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31 mars 2008

Sans vain cœur ni vain cul (chapitre 26)

    Inondés de sueur et de sperme, arrimés l’un à l’autre dans l’obscurité silencieuse, nous entendons à peine le monde gronder au loin. Nous, nous glissons l’un sur l’autre comme deux lutteurs huileux, sans vainqueur ni vaincu. Nous vivons une utopie libertine, celle du sexe comme un jeu qui n’influerait pas la relation humaine, aux antipodes du sentimentalisme pour prétexte à un assouvissement sexuel bâclé : sans vain cœur ni vain cul.  

Sans vain coeur ni vain cul - p. 119

wet nudity par ~LaPerleNoire sur Deviant ART
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Cette note termine cette (trop) longue série commencée avec Mission Libertine. Ce n’est pas le point final de ce roman, mais la fin de sa première partie. La suite ne sera pas publiée en ligne pour diverses raisons, dont celle de ne pas ennuyer mes lecteurs avec des textes longs inadaptés au blog. Quant au format pdf, je crois que les 120 pages de la première partie dépassent ce qu’on peut lire sur un écran. En conclusion, ceux et celles qui ont aimé le début liront l’intégralité de ce roman au format papier si je parviens à le terminer, et à le faire publier…

29 mars 2008

Un vague amant (2)

   Oxford Street, 15h. Le froid glacial nous jette dans un bus bien anglais, rouge et à deux étages. Animée par la curiosité, Ninon monte au premier étage où nous avons l'heureuse surprise de ne trouver qu'un passager distrait. Nous nous asseyons au premier rang avec vue panoramique sur cette avenue commerçante. Nous nous en fichons éperdument.
   Je la prends enfin par les épaules pour l’embrasser langoureusement. Elle n'attendait que ça. Je sens sa langue glisser entre mes lèvres. J'y échappe pour perdre ma bouche dans son cou, lui mordiller l'oreille au passage, caresser son visage d’une main. L’autre remonte entre ses cuisses, jusqu'à son entrejambe. Je la masse au travers de son jean. Mes doigts s'attaquent au tissu épais, y ouvrent une brèche, et s'aventurent sur son ventre. Là, ils contournent l'ultime rempart de dentelle, et explorent sa petite forêt. Elle est bien plus touffue que je ne l’imaginais. Ninon soupire d'aise, elle écarte les cuisses, elle tente de s'ouvrir à ma caresse. Mais je n'ai pas les clefs de son plaisir. Le trousseau en main, j’ai beau fouiller, je ne parviens qu'à l'exciter. Notre pittoresque situation, à la vue de tous et de personne à la fois n’est sans doute pas étrangère à ce demi échec.
   Un autre bus nous croise en sens inverse. À l’étage, une vielle dame perdue dans ses pensées. Elle passe à quelques pieds de nous, sans nous voir. « Hello ! » dis-je en levant la main. Ninon sursaute, s'inquiète, rit à ma plaisanterie et s'abandonne à nouveau. Plus pour longtemps : le bus a atteint son terminus bien avant que Ninon atteigne celui de son plaisir. Nous sortons du bus encore plus rapidement que nous y sommes montés. Ninon finit de se rhabiller dans la rue.

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 À suivre…

27 mars 2008

Un vague amant (1)

Big Ben par ~endraum sur Deviant ART    Gare de Waterloo, un Jeudi de l’hiver 2001 à onze heure du matin. Je regarde défiler des visages inconnus. Surtout ceux des femmes. La plupart sont fermés mais certains s’éclairent en voyant un parent, une amie, un fiancé venu les attendre à l’arrivée de l’Eurostar.
    Officiellement, je n’ai rien à faire là. Pour mon employeur je suis rentré à Paris prendre une journée de congés, et pour ma femme je suis encore en mission à Londres. En réalité, je suis dans le no man’s land du mensonge, réfugié dans l’interstice entre ma vie professionnelle et ma vie familiale. J’y éprouve la sensation grisante d’échapper à toute contrainte pendant quelques heures, à toute convention, à toute promesse. Un plaisir qui vaut bien le prix de la duplicité et de la tromperie. En voyant soudainement apparaître le visage de Ninon coiffé d’un drôle de chapeau rond, je me demande si je ne me suis pas trompé aussi.
    J’ai rencontré Ninon sur internet quelques semaines auparavant. J’ai eu l’occasion de l’inviter à déjeuner deux ou trois fois, l’occasion de retrouver le plaisir du flirt avec une jeune femme après tant d’années de conjugalité. Elle a 23 ans. Moi, j’ai une quinzaine d’années de plus, et probablement de trop. Je l’ai invitée à passer deux jours avec moi à Londres, essentiellement parce que j’ai vu en elle une complice potentielle pour mon premier adultère. Je l’embrasse sur la joue comme une bonne amie.

 À suivre…

25 mars 2008

Comment décrire une double pénétration ?

Au vu de la levée de boucliers suite au premier paragraphe de ma dernière note, j’aimerais vous poser une question, ami lecteur : Comment décrire une double pénétration ?
Vous me direz que le cadre ainsi posé est un cliché pornographique en lui-même, ce qui est absolument exact. Mais l’effet cliché est-il pour autant inévitable ? Peut-on écrire quelque chose à la fois excitant sans tomber dans la plus basse vulgarité, relativement original tout en évitant la pseudo poésie et son effet « gnan-gnan » ?
Il me semble que j’ai le choix entre le ressenti « hautement érotique » (si tant est que je puisse espérer tutoyer ces sommets) ou la description « bassement pornographique » dans laquelle je semble m’être vautré, en passant par diverses périphrases entre autres métaphores.
Je vais donc m’essayer à cet exercice « littéraire » et demander aux lecteurs de juger les versions suivantes. J’invite aussi tous ceux qui souhaitent descendre avec moi dans cette arène glissante à écrire leur version en commentaire !

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Description purement pornographique : « Je m’enfonçai lentement dans son orifice anal lubrifié, savourant chaque centimètre de ma poussée inexorable dans son boyau. Lorsque que fus bien au fond, je sentis Yann reprendre sa vigoureuse pénétration vaginale. Prise de toutes parts, Sarah perdait tout contrôle. »

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Ressenti subjectif métaphorique : « Sarah m’ouvrait son corps comme on ouvre son âme, au plus intime. Je ne la prenais pas, non, c’est elle qui m’emportait au cœur d’une excitation irrésistible. Au travers de ses chairs extatiques, je sentis la présence de Yann toute proche. Lui et moi glissions bord à bord sur une mer de sensations, prêts à régater sur une mer bientôt démontée.»

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Images : « J’investis la cave par le soupirail, glissant précautionneusement à l’intérieur tout en savourant chaque centimètre de ma progression. Arrivé au fond, je sentis Yann traverser l’entrée principale pour l’envahir complètement. Remuée de fond en comble, Sarah perdait pied. »

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Ressenti subjectif réaliste : « Sarah sentit son anus lubrifié se dilater lentement sous la pression de mon gland, avant de se sentir possédée par derrière. Elle se savait sodomisée, et cela l’excitait plus que la sensation forte qui n’était pas encore franchement agréable. Toutefois, une douce chaleur l’envahissait peu à peu comme elle imprimait de petit mouvement de va et vient, emportant ma verge dans une valse hésitation. C’est le moment ou Yann guida son phallus imposant à l’orée de sa vulve et poussa à son tour. Sarah eut l’impression qu’elle ne pourrait jamais l’accueillir, que je prenais déjà toute la place. Mais il se glissa en elle malgré tout, au point de l’envahir complètement. Entre nous, Sarah se sentit clouée sur place, incapable du moindre mouvement. Pourtant, elle sentait au fond de ses chairs distendues un plaisir intense, prêt à jaillir au premier mouvement. À peine avions nous commencé à bouger en elle qu’il l’envahit, en un frisson remontant du bas ventre à l’échine, jusqu'à lui faire perdre tout contrôle d’elle-même. »

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Deux blogueurs ont déjà répondu à ma question et ont tenté l’expérience :

Maintenant, à vous de jouer !

24 mars 2008

Sans vain cœur ni vain cul (chapitre 25 - suite)


Nude, Malibu, 2007 by ~DaveR99 on deviantART     Son cul lubrifié accueillit mon vit à fesses ouvertes. Je m’y enfonçai lentement, inexorablement, savourant chaque centimètre de ma poussée. Lorsque que fus bien au fond, je sentis Yann reprendre son vigoureux pilonnage de l’autre côté. Envahie de toutes parts, Sarah se sentit définitivement perdre pied. Son fantasme prenait corps, les deux étalons auparavant sans visage avaient désormais les nôtres, et elle abandonna définitivement tout contrôle. Elle eut l’impression que tout son être se concentrait dans son bas ventre, qu’elle n’était plus que deux orifices labourés en profondeur, plus qu’une déferlante de jouissance qui s’écrasait entre nous comme sur des rochers. C’est lui que j’entendis jouir en premier dans un cri étranglé, et j’éjaculai à mon tour en gémissant. Entre les lèvres de Sarah filait une longue mélopée inarticulée.

     Un peu plus tard, Sarah me rejoignit dans la salle de bain, vibrante d’émotion et de reconnaissance. Elle se lova dans mes bras pour une dernière étreinte, la bouche pleine de sentiments indicibles qui lui sortaient par les yeux.

-  Merci. Merci infiniment Christophe. Vous avez mis la barre si haut… comment, comment pourrai-je….
- Je suis certain que vous saurez me surprendre. Vous gagnerez même nos prochaines joutes, une fois de plus. Vous savez bien que vous êtes la meilleure, de nous deux.

Sans vain coeur ni vain cul - p. 115

Lire la version corrigée et la suite...

20 mars 2008

Sex-Toy Story

Mon histoire sur Pinkeo: Sex-Toy StoryJe participe à un petit concours "littéraire" organisé par Pinkeo, dont le thème est : Une journée dans la peau d’un sex toy. J’en ai profité pour reprendre un ancien texte inédit sur ce blog, et je vous invite à lire ma note du jour ici.

Ce concours est ouvert jusqu’au 15 Avril, avec 4 godes à gagner (au total, hein, par pour la même personne parce qu’il ne faut pas être trop gourmande non plus, un peu de tempérance bon sang !) N’hésitez donc pas à y aller de votre petit délire, plus on est de fous, plus on ri !

17 mars 2008

Sans vain cœur ni vain cul (chapitre 25)

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    En voyant Sarah sucer Yann avec application, je ne ressentis rien d’autre qu’un surcroît d’excitation sexuelle. Ses lèvres ourlées semblaient s’apprêter à donner un baiser au bout du gland incarnat, mais elles s’ouvraient lentement au fur et à mesure qu’elle le gobait, jusqu’à avoir la bouche grande ouverte pour enfourner son pieu autant qu’elle le pouvait. Au retrait, ses joues se creusaient et ses lèvres s’agrippaient à la colonne de chair comme une ventouse, laissant derrière elles un filet de salive luisante. Elle alternait ces sucions profondes avec le léchage du gland en exhibant sa langue rose, comme une gamine vicieuse lèche un cornet glacé, le plus salement possible, tout en nous regardant alternativement droit dans les yeux. Yann retenait son souffle. Moi, j’étais au spectacle.

- Ça à l’air bon ! dis-je.
- Vous voulez goûter ? répondit-elle du tac au tac en me tendant la verge raide dont elle tenait la base.
 

Sans vain coeur ni vain cul - p. 111

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15 mars 2008

Short story

À vendre : chaussures bébé, jamais portées.

Faut pas trop lui en vouloir, il n’avait jamais lu Hemingway. En vérité, il n’avait jamais rien lu d’autre que l’Equipe, alors il n’a pas compris pourquoi on le traitait de plagiaire quand il a publié cette annonce sur ebay. Comme si être un père indigne ne suffisait pas. C’est ce que sa femme lui avait jeté à la gueule quand il avait voulu vendre les chaussures. Ex père aurait été plus juste mais il lui avait semblé inutile d’apporter cette précision. Cela n’aurait fait qu’envenimer les choses. Il reçut tout de même une offre acceptable, payée d’avance. Il profita que sa femme était partie pleurnicher chez sa mère pour envoyer le petit paquet par la poste. La jeune maman célibataire lui envoya un gentil mot pour le remercier, avec une photo de son marmot. Cela ne lui sembla pas bien malin, et c’était d’autant plus attendrissant. Il ne révisa jamais ce jugement. L’intelligence n’était pas ce qu’il estimait le plus. Surtout chez les femmes. Six mois plus tard, tout allait beaucoup mieux, pour lui. Il publia une nouvelle annonce sur ebay :

À vendre : alliance cause double emploi.

12 mars 2008

Suggestions et stéganographie érotiques

    Le docteur Cénas jouissait d’une notoriété départementale. On peut même affirmer qu’il était une véritable célébrité communale, et à ce titre le convive le plus en vue aux dîners mondains du sous-préfet. C’était en ces mémorables occasions que le pétulant docteur Cénas donnait toute la mesure de sa Science, dont les traitements de chocs si imaginatifs étaient illustrés d’anecdotes croustillantes qui n’épargnaient que les convives présents. Tenu au secret médical, il ne révélait pas les noms de ses patients, mais il n’était pas nécessaire de s’appeler Sherlock Holmes pour deviner quelle comtesse avait été guérie de sa constipation légendaire grâce à des lavements au bicarbonate de soude. Il y avait toutefois un cas qu’il ne mentionnait jamais, bien qu’il le préoccupât constamment, celui de Madame Auber, épouse de Monsieur Auber, pharmacien à Saint-Victor-sur-Loire.

    Lorsque Monsieur Auber fit appel au docteur Cénas, c’est parce que ce médecin était assez proche pour que sa brillante réputation lui parvînt, et assez éloigné pour qu’on ne jasât pas plus qu’on ne le faisait déjà. L’affaire était délicate, et Monsieur Auber ne savait plus par quel bout la prendre : menaces, injonctions, douches glacées, bromure et narcotiques réunis, le pharmacien avait tout essayé pour tenter de guérir son épouse, rien n’y faisait, elle demeurait insatiable. S’il ne l’avait pas aimée, l’affaire aurait été vite réglée et le divorce prononcé aux torts de la nymphomane. Mais voilà, non seulement il n’avait jamais eu la preuve qu’elle l’eût trompé, et quand bien même eût il su une telle infidélité, il l’aurait bien pardonnée tant que tous ne la sussent pas. Car Monsieur Auber avait fait un mariage d’amour maquillé en mariage de raison.

    Issu de la petite bourgeoisie Stéphanoise, Monsieur Auber venait d’ouvrir une modeste officine lorsqu’on lui avait présenté Mademoiselle Clémence de St Hilaire, un parti plus beau qu’il ne pouvait en espérer. Non seulement cette fille unique était issue d’une vieille et riche famille de propriétaires terriens, mais elle avait reçu la meilleure éducation dans un strict pensionnat catholique et surtout, elle était d’une grande beauté. Lui n’était pas laid, mais il était si gourmand que l’embonpoint avait fini par déformer ses traits.
    La première fois qu’il vît Mademoiselle de St Hilaire, il fut bien sur frappé par sa carnation pâle, ses traits de porcelaine, ses cheveux de jais ramassés en un chignon délicat qui mettait en valeur la finesse de sa nuque, et toute la noblesse de son allure. Mais il fut littéralement envoûté par ses grands yeux tristes, d’un noir profond, qui brillaient néanmoins d’un éclat fascinant. Quelques semaines plus tard, les noces étaient expédiées. Il en gardait un souvenir ému, non pas pour les sobres festivités mais pour la nuit nuptiale.

    Contre toute attente, ses rares expériences préalables et tarifées lui apparurent incomparablement plus fades que les transports trépidants de sa nuit de noce, au cours de laquelle son épouse montra un goût prononcé pour les mots autant que pour la chose. L’éventail de son champ lexical était aussi large que celui des pratiques auxquelles elle se livra, ainsi que les voies pour mener à bien ses aspirations sensuelles désormais légitimes. Le moraliste arguerait sans doute qu’elles étaient bien au-delà du devoir conjugal, fût-il accompli avec tout le zèle qu’autorisent les saints sacrements du mariage, mais le jeune pharmacien n’était pas fâché que son épouse ne lui refusât rien qu’il pût imaginer. Enivré de désirs, il but le nectar de leur union au calice de son égérie, jusqu’à la lie. Six mois plus tard naquit un robuste petit garçon.

    En pénétrant dans la pénombre de la chambre à coucher des Auber, dont les volets étaient clos et la porte fermée à clef, le docteur Cénas s’attendait à trouver une jeune mère neurasthénique. Madame Auber gisait dans son lit, à peine recouverte d’une chemise de nuit défaite qui s’ouvrait sur sa gorge haletante. Le drap repoussé dévoilait ses jambes jusqu’aux cuisses frémissantes, dont la peau glabre semblait luire d’une mauvaise fièvre.
    Lorsqu’il s’assit au chevet de la malheureuse, celle-ci tourna vers lui un visage si pâle, aux yeux charbonneux si luisants, un visage si touchant en vérité que le docteur en fut tout ému. D’une main fébrile mais étonnement forte, elle saisit le poignet du docteur en le suppliant de la soulager du feu qui la consumait de l’intérieur, qui n’avait de cesse de la tourmenter, elle et son brave époux épuisé, et tout en disant cela, elle attirait vers elle le bon docteur pour qu’il l’examinât en profondeur. Il interrogea du regard le pharmacien abattu au pied du lit, fit mettre un peu de lumière et il palpa tant et si bien sa patiente gémissante qu’elle se répandit en chaleureuses effusions.
    Malheureusement, son soulagement fut de courte durée, et le docteur s’était à peine rhabillé que la pauvre femme était prise de nouveaux tremblements sous le regard accablé de son mari. Le docteur Cénas tenta alors de masquer son impuissance à combler de telles attentes avec un lieu commun énoncé sur un ton docte : « Il faut combattre le mal par le mal ». « Oui, le mâle ! » renchérit Madame Auber avec un tel accent de sincérité que le docteur Cénas ne trouva pas l’idée si mauvaise. Il s’en félicita même, tandis qu’un nom lui venait à l’esprit : Paul Duboeuf, dit Paulo le Boucher.
    « Il va falloir être courageux » dit le docteur Cénas plein de compassion envers le pharmacien amaigri par les soucis et les efforts déjà fournis.

    Les doigts des bouchers ont parfois une certaine ressemblance avec les saucisses qu’ils manipulent. Cylindriques, les phalanges à peine marquées, les ongles engoncés dans une chair exubérante, chacun des doigts de Paul Duboeuf ressemblait déjà à une saucisse de Francfort. Mais Paulo le Boucher poussait le zèle jusqu’à incarner tout son fond de commerce : des cuisses épaisses comme des jambons de Bayonne, un poitrail de bœuf, une encolure de taureau, et une tête de veau où roulaient ses gros yeux humides au regard bovin. S'il eût pu inscrire sa colossale carcasse au concours agricole, il aurait remporté le premier prix dans toutes les catégories.
    Le docteur Cénas avait rencontré ce phénomène au début de sa carrière, quand il faisait ses premières armes en tant que médecin militaire. Le colosse avait été mis au trou pour avoir littéralement démonté toutes les filles à soldat qui avaient eu le malheur de croiser sa route. L’expertise médicale du docteur Cénas avait été déterminante pour sortir Paulo de ce mauvais pas : non seulement le pauvre garçon soufrait de priapisme, mais la nature facétieuse l’avait pourvu d’un organe calibré comme un saucisson à l’ail, dont le fougueux jeune homme ne savait tempérer les ardeurs.
    Afin de s’amender lorsqu’il eut repris la boucherie de son père à Besançon, Paulo s’était lancé dans la fabrication des préservatifs en boyau d’ovins au profit de la maison close locale. Il avait fini par en épouser la tenancière, une veuve qui en avait vu d’autres, et qui avait aussi vu l’intérêt qu’elle pouvait tirer de cette union : elle organisait de célèbres bacchanales estivales dans le jardin de son établissement, dont Paulo pouvait assurer l’approvisionnement.
    Fidèle en amitié, Paul Duboeuf se sentait encore redevable envers le docteur Cénas. Ce n’est pourtant pas la seule raison qui poussa les Duboeuf à accepter sa curieuse proposition.

recto...    Quelques jours plus tard, les Auber étaient plongés en pleine cure de chair : pendant que Madame était livrée aux mains du boucher, Monsieur était aux bons soins de la tenancière. Bienheureuse de ne pas avoir à endurer quotidiennement son char d’assaut de mari, Madame Duboeuf avait tout le loisir de s’adonner sans retenue à son péché mignon : la cuisine. Attablé du matin au soir en attendant les rares apparitions de son épouse, le pharmacien devait affronter les extravagances culinaires de son hôtesse.

    Rien que le petit déjeuner aurait rassasié un ogre: de la chiffonnade de jambon, des dentelles de gruyère, du lait frais à peine jaillit de la mamelle, l’orange aussitôt pressée, du rocamadour moulé à pleines mains ainsi que les miches de pain encore chaudes. Cela ne marquait que le début des hostilités, car pendant qu’il croquait tout cela avec un certain plaisir, surtout pour le croissant, elle lui préparait des œufs qu’elle saisissait à feux vif, ou plus délicatement : ses fameux œufs mollets aux lardons, avec lesquels il pouvait faire une mouillette à la confiture en attendant que la saucisse soit cuite à point. Car à peine avait-il terminé qu’elle préparait déjà la table pour midi. Lorsqu’elle était bien dressée, elle retournait en cuisine tandis qu’il se suçait encore le bout des doigts, salivant malgré lui pendant qu’elle chantonnait à la simple évocation du plaisir qu’elle allait prendre à tout lui faire engouffrer !

    Dès qu’il était midi, le déjeuner était prêt, et il était temps de passer aux choses sérieuses : après les petites bouchées financières et autres mignardises, crevettes au beurre, turbot sauce mousseline… peu à peu, Auber sentait qu’il s’enfonçait lentement, entre les cuisses de cailles à l’orange et les huîtres ouvertes, comme dans une douce béatitude, en remplissant la béance de son gosier extatique. Cela n’était pourtant que le coup d’envoi de va-et-vient effrénés entre la salle à manger et la cuisine, véritable marathon gastronomique qui se poursuivait tout au long de l’après-midi. Il ne cessait que pour dilater son estomac à l’occasion d’un petit trou normand, dans le seul but de mieux le lui remplir par la suite.

    Le soir venu, les filles sortaient de leur tanière avec l’arrivée des clients réguliers, ou d’autres hommes. Madame Duboeuf, même si elle était abondamment sollicitée, ne délaissait pas sa cuisine pour autant: pintade sautée au fenouil sur canapé, truite saumonée arrosée de chablis, consommé de crème d’asperge entre autres plats jaillissaient de ses fourneaux, sans qu’elle ne ressente rien d’autre qu’une folle allégresse à faire la cuisine comme son époux à faire l’amour. Auber, en revanche, était au bord du renvoi tant il l’avait avalée, cette cuisine  pantagruélique, de la poularde fourrée jusqu’à la crème de marron à la moelle. Parfois, une des filles venait lui tenir compagnie tandis qu’il s’attaquait aux desserts, Saraudin de fraises glacées ou pièce montée mousseline bourguignonne, et qui l’achevait d’une langue de chat.

verso    Après trois semaines de ce régime, les Auber prirent congé, définitivement guéris de leur penchant : ils avaient atteint l’indigestion escomptée.

 

 

 

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Cette nouvelle est ma réponse au défi lancé par le Cartophile : écrire une nouvelle inspirée par la carte postale qui illustre cette note. Je m’en suis imposé un autre : écrire un texte dont l’érotisme n’est que suggéré, voire même caché.

Je vous invite à lire les autres histoires à partir de là…

Toutes les histoires de la carte 22


 

10 mars 2008

Sans vain cœur ni vain cul (chapitre 24)


    Comment une jeune bourgeoise rangée, une mère de famille modèle, une épouse dévouée, peut se rendre le cœur battant dans le 14ème arrondissement de Paris, chercher fébrilement la rue Sophie-Germain, s’y arrêter face au numéro 12, franchir précipitamment l’entrée de cet hôtel, rougir comme une collégienne devant un réceptionniste goguenard en demandant la chambre de Mr Vagant, monter vivement les escaliers, puis ralentir devant une porte entrebâillée, hasarder un regard dans l’obscurité totale, pousser précautionneusement la porte de cette chambre, et y pénétrer lentement ? Comment une femme telle que vous peut faire une telle folie, accepter un rendez-vous à l’aveugle un Lundi 19 Juillet à 14h, avec un inconnu dont elle ne connaît que les mots ? Il en faut du désir, pour refermer la porte derrière soi, avancer à tâtons jusqu’au lit à peine aperçu en ouvrant la porte, s’y asseoir timidement, tout en sachant que cet inconnu vous attend là, brûlant des même envies que les vôtres !

Sans vain coeur ni vain cul - p. 105

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09 mars 2008

Votez pour moi !

En ce jour d’élections municipales, je vais vous révéler pour qui j’ai voté ! Mais auparavant, je vais vous raconter une méchante histoire.

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    Germaine Dupré promenait son caniche chaque matin, tout au moins jusqu’à ce que je l’assassine dans l’escalier de son immeuble. Or ce que je ne vous avais pas dit, c’est que jusqu’à ce jour maudit, Germaine Dupré était aux prise avec des injonctions partisanes : « Votez pour moi ! Votez pour moi !» Elle ne pouvait même pas faire un pas dans la rue dans l’espoir d’échapper à cet enfer électoral. Rendez-vous compte, même le maire s’y était mis. Lui avec lequel il était impossible d’obtenir le moindre rendez-vous, s’agitait désormais à chaque coin de rue, secouant les mains à tour de bras, et gare à celui qui aurait l’outrecuidance de refuser qu’on lui ébranle le bout du membre. Il faut dire qu’on était en pleine période électorale, il fallait voter, voter pour qui on voulait mais voter.

23996126ac216afdd79c1305f3ccd126.jpg    Épuisée par tant de sollicitations, Germaine Dupré ne parvenait même pas à trouver le repos. Même son sommeil était agité par un cauchemar récurrent : le jour des élections, dans l’école primaire qui servait de bureau de vote, Germaine Dupré trônait à la place de l’urne entre le président du bureau et son suppléant, nue sur une table de cantine et cul par-dessus tête. Lorsque quelqu’un venait, il pénétrait dans l’isoloir où il n’y avait qu’un lavabo afin de se laver les mains, et il en sortait aussitôt pour présenter ses papiers au président du bureau qui vérifiait que le votant était bien majeur. Le votant approchait alors sa main de la fente de Germaine Dupré toute tremblante d’émotion, il y agitait ses doigts un bref instant jusqu’à ce que le président dise d’une voix forte « A voté ! », et il s’en allait son devoir accompli. Mais les votants étaient bien trop rares pour satisfaire Germaine Dupré qui finissait toujours par se mettre les doigts au fond de la fente. Immanquablement, le président criait à la fraude électorale et Germaine Dupré se réveillait en sursaut, prise la main dans le sac, toute humide et pas que d’angoisse.

    Car Germaine Dupré était en manque. Mariée depuis plus de vingt ans, elle n’était plus soumise au devoir conjugal depuis que son époux agonisait d’un cancer interminable. Elle allait le voir chaque jour à l’hôpital et retournait toujours s’enfermer dans une lourde solitude. Bien sûr, elle disait à qui voulait bien l’entendre qu’elle attendait avec impatience le retour de son mari, mais en son for intérieur, elle attendait surtout qu’il la libère d’un mariage qui ne lui apportait plus que le pire. Au fil des mois, ses visites se faisaient de plus en plus courtes et même ses sorties en ville s’espaçaient. Elle passait le plus clair de son temps à s’évader enfermée chez elle. Conformément au cliché de la bonne ménagère, elle avait commencé par des romans à la couverture rose, sirupeux de bonnes intentions matrimoniales. Mais à force de lire des histoires de bellâtres bronzés, elle s’était surprise à les imaginer dans des situations plus salées. Incapable de soutenir le regard torve de son libraire libidineux, elle avait dû acheter les romans roses tant convoités sur internet, et elle avait fini par découvrir, à plus de cinquante ans, cet eldorado relationnel et érotique.

    Malheureusement, elle réalisa rapidement qu’elle était loin du cœur de cible. Elle essaya bien de faire quelques annonces humoristiques du genre « Echangerait un homme de soixante ans contre deux de trente » mais l’humour n’était guère de mise sur meetic. Elle décida donc d’écouler ses fantasmes érotiques sur un blog illustré de donzelles déshabillées, ce qui lui permettait d’attraper quelques mâles en manque de tendresse, au point d’avoir auprès d’eux un succès encore plus grand que dans sa jeunesse. C’est ainsi que Germaine Dupré engrangea les conquêtes virtuelles, de mails en chats msn, allumant plus de feux qu’un mois d’Août dans la garigue. Elle n’était pas devenue une nymphomane mais une véritable pyromane qui, grisée par ses conquêtes cérébrales, poussa l’audace jusqu’à s’inscrire au concours du festival de Romans ! Une audace de trop sans doute. Car elle réalisa rapidement qu’elle ne pouvait compter sur la seule bonne volonté de son lectorat, essentiellement masculin en provenance de sites pornographiques où elle était référencée. « Votez pour moi ! » avait beau clignoter sur son blog, les votes ne décollaient pas.

    Pendant ce temps là, Monsieur le maire caracolait en tête des sondages municipaux. Impossible d’échapper à ses tracts sur le marché dominical ni à ses promesses à la radio locale. Germaine Dupré l’entendit même donner des leçons de marketing politique à ses malheureux concurrents : « Pour une élection locale, il faut une campagne de proximité ». La même nuit, elle eut une révélation. Elle faisait son cauchemar habituel, le visage entre les genoux et le cul nu par-dessus tête, lorsque le maire en personne s’approcha d’elle à petits pas dédaigneux. Alors il lui dit sur un ton sentencieux : « Pour une érection locale, il faut faire une campagne de promiscuité ». Elle se réveilla en sursaut, plus humide que jamais et forte d’une résolution nouvelle : Elle aussi allait ébranler tous les bouts de membre qui se tendrait vers elle.

    En quelques jours, elle réunit son staff de campagne dans une réunion virtuelle ultra secrète. Malgré la jalousie féminine congénitale, Germaine Dupré était parvenue à se faire trois copines du même acabit auxquelles elle concédait parfois quelques vers érotiques afin d’améliorer leur ordinaire de beaufs en rut. Il était temps de passer de la théorie à la pratique, leur dit-elle en introduction, de se mouiller un peu, de prendre les choses en main. Une pour toutes, toutes pour une ! scanda-t-elle en guise de slogan avant de le leur annoncer son plan audacieux. Il fallait frapper fort, une nouvelle déclinaison de « demain on rase gratis », rien de moins. Trois jours plus tard, Germaine Dupré avait reçu des douzaines de votes en sa faveur. Autant d’accusés de réception l’attendaient sur sa messagerie, envoyés par chaque votant comme preuve irréfutable de sa bonne action. À elle de tenir ses engagements.

    C’est ainsi qu’une belle après midi de Mars, Germaine Dupré et ses trois acolytes virent défiler devant elles plus d’hommes nus qu’elles n’en avaient jamais vus. Sabre au clair et les yeux bandés, chacun imaginait son chibre aux mains des jeunes donzelles affolées qu’elle leur avait fait miroiter, toutes rivalisant d’obscénités pour satisfaire une promesse électorale qui, comme chacun sait, n’a jamais engagé que ceux qui y croient.

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Maintenant, ami lecteur, je vais vous faire un aveux : Infidèle jusqu’au bout des ongles, j’ai trouvé le moyen de voter pour plus d’un candidat ! Si vous ne savez pas à qui donner vos voix, je vous invite à faire comme moi :

5dc8ab33e92749e7444059c299a2221a.jpgDans la catégorie Bande Dessinée, vous pouvez donner un coup de pouce a Kalumis parce qu’elle illustrera une famille de mon jeu des 7 familles libertines ! (enfin, si elle ne me laisse pas tomber)

 

 

 

69c959a800ff0a8b7a9c2568a998cefa.jpgDans la catégorie Blog de Vie, je vous conseille le Troisième Wagon parce que ça me fait bien rigoler.

 

 

 

Dans la catégorie Littérature, mon cœur balance.

4bf778b7380cda2252cab277cf6c988a.jpgBien entendu, j’ai voté pour JICSVB. Non seulement j’aime beaucoup ce qu’écrit Dudek, mais j’y ai aussi pondu une petite nouvelle.

 

 


2ee27143a322306e89211803881e5bf6.jpgMais j’ai aussi voté pour Autrui parce que je trouve ça plutôt bon.

 

 

 


3a33d82c45a40c157e51e49abbe969db.jpgEt puis pour le Cartophile  d’autant plus que je vais essayer d’écrire une histoire pour sa carte spéciale numéro 22.

 

 


5ee4e117f32c054e9fc74dfcc330572f.jpgSans oublier Tranches 2 vie dont la qualité et la productivité m’ont toujours épaté.

 

 

 

 

aca9c6b4f72a7b1e0af360877bc303e6.jpgEnfin, dans la catégorie Nouvelles érotiques, en plus d’un vote masturbatoire pour moi-même, j’ai voté pour Impudique Magazine, non pas parce qu’elle m’a interviewé il y a quelques temps ni parce qu'elle avait publié une de mes histoires, mais parce que ce site le mérite.

Cela dit, cette liste n'est pas exhaustive, j'ai voté pour d'autres blogs, dont Petits papiers, papiers collés...

Sur ce, oubliez de ne pas voter pour moi !

03 mars 2008

Sans vain cœur ni vain cul (chapitre 23)


site de l'auteur du tableau    Sarah regarda le foulard qui lui évoqua la muleta que le torero agite devant le taureau pour l’attirer dans un piège en trompe l’oeil, et planter sur son dos une banderille traîtresse sous les vivats du public ravi. Bien qu’elle tînt encore le tissu écarlate en main, Sarah n’était pas dupe quant à la distribution des rôles. Elle savait bien qui serait le matador, qui serait le taureau, et surtout à qui on offrirait ma queue au dépend du cadavre de son amour propre.

Sans vain coeur ni vain cul - p. 99

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