette telle une pucelle qui fait tapisserie – elle songea alors brièvement à sa comparaison du papillon avec un clou de tapissier, mais elle n’était pas en état d’en rire – quand un freinage intempestif l’amena au bord de l’orgasme. L’homme leva les yeux de son livre et sortit précipitamment. Elle réalisa que c’était aussi sa station et elle sauta juste à temps de la rame, aussi rouge de honte que de jouissance inassouvie. L’homme au blouson de cuir avait disparu. Le temps de reprendre son souffle, elle se rendit au trente-quatre rue Saint André des Arts et pénétra, non sans une certaine appréhension, dans l’établissement luxurieux.

À suivre…

16 novembre 2007

Infidélité

Tante Babette prit une profonde inspiration, et elle m’entraîna dans la foule, loin de l’étal de bonbons multicolores. Ballotté entre les gabardines mouillées, je parvenais à peine à voir le sommet du sucre d’orge vers lequel je gardais les yeux rivés comme sur un phare à bonheur, lorsqu’elle jeta l’ancre sur un rivage de tristes coquillages.

- Cela fait combien d’années, Elisabeth ? 15 ans ? Plus ?
- 17 ans Jacques.

Je décidai de le détester aussitôt. C’était à cause de lui que j’étais maintenu dans ce brouhaha, à au moins dix longues Barbapapa du paradis des pommes d’Api !

- Dire qu’il m’a fallu tout ce temps pour oser revenir… il fallait que je parte Elisabeth…
- Je crois qu’il ne s’est pas passé un jour sans que je ne pense à toi, Jacques. Si tu savais comme tu… tes douceurs m’ont manquée. Je n’ai jamais été voir ailleurs.
- Oui… enfin… ton mari a toujours une sacrée réputation dans ce domaine…
- Tu sais, avec lui, je n’ai jamais fait que mon devoir.

Une dame vint coller son gros ventre contre mon nez. Non seulement elle sentait la chouquette pas fraîche, mais je ne voyais plus mon sucre d’orge !

- Tu n’as pas changé Elisabeth ! Toujours la même bouche gourmande.
- Arrêtes, tu vas me faire rougir.
- Viens ! Viens par ici, je vais te montrer quelque chose, tu sais bien… ta préférée !
- Oh non, Jacques, ce n’est pas raisonnable !
- Tu crois que ça pèse lourd, une petite folie devant 17 ans d’abstinence ?
- Toi non plus tu n’as pas changé. Tu sais toujours parler aux femmes.

« Ô tante Babette, mais où va-t-on encore ? Tu m’avais promis le sucre d’orge ! » Ai-je pensé très fort.

- Tu sais que je l’ai préparée exprès pour toi ?
- Hummm… elle a l’air bien grosse. J’en ai l’eau à la …
- Prends là Elisabeth, c’est cadeau, pour mon retour. Vas-y, goûte !

Tante Babette se baissa et, d’une main tremblante, elle ouvrit le gros paquet du monsieur. Elle engloutit son biscuit à peine sorti de sa boite ! En plein marché ! Sans attendre l’heure du thé !
« Je le dirai à oncle René, que tu es infidèle à ses spéculos industriels ! »

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Bonsoir Vagant 

Après concertation avec l'équipe, j'ai décidé de ne pas publier ton texte
C'est un texte scabreux dans l'utilisation systématique du double sens
Je conçois que cela t'amuse, mais
PP n'est pas le lieu pour accueillir des textes de ce type
Si tu publies ce texte sur ton blog, je te demande de ne pas utiliser
ma photo. Merci

Coumarine

Si j’ai décidé de publier ce message de Coumarine, ce n’est pas pour la fustiger – elle est bien libre de faire ce qu'elle veut sur son blog - mais pour introduire le débat sur la ghettoïsation de l’érotisme, même lorsque celui-ci est assez discret alors que la télévision nous submerge de sexe à longueur de campagnes publicitaires. Plus généralement, j’ai l’impression que le monde des blogs est profondément segmenté, comme s’il était impossible au sein d’un même espace d’écrire sur des sujets variés - dont l’érotisme - ce qui nous pousserait presque à la schizophrénie virtuelle, à la multiplication des blogs et des identités selon des sujets spécialisés dont on ne pourrait pas sortir. Qu’en pensez-vous ?

12 novembre 2007

Mission libertine - V (1)

   La seconde enveloppe matelassée que venait de lui remettre Marina était déformée par son contenu : un objet violet en latex, ainsi qu’une lettre que Sarah lut d’une main tremblante d’excitation :

   Très chère Sarah,

   Vous avez avec succès réussi le premier test, le plus facile. Le suivant est un peu plus corsé. Vous avez vu un bien étrange objet dans le paquet que notre agent vous a remis. C'est un prototype de papillon vibrant à porter sur vous, entre les cuisses, le petit phallus bien enfoncé dans votre intimité. Les lanières pour le fixer à votre bassin ne sont pas encore au point, et vous allez devoir faire preuve de bon sens pour le maintenir, ce en quoi le jean étroit ou la culotte boxer que je vous avais demandé de porter pourront vous être utiles. Vous serez peut être étonnée de ne pas trouver d’interrupteur sur ce gadget sophistiqué. Il est en effet en ma possession, et je ferai vibrer ce papillon radio commandé de temps à autre pour vous faire sentir ma  proche présence, afin de compenser le fait de ne pas pouvoir être à vos côtés tout au long de cette journée.

   Dès que vous serez dans votre vestiaire, fixez le papillon et rendez-vous au restaurant de la mosquée à midi au plus tard, en compagnie de Marina alias PetitNénuphar si vous le souhaitez. Sachez que je l’ai recrutée exclusivement pour cette mission, et qu’elle n’est en rien impliquée dans les activités de notre service. Ne perdez donc pas votre temps à essayer de lui tirer les vers du nez, elle me connaît à peine et ne pourra pas vous en dire plus sur la suite de votre journée. Il pourrait aussi vous être agréable de savoir qu’elle fréquente assidûment le forum bisexualité d’auFeminin.com. Continuez la lecture, ou plutôt le décryptage de cette lettre au cours de votre déjeuner inclus dans la formule orientale. Vous vous installerez en terrasse si le temps le permet.

   Sarah interrompit là sa lecture pour contempler les lanières élastiques du papillon avec une perplexité qui se mua en fou rire.

- Crois-tu que le concepteur de ce machin sait qu’une femme à deux jambes et une taille ?
- En tous cas, il semble savoir qu’elle a un clitoris.
- Attention, on nous regarde !

   À l’entrée du vestiaire, une femme brune, élancée, au teint halé, regardait Sarah de ses grands yeux ténébreux dont l’expression était si indéfinissable qu’elle en devenait inquiétante. Soudain, son oeil gauche cligna et ses lèvres d’un rouge carmin esquissèrent un sourire complice. Sarah, elle, vira au rouge pivoine. Elle alla s’enfermer aux toilettes où elle parvint à mettre tant bien que mal l’appareil. L’abdomen du papillon, qui avait la forme d’un petit phallus, venait boucher l’entrée du vagin tandis que sa tête venait se loger contre son clitoris et ses ailes se déployer entre ses cuisses. Si Sarah comparait son godemiché préféré à un clou à tête fine, qu’elle plantait volontiers au cœur de son intimité pour tenter en vain de fixer sa libido galopante, ce nouveau jouet évoquait un clou de tapissier, à la tête plus large que la pointe n’est longue, en tous cas pas assez longue pour atteindre le point le plus sensible de son vagin. Elle enfila son jean par-dessus tout ce harnachement qui ne lui laissait qu’une sensation déplaisante entre les jambes, et elle rejoignit Marina qui l’attendait pour aller au restaurant.
   Assise devant un succulent couscous, Sarah entreprit de lire, ou plutôt de déchiffrer la fin de cet étrange message…

   Je [a5 horizontalement] sais pas ce qu’il en [i1 verticalement] pour vous, mais j’ai trouvé le temps d’[b3 verticalement] propice à la promenade. [d8 verticalement] partant du [c8 horizontalement] place Monge, j’ai pris la [b6 horizontalement] Lacepède [d8 verticalement] passant devant [e7 horizontalement] l’épicier, j’ai continué jusqu’à traverser la [b6 horizontalement] Mouffetard et ses restos pas toujours [f6 horizontalement], la rue d’[c6 verticalement] et sa fameuse école, avant de descendre le boulevard [h7 horizontalement] Michel, tourner à gauche pour lécher quelques vitrines du boulevard [h7 horizontalement] Germain, et enfin tourner à droite pour m’enfoncer au cœur du quartier [e7 verticalement] finir, presque par hasard [b6 horizontalement] [h7 horizontalement] [f5 verticalement] [a7 verticalement] [h 4 verticalement], plus précisément au numéro [g1 verticalement] [d5 horizontalement] où [a9 horizontalement] cache une sorte de « [a3 horizontalement] [e1 verticalement] » : [a1 horizontalement]. [g8 verticalement] je dois bien avouer que j’avais déjà entendu parler de ce lieu dédié à la gloire d’[f9 horizontalement], [e7 verticalement] je [a5 horizontalement] résistai pas bien longtemps à l’envie de le découvrir par moi-même, mettant [d8 verticalement] pratique cette citation que vous connaissez bien «La meilleure façon de [a9 horizontalement] libérer d’une tentation, c’[i5 verticalement] d’y céder».
   Après m’être acquitté du droit d’entrée, je descendis les escaliers qui menaient à une petite cave voûtée aménagée en une chambre improbable, recouverte de tentures luxurieuses, décorée de miroirs dorés, traversée en son centre par une barre en acier verticalement phallique, franchement incongrue dans une chambre classique, mais qui donnait tout de suite une idée de l’usage de cette pièce au spectateur averti. Les quelques spectateurs assis sur des banquettes semblaient d’ailleurs avertis depuis quelques décennies, et je m’installais entre deux papys visiblement ravis de mon arrivée. L’entrée en scène de la superbe brune aux longs cheveux frisés qui m’avait subrepticement suivi, me rassura aussitôt sur leurs goûts hétérosexuels.
   Avec son arrosoir [e7 verticalement] son chapeau de paille genre « belle [a7 verticalement] champs », sa petite robe en [a1 verticalement] bien sage était bien un [a7 verticalement] seuls attributs de l’[a4 horizontalement] blanche qu’elle était sensée jouer, et ses premiers déhanchements au rythme soutenu de la musique syncopée corroborèrent mon analyse. De cambrure suggestive [d8 verticalement] pose [c1 verticalement], elle finit par faire tomber sa robe à la fin de la première danse, pour se retrouver dévêtue de dentelles sophistiquées qui contrastaient avec son chapeau rustique enfoncé jusqu’au [g2 horizontalement] des yeux. Cet accoutrement qui aurait été grotesque avec une fermière rustique s’avérait délicieusement obscène sur cette jeune femme sculpturale, et aurait donné à quiconque quelques émotions quelque soit son [d5 verticalement].

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   Je vous laisse découvrir la suite du spectacle par vous-même, ce pourquoi vous trouverez 50 euros dans cette lettre, et je vous propose de vous rendre à cette adresse en utilisant le chemin par lequel vous êtes venue. Prenez le temps de terminer votre repas, mais ne quittez pas le restaurant après 13h15, heure à partir de laquelle je vous communiquerai l’adresse si vous n’avez pas encore trouvé le nom de la rue où vous devez vous rendre. N’oubliez pas d’éteindre votre téléphone mobile avant d’entrer dans la salle de spectacle, puis de le rallumer en sortant. Quoi qu’il arrive lors de ce spectacle, sortez de la salle avant 14h30.

   Au plaisir de ce chaud show hot,

Vagant

À suivre…

09 novembre 2007

BlogRoll Critéo et autres évolutions sur Extravagances

   Cette note technique est juste une petite mise au point, mais pas au point mort, rassurez-vous. Vous avez le plaisir, tout au moins je l’espère, de lire ma 200ème note. 200 Notes pour un peu plus de 2000 commentaires. Extravagances totalise en moyenne 200 visiteurs uniques par jour selon google analytics, 300 selon statcounter, 370 selon blogspirit, statistiques dont je ne m’explique toujours pas la divergence mais qui semblent assez stables. J’ai eu le plaisir de constater que mon page rank venait de passer à 4 sur google et que je suis toujours dans le top 500 des 3000 blogs Criteo.

   Criteo, c’est cette petite blogroll automatique libellée « liens furtifs » dans la colonne de droite. Je n’ai pas choisi ces liens. C’est vous-même, ami lecteur, qui l’avez fait sans même le savoir : A chaque fois que vous visitez un blog qui affiche la blogroll, Critéo considère ce blog « voisin » du mien et augmente la probabilité d’afficher des liens croisés entre nous puisque nous partageons le même lectorat. J’ai suivi de près l’évolution de ce blogroll installé le 11 Septembre sur Extravagances, et franchement, je trouve cela assez fascinant. En voici un bref historique :

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   Au commencement, je n’avais que des blogs de geeks, buzz et autre pipole : cela correspond à la majorité de la blogosphère qui n’est qu’une grosse caisse de résonance sans véritable création de contenu, car il est plus facile de copier/coller des photos, des videos ou traduire des articles que de pondre des notes véritablement créatives.
   Après 3 jours d’utilisation, j’ai constaté que le blog de LinaLoca avec laquelle nous avons des liens croisés traditionnels, s’est installée en tête de cette blogroll malgré le faible nombre de visiteur provenant de chez elle : nos blogs sont sans doute tous les deux dans les préférences de quelques lecteurs. Le cas Fishturn est différent : j’ai découvert son blog grâce à la blogroll, et je l’ai mis depuis dans ma liste de liens traditionnels. À l’opposé, le cas Gabrielle est tout aussi instructif : elle m’a viré de sa liste de liens traditionnels aux alentours du 17 Septembre (c’est tout au moins ce que je suppose selon google analytics) sans pour autant quitter ma blogroll où elle apparaît régulièrement. Je l’ai aussi retirée de ma liste de liens traditionnels voici un peu plus d’une semaine, et rien n’a changé : elle apparaît toujours aussi régulièrement dans ma blogroll Critéo
   J’estime donc que ce widget fonctionne assez bien, qu’il est très simple à mettre en place, qu’il ne ralentit pas trop l’affichage et permet de découvrir de nouveaux blogs « voisins ». Si NOLDA ou CUI - desquels je reçois une dizaine de visites quotidiennes – utilisaient cet outil, sans doute apparaîtraient-ils immédiatement dans mes liens furtifs qui, du coup, ne mériteraient plus cette appellation. Une liste de liens traditionnels, tels que ceux qui apparaissent sous le libellé « ma blogosphère », est assez pénible à maintenir. Là retirerais-je pour autant si la majorité de « ma » blogosphère adoptait Critéo ? Probablement pas pour les deux raisons suivantes :

- Au mois d’Octobre, voici mes statistiques selon Critéo :

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   Malheureusement, il n’est pas évident d’identifier ces visites dans Google Analytics et Statcounter.

- S’il est possible de « blacklister » un blog indésirable, il n’est pas possible de forcer un autre blog à apparaître, notamment un blog qui n’utiliserait pas Critéo.

   Ce qu’il faudrait développer, c’est un widget agrégateur de flux. Vous qui avez un blog, imaginez qu’au lieu d’aller sur Wikio ou Technorati pour accéder à vos flux RSS préférés, les titres de la dernière note de chaque blogs auxquels vous êtes abonnés apparaissent dans un widget installé sur votre blog ! Vous auriez ainsi une blog roll correspondant très exactement à vos préférences classées par ordre de mise à jour, et par conséquent maintenue automatiquement. Cela complèterait parfaitement l’offre de Critéo et permettrait sans le moindre doute d’abandonner la liste de liens traditionnels (Mr Critéo, si vous passez ici et lisez ces quelques lignes, il va falloir me payer très cher pour effacer cette idée géniale avant que la concurrence ne s’en empare ;) )

   Bon, assez de technique pour aujourd’hui, voilà quelques projets dans le désordre :
- Je me suis astreint à une note tous les deux jours jusqu’à présent. Sans doute vais-je passer à 2 notes par semaine dont le petit roman feuilleton hebdomadaire intitulé « Mission  libertine » chaque lundi. Pour en faciliter la lecture, il sera aussi disponible sous la forme d’un fichier pdf directement accessible en tête de gondole (haut de la colonne de droite)
- Passer en mode 3 colonne et peut-etre à la version « pro » de blogspirit afin de pouvoir utiliser les « notes longues », vous savez, celles ou il faut cliquer sur "la suite" pour avoir tout le contenu. Qu’en pensez-vous ?
- Mettre en place un Javascript pour surligner les mots clefs recherchés par les visiteurs provenant de google.
- Un jeu de carte libertin à imprimer pour lequel j’aurai besoin de cobayes testeurs, mais aussi d’illustrateurs aussi talentueux que bénévoles.
- Participer à l’édition 2008 du festival de Romans, si elle a bien lieu...
- Poursuivre et si possible rattraper 2 romans à 4 mains écrits avec… mystère ;)
- Un petit concours littéraire.
- Publier une nouvelle dans une revue.
- Reprendre mon roman en jachère dont j’avais parlé ici

   Vais-je parvenir à faire tout ça ? L’avenir nous le dira…

05 novembre 2007

Mission libertine – IV (2)

    Me voilà donc étendu, entièrement nu, les yeux bandés et les poignets attachés à la tête de lit. Mon cœur bat déjà la chamade rien qu’à imaginer ce qu’il va se passer dans les prochaines secondes. Je n’en ai qu’une vague idée et le paroxysme de mon excitation est là, à cet instant précis, après sa lente montée à lui suggérer mes désirs pervers sans jamais les écrire clairement. Voilà ! On vient de s’asseoir à mes côtés, et une main à la douceur toute féminine court sur ma peau, de mon cou à mes cuisses, de la pointe de mon glaive au pommeau de mes couilles. Je bande. Je suis moins excité par ma situation d’apparente soumission qu’à savoir Sarah tout près de moi, ou tout au moins de l’imaginer dans le rôle de composition que je lui impose. Car je ne suis pas sûr que ce soit bien elle qui est entrée dans la chambre jusqu’à ce que je reconnaisse sa voix.

- Bonjour Vagant.
- Bonjour Sarah.
- Je vois que vous êtes prêt.
- Oui. Je crois que vous l’êtes aussi. Il me semble vous avoir entendue poser un sac lourd de… comment dire…
- Quincaillerie. Je vais mettre un peu de musique pour vous détendre, et couvrir vos cris.

    Mozart entre dans la chambre. Son concerto pour clarinette l’inonde de sérénité apparente : la douceur d’une plume vient frôler mon gland aux muqueuses gonflées d’excitation. Est-ce donc ainsi qu’elle compte me faire capituler ? Probablement pas. Même si je n’ai encore jamais vu son visage, je sais, déjà par expérience, combien Sarah est imaginative. J'ai la certitude qu’elle saura faire durer le plaisir en jouant avec moi comme le chat avec la souris.

- Alors Vagant, avez-vous reconnu ce qui vient de passer sur votre jolie queue ?
- Une plume ?
- Perdu !

    Soudain, un vif tiraillement foudroie mon entre cuisse. La peine s’évanouit presque aussi rapidement qu’elle est apparue : Sarah vient de m’arracher un poil de testicules, probablement avec une pince a épiler. Je n’ai pas débandé d’un iota. Je suis toujours aussi excité de la voir, ou plutôt de la savoir aussi bien entrée dans mon jeu : ce qu’elle vient de m’infliger m’a étonné autant que la douleur associée, aussitôt calmée par le doux frôlement qui a repris tout au long de ma hampe qui hisse toujours aussi haut le pavillon de mes envies perverses.
    Sarah saute du lit, je l’entends ouvrir son sac, je distingue des bruits indéfinissables au dessus de mon corps offert aux vicissitudes que je provoque, et c’est maintenant une sensation de douceur aussitôt suivie d’une chaleur brûlante qui inonde ma verge. J’halète un instant, plus sous le coup de la surprise que de la brûlure qui s’atténue, pour ne laisser place qu’à la caresses de ses délicieuses lèvres tièdes et de sa langue encore chaude.

- Et maintenant, avez-vous reconnu ce que je vous ai fait ?
- Une fellation au thé chaud !
- Oui, je vous l’accorde, même si le thé n’a pas eu le temps d’infuser.

    Sans transition, c’est à la morsure de la glace que mon gland turgescent est soumis. Je ne peux retenir un cri affolé. Mes doigts se crispent sur mon ceinturon qui enserre mes poignets jusqu’à ce que je m’habitue tant bien que mal à l’étrange sensation. Sarah laisse fondre la glace sur mon ventre frémissant et me demande si j’ai su identifier le dernier de ses sévices.

- Une fellation au glaçon !
- Laquelle préférez-vous ?
- Au naturel.
- Je ne suis pas là pour votre plaisir, à moins que vous ne me demandiez grâce dès maintenant ?
- Vous plaisantez ?
- Non !

    Sans me laisser le temps de répondre, elle me glisse deux doigts dans la bouche pour barbouiller mes gencives de harissa. C’est infâme, mais ce n’est pas ça qui aura raison de ma persévérance ni de mon excitation : Que va-t-elle encore pouvoir inventer ? Voilà toute ma motivation : savoir jusqu’où je peux la pousser. La réponse tombe aussitôt sous la forme d’une autre question :

- Deux couples libertins se rencontrent. Combien de trios distincts peuvent-ils former ?
- Quatre.
- Bien. Quelle position est la réponse à l’énigme suivante : « Deux pénètrent et deux sont pénétrés, et pourtant ils ne sont que trois » ?
- Le sandwich.
- C’est juste.
- Qui a dit : « L’amour est un esclavage consenti » ?
- Sacha Guitry ?

    Je reconnais les questions de mon petit jeu de société libertin, ainsi que l’affreux tiraillement sur mes testicules qui m’arrache un bref gémissement.

- Non, c’est Roland Jacard ! Vous devriez le savoir, c’est tout de même vous qui avez mis au point toutes ces questions. Bon, poursuivons donc avec Sacha Guitry puisque vous y tenez : De quel livre de Sacha Guitry est tiré cet extrait : « Etre marié ! Ca, ça doit être terrible. Je me suis toujours demandé ce qu'on pouvait bien faire avec une femme en dehors de l'amour. » ?
- Je… Je ne sais plus.
- Faisons… un… rêve !

    Telle une institutrice perverse, Sarah m’a arraché un poil à chaque mot de la bonne réponse. La douleur n’avait pas le temps de disparaître qu’elle était aussitôt ravivée, et il me semble que ma peau en a gardé la mémoire lorsqu’une terrible morsure m’arrache un râle : celle d’un glaçon appliqué sur mes bourses encore endolories. Pour la première fois, le doute s’insinue dans mon esprit. Vais-je tenir ? La raideur infaillible de ma verge me donne la réponse : je sais le meilleur encore à venir.
    L’avantage d’avoir les poignets liés ensembles est de pouvoir se retourner, ce que me demande Sarah. J’obtempère le cœur battant à l’idée de ce qui m’attend : voir assouvies mes envies inavouées. Avec les genoux repliés sous mon buste, j’imagine très bien le spectacle que je lui offre. J’en ai la certitude lorsque je sens ses mains écarter la raie de mes fesses pour dévoiler mon anus à ses yeux et ses doigts inquisiteurs. L’un d’entre eux vient déposer une noix de gel sur mon petit orifice encore clos, et il en force l’entrée avec le doigté d’un cambrioleur expérimenté. Je sens mon petit trou s’ouvrir facilement sous la pression du doigt qui s’immisce, toujours plus profondément, jusqu’à la garde, avant de ressortir, phalange après phalange. Encore un peu de gel et il revient à la charge, brusquement. Il s’enfonce d’un coup, ressort, rentre à nouveau, et finit par coulisser dans mon cul ajusté comme un tube sur son piston. Mais je me doute que Sarah a prévu une autre cylindrée. Je n’ai pas longtemps à attendre pour qu’entre mes fesses vienne se loger quelque chose de souple, oblong, et conséquent.

- Alors Vagant, vous me demandez grâce ?
- Enculez-moi !

    Sarah fait pointer le bout apparemment conique de l’objet qu’elle veut m’introduire à l’entrée de mon orifice presque vierge. La pression s’accentue. Je ne parviens pas à me détendre. Au contraire, je serre les dents. Elle me force, elle me fait mal, mais elle m’ouvre malgré tout. L’oreiller écrasé contre mon visage étouffe mes gémissements, quand elle m’enfonce petit à petit sa chose dans le rectum. C’est loin d’être aussi agréable que je ne l’imaginais, et le retrait s’avère pénible. Sarah arrose mon anus à peine dilaté d’une bonne giclée de gel pour me pénétrer à nouveau avec son gode, encore plus profondément. J’essaie de résister à la déferlante sensationnelle tandis qu’elle accélère ses va et vient dans mon cul, entre excitation cérébrale à me faire sodomiser par une femme et l’inconfort de mon petit orifice tout dilaté. Malgré toute l’intensité de ces nouvelles sensations anales, je sens la tête de Sarah s’immiscer entre mes cuisses, son souffle chaud sur mes couilles qui ballottent au dessus de son visage, sa bouche qui vient s’emparer de ma verge tendue, et la morsure de ses dents sur mon sexe qui me fait hurler ! Stop ! J’abandonne, vous avez gagné ! Comme la dernière fois...

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    Un coup d’œil à ma montre me tira de ma rêverie dont les effets gonflaient encore mon pantalon. Nous étions un peu en retard sur l’horaire et j’hésitai à appeler Marina à laquelle j’avais remis la seconde enveloppe quelques jours plus tôt. Je décidai de ne pas risquer de les déranger à un moment délicat, mais de m’approcher de l’entrée du restaurant de la mosquée où j’allai soumettre Sarah à une épreuve particulièrement vicieuse qui,  déjà, m’avait pris des heures de mise au point.

À suivre…

02 novembre 2007

De la morale et de la liberté (2)

 Attention. Cette note cite une scène particulièrement violente qui risque de heurter votre sensibilité.

b44cedbe440ef59775177a79d99a3a5c.jpg   « L’ouvrage n’étant pas massicoté, il est préférable, pour l’ouvrir, d’user d’un instrument plutôt que de son doigt. » Vendu sous blister avec cet avertissement collé sur sa couverture, Un roman sentimental est une magnifique opération commerciale. Pensez donc : Alain Robbe-Grillet, académicien de 85 ans, laisse à la postérité un sulfureux roman érotique ! Erotique, vraiment ? Si aucun avatar mercantile n’est épargné au lecteur pour aiguillonner son excitation, qu’en reste-t-il après avoir eu le supposé plaisir de démassicoter ce livre ? Voici une des premières scènes qui compose ce fameux roman et qui vous permettra d’apprécier son style si délicat…

5

Vers le mur du fond, celui sur lequel mes yeux alanguis errent avec le plus de facilité, je distingue, en premier plan d’un dessin dont l’évidence se confirme rapidement, perspective forestière aux troncs verticaux et rectilignes, une sorte de bassin d’eau si claire qu’elle en devient presque immatérielle, élargissement oblong d’une source limpide, aussi profond qu’une baignoire ou même davantage, entre des roches grises aux formes arrondies, douces au toucher, accueillantes. Une jeune fille est assise là, sur la pierre polie par l’usure qui représente pour elle une banquette idéale au ras de l’eau, où ses longues jambes remuent avec abandon dans les remous aux reflets bleus de l’aimable nymphée, naturelle autant que pittoresque, dont la température doit être identique à celle de l’air ambiant, ainsi que des charmes féminins eux-mêmes qui ondulent, déjà liquides, au dessus du miroir mouvant aux frémissements imprévus.
.

   C’est après que ça se gâte. Invité chez Taddeï le 24 Octobre dernier pour la présentation de son roman, Alain Robbe-Grillet nous apprend qu’il y raconte les pérégrinations sexuelles de petites filles supplicées à mort dans un français irréprochable, avec un luxe de détails Flaubertien mais aussi la distanciation nécessaire et assez d’invraisemblances pour créer une atmosphère onirique, fantasmagorique, théâtrale qui situerait son roman dans le cadre de la catharsis. Voici quelques extraits de cette interview :

FT : Pensez-vous qu’on était plus tolérant à l’époque [ en 1974 ]

ARG : Oui car de plus en plus on confond le fantasme et la réalisation du fantasme. Or c’est exactement le contraire. Quelqu’un qui écrit, en général, est quelqu’un qui se soigne lui-même, qui soigne sa perversion en l’écrivant.

FT : C’est l’impression que vous avez, vous ?

ARG : Je ne sais pas mais… j’ai Aristote avec moi pour défendre cette thèse, dite de la catharsis. Et néanmoins, il y a quand même à l’heure actuelle un envahissement par le bien pensé. C'est-à-dire que ce soit politiquement correct, sexuellement correct, littérairement correct, racialement correct, etc… Il semble maintenant que quand on écrit quelque chose d’incorrect, c’est comme si on le commettait. C’est une méconnaissance totale de ce que c’est que l’écriture.

[…]

FT: Là vous faites monter, monter les fantasmes, et à partir du moment où il y a des enfants ça devient très différent. Vous vous attendez à quoi ?

ARG : Comme on le disait tout à l’heure, ce sont des écrits intimes, que j’écrivais pour moi, et celui là qui est rédigé avec un très grand soin, qui est quand même fait selon le même souci de représenter ce que j’ai dans la tête, un souci autobiographique pour ainsi dire, et il est évident que depuis que j’ai douze ans, j’ai toujours aimé les petites filles, c'est-à-dire que je pense qu’il y a des quantités de gens qui sont dans la même situation. L’amour pour les jeunes, les petits garçons pour les homosexuels et les petites filles pour les hétéros, c’est quelque chose d’extrêmement répandu, mais qui se domine très facilement, qui ne se réalise pas quoi ! Mais le penser ne fait de mal à personne.

[Reportage présentant les associations de défense de l’enfance qui s’étaient insurgées lors de la parution du livre rose bonbon, parce qu’il véhiculait l’idée que les enfants victimes des crimes pédophiles sont consentants.]

ARG : Ces gens qui se plaignent sont des pervers, visiblement !

FT : Pourquoi ?

ARG : Ils ont lu ça, et ils ont tout de suite gommé le fait que c’est un écrit littéraire, et ils ont réalisé le fantasme eux même dans leur tête ! À ce moment là ils se sont gendarmés contre qui ? Contre eux même ! Ces gens devraient être tous en prison ! Parce que c’est eux qui ont effectué la réalisation dans leurs cerveaux malades !

[…]

ARG : Puisque je parlais d’Aristote tout à l’heure, il a bien précisé dans la poétique que l’effet de catharsis ne jouait que selon certaines règles de distanciation par rapport au sujet. C'est-à-dire que si le fantasme est raconté de façon trop… Il ne parlait pas de fantasmes sexuels, Aristote, mais si l’idée est racontée avec trop de passion sensuelle alors, à ce moment là, on risque de provoquer ce que qu’Aristote appelle la mimésis, c'est-à-dire que le lecteur a tendance à vouloir réaliser lui-même ce qu’il est en train de lire. Alors que au contraire, avec cet effet Brechtien de distanciation, c’est l’effet inverse : la catharsis, c'est-à-dire que le lecteur va être purgé de ses passions, grâce à mon livre !

   Voici les passions en question…

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Quant aux trois plus jeunes des petites filles, Crevette, Nuisette et Lorette, qui ont sept, huit et neuf ans, elles se sont beaucoup amusées pendant leur service. Ramenées à leur dortoir J1, elles en parlent ensemble avec émerveillement. On leur a permis de goûter à toutes les liqueurs qu’elles devaient servir à genoux. Elles ont sucé des messieurs vigoureux et de jeunes dames parfumées. On les a caressées, embrassées, léchées. On a bourré des crèmes excitantes dans leurs orifices trop enfantins, avant de les branler de façon très douce. Elles ont admiré une adolescente qui flambait comme une torche. Elles ont vu couler le sperme et le sang, mais aussi les pleurs des collégiennes que l’on torturait. Vers la fin de la nuit, elles sont descendues dans les caves pour assister au supplice d’une servante de treize ans (vendue par sa famille) qui s’était enivrée. Après l’avoir violée de toutes les façons, des messieurs ont procédé à son écartèlement sur une machine spéciale, pendant qu’ils lui enfonçaient des aiguilles à travers tout le corps, dont les quatre membres se sont désarticulés peu à peu. Pour finir, on lui a arraché complètement l’une des cuisses, en tirant la jambe par le pied, et on l’a laissée se tordre dans un flot de sang pour mourir comme ça sans secours. Oui, c’était vraiment formidable.

   J’ai choisi cette scène parce qu’elle est assez représentative de l’ensemble de « l’ouvrage » et assez courte pour être citée. Je vous laisse imaginer les 200 scènes intermédiaires où Robbe-Grillet raconte avec bien plus de détails les démembrements dont il semble si friand. Vous trouvez ça érotique, vous ? Si la catharsis a pour objet de purger le lecteur de pulsions communes, voire même fondamentales dans la construction du psychisme de chacun mais néanmoins réprimées par la loi ou la morale, comme l’interdit de l’inceste mis en scène  - et puni – dans Oedipe Roi de Sophocle , qu’en est-il des pulsions criminelles d’Alain Robbe-Grillet ? La majorité de l’humanité partage-t-elle, à l’instar de cet auteur, le fantasme de découper un nouveau né au hachoir sous les yeux de sa mère elle-même torturée à mort ? Qui pourrait donc avoir besoin de lire un tel livre – si tant est que la supposée catharsis soit plus efficace que celle mise en scène dans L’orange mécanique ? De surcroît, Sophocle ne décrit pas les égarements d’Oedipe dans ses détails charnels avec la complaisance de Robbe-Grillet à l’égard de ses bourreaux d’enfants. Chez Sophocle, la mise à distance n’est pas qu’une vague atmosphère onirique : c’est une véritable tragédie qui donne du sens à la pulsion libidinale, qui la « corticalise » en l’inscrivant dans un mythe fondateur.
   En vérité, le supposé effet cathartique de Un roman sentimental n’est qu’un misérable cache misère philosophique pour permettre la publication d’abominations qui n’auraient jamais dû franchir les portes d'un cabinet psychiatrique. Il ne s’agit pas de l’éventuelle purge du lecteur mais de celle bien réelle de l’auteur. Que les boyaux de son cortex incontinent défèquent des fantasmes abjects sur un bout de papier, soit. Qu’il les dore au subjonctif, pourquoi pas : c’est bien la moindre des choses de la part d’un académicien. Mais qu’il nous les donne à lire donne envie de vomir. Robbe-Grillet est comme un vieillard sénile qui exhibe son pot de chambre après une nuit de fièvre diarrhéique.

Voilà sa place :

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   Mais ne tirons pas la chasse trop vite !

   Primo, il ne faudrait pas  jeter l’anathème contre toute sorte de libertinage comme le fait Thierry Giaccardi chez  Stalker, et je ne m’associerai certainement pas à ceux qui militent pour le retour du puritanisme. Je regrette d’ailleurs que l’adjectif « libertin » soit associé aux noms de Sade et de Robbe-Grillet, et je ne suis pas le premier à le faire. En 1798, Restif de la Bretonne, libertin s’il en est, publia Anti-Justine avec pour préface : « Personne n'a été plus indigné que moi des sales ouvrages de l'infâme de Sade [….] Ce scélérat ne présente les délices de l'amour qu'accompagnées de tourments, de la mort même pour les femmes. Mon but est de faire un livre plus savoureux que les siens et que les épouses pourront faire lire à leurs maris, pour en être mieux servies ; un livre où les sens parleront au cœur ; où le libertinage n’ait rien de cruel pour le sexe des grâces, et lui rende plutôt la vie, que de lui causer la mort ; où l’amour ramené à la nature, exempt de scrupules et de préjugés, ne présente que des images riantes et voluptueuses. On adorera les femmes en le lisant ; on les chérira en les enconnant : mais l’on en abhorrera davantage le vivodisséqueur […] »

   Secundo, Un roman sentimental a tout de même une vertu, celle de remettre la question de la morale sexuelle au goût du jour. Honnêtement, Robbe-Grillet n’a rien inventé comme le souligne Pierre Assouline : il n’a fait qu’écrire une nouvelle version de Justine, et il va moins loin que Pasolini et son insoutenable Salo , ou les 120 jours de Sodome qui avait osé mettre en images de semblables abominations – avec au moins l’intention (ou le faux prétexte ?) de les dénoncer en les attribuant au fascisme. C’est sans doute au niveau de l’image que devrait se situer aujourd’hui le débat.

   Dans un monde où on dispose des moyens techniques pour créer des images de toutes sortes, où la réalité virtuelle permet même d’envisager une seconde vie, rien n’empêche de mettre à la disposition du public des logiciels permettant de réaliser des images pédocriminelles plus vraies que nature. Alors que le fait de détenir des images « pédophiles » est sévèrement puni par la loi, on pourrait gagner « honnêtement » de l’argent en vendant des logiciels permettant de produire des images pédophiles virtuelles réalistes ? La frontière entre la légalité et le crime ne se jouerait alors qu’à quelques pixels près, ou bien il serait interdit de représenter graphiquement des scènes décrites avec tous les détails nauséeux (in)imaginables ? On retrouve curieusement le paradoxe de Robbe-Grillet qui veut enfermer ceux qui imaginent la mise en scène de ce qu’il écrit, et on peut légitimement se demander si l’arsenal législatif est vraiment adapté à ce type de question.

96b83235684f690a8e6e8e55aca7fc0b.jpg   La question de la morale sexuelle, toujours d’actualité, est épineuse mais remarquablement traitée par Jean-Claude Guillebaud dans un de ses essais, La tyrannie du plaisir : N’y aurait-il donc pas d’autres choix possibles qu’entre permissivité claironnante ou moralisme nostalgique ?
   Dans une tentative de remise à plat, Jean-claude Guillebaud prend d’abord un recul historique qui permet de tordre le cou à bien des idées préconçues dont la liberté sexuelle de l’antiquité, l’austérité du moyen âge ou celle du Christianisme, pour nous rappeler la répétition de l’histoire à laquelle nous croyons avoir échappé du haut de notre courte vue.  Il convie au débat historiens, philosophes, sexologues et sociologues pour aborder le sujet sous tous ses aspects, dont l’individualisme à outrance qui appauvrit l’échange qui devrait résulter du rapport sexuel où chacun des acteurs instrumentalise l’autre afin de parvenir à l’autosatisfaction motivée par l’acte en tant que fonction, et non plus en tant que moyen de communication privilégié : Le plaisir devient pure affaire anatomique, marchande et sportive (en attendant d’être cybernétique !) Il est prestation, rassasiement ou performance".
   Face à la complexité de ces questions, Jean-Claude Guillebaud examine la démission de la société qui relègue les questions de société aux experts médicaux impuissants et aux juristes partagés entre deux logiques contradictoires de l’individualisme contemporain, celle de la revendication infinie de droits et celle de la demande de protection…

 

   Comment ne serait-on pas troublés, dès qu’on se ressouvient du passé, par cette singulière situation ?
   Vers le milieu des années 60, nous avions congédié le prêtre, le moraliste, le politique en charge du bien commun. Nous nous sentions la capacité - historiquement sans précédent - d’accorder à l’individu une primauté définitive sur le groupe. Nous pensions être investis du pouvoir de récuser ces prudences immémoriales, concessions aux contraintes, ruses collectives infinies et transactions de toutes sortes par lesquelles les sociétés humaines conjuguaient tant bien que mal l’aspiration au plaisir et l’impératif communautaire.
   Voilà trente-cinq ans, nous fûmes, en matière de sexualité, plus intrépidement constructivistes qu’aucune société ne l’avait jamais été avant nous. L’apothéose de l’individu, son émancipation parachevée figuraient les vraies conquêtes de la modernité occidentale. Nous étions désormais assez riches, assez savants, assez raisonnables pour rejeter les superstitions du passé. Et assez libres, enfin, pour en dénoncer les tyrannies intimes.
   La raison ne disqualifiait-elle pas la religion ? La démocratie ne rendait-elle pas inopérante la perpétuation politique des contraintes ? La connaissance ne nous assurait-elle pas la maîtrise des anciennes fatalités de l’espèce ? La science ne nous livrait-elle pas les clés de la procréation elle-même ? La certitude du progrès ne nous dispensait-elle pas de cette fidélité peureuse aux traditions ? La foi en l’universel, enfin, ne nous autorisait-elle pas à toiser le « pathos spécifique » des cultures humaines comme s’il s’agissait d’aimables folklores, avec leurs tabous et leurs précautions holistes ? Ce droit au plaisir, nous nous l’accordions comme une extraordinaire récompense historique. Il l’était en effet. On aurait bien tort de sourire rétrospectivement de cet optimisme.
   Si l’on est troublé, aujourd’hui, c’est en voyant ce projet grandiose se heurter finalement aux mêmes obstacles, aux mêmes contradictions, aux mêmes risques mortels, surtout, que toutes les utopies qui l’avaient précédé. Le " climat " du moment, ces périls qui affleurent et ces peurs qui rôdent nous renvoient, au détail près, à des situations déjà vécues dans l’Histoire.
   Cette violence polymorphe qu’à tort ou à raison nous sentons autour de nous, ce vertige sécuritaire qui nous empoigne au point de nous pousser à la panique juridique, ce sont précisément - on l’a vu dans les chapitres qui précèdent - ce que s’entêtèrent à conjurer les sociétés du passé. Il faudra nous résoudre à admettre que ces cultures traditionnelles, dont nous voulions orgueilleusement nous démarquer, n’avaient pas si mal compris l’intrication indissociable entre la sexualité et la violence.


J.C. Guillebaud : La tyrannie du plaisir, p. 379-381

   Aujourd’hui, l’appareil judiciaire et les dispositifs pénaux nous tiennent lieu de directeur de conscience. Je crois que Un roman sentimental n’est qu’une grotesque provocation à leur endroit : je soupçonne que Robbe-Grillet a pour dernière ambition de se faire censurer afin de siéger aux côtés d’un Sade au panthéon des célébrités sulfureuses, lui qui a toujours méprisé « l’immortalité » bien pensante de l’académie Française. Ce vieillard n’a plus grand-chose à perdre. Nous, nous risquons de perdre encore un peu de liberté d’expression à cause de nouvelles législations réactionnaires qui pourraient être appliquées à tort et à travers. Le mieux que nous puissions faire est bien de laisser Un roman sentimental partir au pilon et de s'en convaincre en lisant La tyrannie du plaisir.

01 novembre 2007

De la morale et de la liberté (1)

MME THERBOUCHE. Ne vous compromettez pas. N’écrivez pas sur la morale. Tout le monde attend de vous que vous affirmiez le règne de la liberté, que vous nous libériez de la tutelle des prêtres, des censeurs, des puissants, on attend de vous des lumières, pas des dogmes. Surtout, n’écrivez pas sur la morale.

DIDEROT. Mais si, il le faut.

MME THERBOUCHE. Non, s’il vous plaît. Au nom de la liberté.

DIDEROT. C’est que je ne sais pas si j’y crois, moi, à la liberté ! Je me demande si nous ne sommes pas simplement des automates réglés par la nature. Regardez tout à l’heure : je croyais venir ici me livrer à une séance de peinture, mais je suis un homme, vous êtes une femme, la nudité s’en est mêlée, et voilà que nos mécanismes ont eu un irrésistible besoin de se joindre.

MME THERBOUCHE. Ainsi, vous prétendez que tout serait mécanique entre nous ?

DIDEROT. En quelque sorte. Suis-je libre ? Mon orgueil répond oui mais ce que j’appelle volonté, n’est-ce pas simplement le dernier de mes désirs ? Et ce désir, d’où vient-il ? De ma machine, de la vôtre, de la situation créée par la présence trop rapprochée de nos deux machines. Je ne suis donc pas libre.

MME THERBOUCHE. C’est vrai.

DIDEROT. Donc je ne suis pas moral.

MME THERBOUCHE. C’est encore plus vrai.

DIDEROT. Car pour être moral, il faudrait être libre, oui, il faudrait pouvoir choisir, décider de faire ceci plutôt que cela… La responsabilité suppose que l’on aurait pu faire autrement. Va-t-on reprocher à une tuile de tomber ? Va-t-on estimer l’eau coupable du verglas ? Bref, je ne peux être que moi. Et, en étant moi et seulement moi, puis-je faire autrement que moi ?

MME THERBOUCHE.  Que la plupart des hommes soient ainsi, je vous l’accorde. Vous êtes persuadés de vous gouverner par le cerveau alors que c’est votre queue qui vous mène. Mais nous, les femmes, nous sommes beaucoup plus complexes, raffinées.

DIDEROT. Je parle des hommes et des femmes.

MME THERBOUCHE.  Ce n’est pas possible.

DIDEROT. Mais si.

MME THERBOUCHE.  Vous ne connaissez rien aux femmes.

DIDEROT. Vous êtes des animaux comme les autres. Un peu plus charmants que les autres, je vous l’accorde, mais animaux quand même.

MME THERBOUCHE. Quelle sottise ! Savez-vous seulement ce qu’une femme éprouve pendant l’amour ?

DIDEROT. Oui. Euh… non. Mais qu’importe ?

MME THERBOUCHE. Savez-vous ce qu’une femme ressent lorsqu’elle s’approche d’un homme ? Ainsi, par exemple, moi, en ce moment, qu’est-ce que je peux sentir ? Oui, et si moi, en ce moment, je feignais…

DIDEROT. Pardon ?

MME THERBOUCHE. Si je n’avais pas de désir pour vous ? Si je mimais la tentation ? Si je tombais dans vos bras avec tout autre intention que celle que vous imaginez ?

DIDEROT. Et laquelle, s’il vous plaît ?

MME THERBOUCHE. Hypothèse d’école, nous discutons. Supposons que je n’aie pas de désir pour vous mais que j’essaie simplement d’obtenir quelque chose de vous.

DIDEROT. Et quoi donc ?

MME THERBOUCHE. Hypothèse, vous dis-je. Imaginez que je sois perverse. Il faut bien être libre pour se montrer pervers. Le vice ne serait-il pas la démonstration de notre liberté ?

DIDEROT. Non, car vous seriez une machine perverse, naturellement, physiologiquement perverse, mais une machine.

MME THERBOUCHE. Passionnant. Et tellement judicieux.

DIDEROT. Bref, votre objection ne change absolument rien à ma théorie. S’il n’y a point de liberté, il n’y a point d’action qui mérite la louange ou le blâme. Il n’y a ni vice ni vertu, rien dont il faille récompenser ou punir.

MME THERBOUCHE. Bravo ! Mais alors, comment édifier une morale ? Je me demande bien ce que vous allez pouvoir écrire.

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deb3e19783cdde4299b14de18c415473.jpgCette note clôt ma série sur Diderot selon Eric Emmanuel Schmitt dans « Le libertin », et introduit la question de la morale sexuelle. C’est un sujet qui m’a longtemps travaillé, et qui est même au cœur de mon existence puisqu’il stigmatise mon pêché « mignon » : la luxure ! Je l’avais esquissé avec une note humoristique il y a près d’un an, mais il me va bien falloir l’aborder de front d’autant plus que l’actualité littéraire s’y prête merveilleusement bien !

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