Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

27 avril 2007

L'insoutenable légèreté de l'être (2)

medium_red_light.jpg

"D'un côté, il y a les maisons et, derrière les grandes fenêtres du rez-de-chaussée qui ressemblent à des vitrines de magasin, on aperçoit les minuscules chambrettes des putains. Elles sont en sous-vêtements, assises contre la vitre, dans de petits fauteuils agrémentés d'oreillers. Elles ont l'air de gros matous qui s'ennuient. L'autre côté de la rue est occupé par une gigantesque église gothique du XIVe siècle.

Entre le monde des putes et le monde de Dieu, comme un fleuve séparant deux royaumes s'étend une âcre odeur d'urine."

J'étais au beau milieu de "L'insoutenable légèreté de l'être" de Kundera et je n'ai donc pas résisté au plaisir de recopier ce passage du roman pour vous décrire la vieille église calviniste, vierge de toute sculpture, dont je sortais. Comme toute église gothique, elle abritait à l'origine une orgie de décorations fastueuses, dont de nombreuses représentations du Christ, des saints, voire même des ecclésiastiques à la droite de Dieu au jour du jugement dernier - les prêtres avaient su appliquer le vieil adage: on n'est jamais aussi bien servi que par soi même. Le calvinisme, fidèle aux injonctions bibliques interdisant toute représentation divine, avait extirpé tout ce décorum de l'église, de sorte qu'elle n'était plus qu'un bâtiment pour abriter les fidèles qui ne risquaient plus d'adorer des idoles de pierre comme des fétichistes africains animistes. Face à ce monument de morale austère s'alignait la luxure drapée de pourpre lupanar, et mes pas me conduisirent presque malgré moi vers les vitrines obscènes. Des femmes y exhibaient des charmes usés, comme les pieds d'une vierge idolâtrée par de fervents catholiques. Il y en avait de toutes les couleurs, de toutes les tailles, plus ou moins jeunes, plus ou moins blondes, toutes désabusées. Certaines hissaient un rictus sur leurs lèvres alors que je jetais sur elles des regards équivoques. Derrière tous les simagrées commerciaux qu'elles m'adressaient, derrière leur maquillage qui craquelait déjà, je voyais apparaître leurs défauts distinctifs, leurs manies particulières, leur humanité sordide.

- L'unicité du "moi" se cache justement dans ce que l'être humain a d'inimaginable.

C'est ce qu'écrit Kundera, mais moi, je n'avais rien à faire de leur humanité misérable. Je ne voulais pas être désagréanblement surpris. Si je venais à pousser une de ces portes, je savais que leur masque dégoulinerait comme du mascara même si je n'imaginais pas exactement comment viendrait la désillusion. Je n'éprouverais plus alors que du dégoût pour ce qui était censé être des parangons de féminité, et qui n'en était que la mascarade. La féminité, la vraie, était ailleurs. C'est pourtant dans cette rue que je me suis arrêté. Non, c'est dans cette rue que je suis tombé en arrêt comme d'autres tombent amoureux. Derrière la vitrine embuée, elles ne semblaient attendrent que moi. Était-ce leur troublante gémellité, était-ce le reflet des spots de la vitrine sur leur peau tabac, satinée, d'une incroyable finesse, toujours est-il qu'après tant de laideur, elles m'ont immédiatement sauté aux yeux. Alors je me suis arrêté là, scotché à la vitrine, à les contempler sans bouger. Quelle ligne ! Quel affolant  amalgame de galbes et de finesse, d'arrêtes émouvantes, de surplombs troublants !

- Depuis, elle sait que la beauté est un monde trahi. On ne peut la rencontrer que lorsque ses persécuteurs l'ont oubliée par erreur quelque part.

Oui, l'héroïne de Kundera avait raison, la beauté avait été oubliée là, et moi avec. Je les imaginais toutes les deux dans un autre contexte, avec des robes de soirée échancrées, des bas de soie délicats, dans l'intimité de ma chambre d'hôtel. Elles étaient si parfaites que tous les autres accessoires ne pourraient que les mettre en valeur. Et cette perfection là, ostensible jusqu'à l'ostentatoire, ne laissait rien au hasard. Je savais qu'elles seraient souples, maniables, malléables même, et que je pourrais en faire ce que bon me semblerait. C'était elles mon idéal féminin, elles deux identiquement parfaites, elles qui me permettaient d'envisager les plus folles combinaisons. Et plus je laissais vagabonder mon imagination, plus je sentais mon désir monter, irrépressible. J'imaginais déjà leur odeur, alors que je les disposerai sur le lit de ma chambre d'hôtel, leur douceur soyeuse sous mes doigts fiévreux, mon érection vibrante déjà. Je leur ouvrirai mon lit, je les glisserai l'une contre l'autre, je les regarderai dans toutes les positions, des plus naturelles aux plus perverses, dos à dos, face à face, sans dessus dessous, le talon de l'une dans la tige de l'autre. Je ne tiendrai pas bien longtemps, je ne résisterai au plaisir de sortir ma queue, ma verge rutilante d'excitation, de faire glisser mon gland sur elles, par-devant, par derrière. Et puis me déshabiller complètement, me rouler avec elles dans les draps parmi les robes et les bas, et finir par les prendre tour à tour, m'immiscer à l'intérieur de chacune d'entre elles, et jouir, jouir, jusqu'à les remplir de foutre toutes les deux. D'habitude, une seule me suffit, mais là, je savais qu'il me faudrait la paire. J'ai poussé la porte de la boutique et je suis entré.

- Et pour monsieur, qu'est-ce que ce sera ?
- Cette paire d'escarpins en vitrine s'il vous plait. En 36, je les préfère étroites.

15 avril 2007

La cigarette du condamné

Aujourd'hui, ma note est impudique.
Alors elle paraît chez Cali Rise !

13 avril 2007

In Clito Veritas (2)

La courtisane contacta en grand secret cinq de ses intimes. Elle les choisit pour leur rouerie, bien sûr, mais surtout pour leur silhouette proche de la sienne, élancée et gracile. Elle leur apprit le jeu, leur donna le secret de ses parfums et crèmes, pour que toutes fussent enveloppées du même nuage odorant. Toutes s'épilèrent de la même manière. Perfectionniste, la courtisane organisa des soirées où ses amies purent voir sa façon de bouger, d'onduler sur les corps masculins. Amusées, elles copièrent ses mouvements de hanches, ses indéfinissables langueurs, ses abandons et ses reprises. En quelques jours d'essais assidus, la coquine cohorte connaissait tous les vices et artifices de la taquine maîtresse.

La petite courtisane n'avait pas eu une vie facile, luttant de ses seuls charmes pour être partout la première. Très vite, elle avait compris le pouvoir du sexe sur la gent masculine, appris les secrets de la séduction. Elle avait conquis les plus grands, mis à ses pieds les plus riches, au prix de parjures et de trahisons qui ne lui importaient pas. Elle ne connaissait ni l'amour, ni le remords. L'œnologue fut une proie en vogue pour ses compagnes, elle décida donc de l'avoir. Par jeu, par provocation, par fierté.

Elle l'eut donc, avant de comprendre que la réciproque était vraie, pour la première fois. Il refusait de lui donner son nom. Et elle dissimula sous une apparente indifférence ce qui n'était que sa première douleur de femme amoureuse. Elle organisa donc ce jeu, mettant au défi son talent, pour enfin, espérer être à lui sous le prétexte avouable d'un accomplissement social qui soudain lui semblait vain. Sa moue à lui devant sa proposition montra qu'il fut dupe, il la crut vénale, et ce regard glacé manqua la faire tituber de douleur. Ils ne s'étaient jamais avoués leur amour, par fierté, par peur de n'être chéris en retour.

Le cœur du château de Castignac n'est pas la majestueuse salle de réception, ornée des armoiries séculaires, ni les cuisines médiévales, ni les multiples chambres dont les noms évoquent tout l'arc en ciel. Non, le cœur du château, ce sont ses fondations, les antiques caves voûtées, le repère de monsieur l'œnologue, le centre de son monde. Et ce soir, sur l'imposante table en chêne massif qui accueille la dégustation des meilleurs crûs, ce ne sont pas de précieux millésimes qui sont alignés, mais monsieur l'œnologue lui-même qui est enchaîné, allongé, les yeux bandés, attendant patiemment le début de la dégustation.

Enfin, projetée par les torches suspendues, une ombre s'avance, dansante, tremblante, déformée jusqu'à être grotesque, mais néanmoins émouvante, plus précise lorsque celle qui en est la cause se glisse sur la table, écarte les cuisses pour enjamber le visage du dégustateur, silencieusement. Monsieur l'œnologue perçoit la douce chaleur de l'intimité offerte, un parfum artificiel masquant le bouquet intime, ténu, imperceptible au commun des mortels, mais qui se révélera au cours de la dégustation.

Méthodiquement, de la pointe de la langue, son seul organe libre de mouvement, il parcourt le pourtour des lèvres offertes, du périnée au clitoris, pour jauger la forme et la taille de ce calice. Fin, allongé, apparemment étroit, celui ci lui évoque immédiatement une flûte à champagne. A ce subtil contact la belle émoustillée libère tous ses arômes, légèrement fruités bien qu'encore fermés, qu'il hume, alternant les inhalations courtes, puis profondes, en douceur puis insistantes, alliant bientôt la langue au nez pour libérer la divine liqueur, s'apprêtant à la tirer du cœur de l'intimité offerte. Mais c'est elle qui vient à lui, abondante, satinée voire festive, dans un orgasme explosif qui retentit en un rire cristallin. Il s'en délecte. S'impose alors à lui le portrait d'une jeune fille, blonde, fine, exubérante jusqu'à l'effervescence, et qu'il se plait à imaginer champenoise. Assurément, ce n'est pas elle.

Ainsi continue cette étrange dégustation, de filles en femmes, d'extases en ivresses, Sud- Africaine callipyge et charnue, Savoyarde lippue et longue en bouche, Australienne ouverte et souple, Alsacienne fraîche et capiteuse, imperturbable défilé dont monsieur l'œnologue sort excité mais épuisé, au bord de la rupture mais frustré, surtout de ne pas avoir encore reconnu sa belle parmi celles qu'il a dégusté. Il en reste une, ce ne peut être qu'elle.

Au rythme de ses pas élégants et racés, à peine s'est-elle approchée qu'il l'a reconnu. A ses arômes complexes aux notes exotiques d'épices et d'herbes, à peine s'est-elle installée qu'il en est sûr. Il ne la dégustera pas. Non. Il savourera sa volupté sensuelle et décadente, jusqu'à la jouissance, les larmes aux yeux. Il doit maintenant donner son choix puisque l'heure du verdict a sonné...

Elle avait regardé ses compagnes chevaucher son amant, offrir leurs croupes affriolantes, le cœur battant. Au fond d'elle-même, elle souhaitait tellement qu'il la reconnût, qu'elle fût unique à son âme. Elle s'était approchée, tremblante, avait senti ses caresses adorées, eut envie de cesser ce jeu idiot pour le serrer contre son cœur. Mais déjà, il avait fallut partir, écouter le verdict.

"La première" dit-il d'une voix étranglée.

La douleur qui la transperça dépassa la joie d'être enfin l'épouse. Les larmes coulèrent, brûlantes, et toutes ses complices furent bouleversées de son émotion de jeune mariée. L'œnologue, lui, avait quitté la salle.

________________________________________


J'ai écrit ce texte en 2001 avec Carole. Je ne peux songer à elle sans émotion, pensez-donc, une de mes premières amantes et sans doute ma première liaison. Chacun d'entre-nous avait écrit quelques paragraphes de cette courte nouvelle. Ces paragraphes apparaissent avec une couleur de fond différente selon son auteur. Saurez-vous retrouver qui a écrit quoi ?

11 avril 2007

In Clito Veritas (1)

Debout dans cette pièce au charme tamisé, les yeux bandés, l'homme se tait. Il se concentre sur la délicate mission qui s'offre à lui. Des trois somptueuses beautés qu'on va lui présenter, trois amours parmi tant d'autres, saura-t-il retrouver pour chacune, son nom ? Saura-t-il se remémorer dans quelles conditions il les a connues ? Comment elles ont, de leur charme insolent ou discret, su conquérir ses sens? Certaines sont encore brûlantes à son esprit, d'autres plus floues, toutes l'ont ému. Et aujourd'hui, aujourd'hui, il va revivre ses passions.

D'une voix neutre, le Juge lui ordonne de s'approcher du premier calice. Timidement, il s'approche d'elle, les lèvres tendues, la narine aux aguets. Il manque défaillir... ce parfum, cette volupté ! Il ne connaît qu'elle. Il est avide maintenant, boit son nectar, se délecte de cette divine liqueur, essence de l'amour... Il sait qui elle est, et il revoit l'ivresse délicieuse de l'instant passé auprès d'elle. Tremblant, il prononce son nom du bout des lèvres, et le Juge ne peut que sourire devant son talent. "Qu'on amène la seconde !"

L'homme, bouleversé encore des effluves de son premier émoi, titube vers la deuxième épreuve. Et là encore, la magie opère. En lui aussitôt, il se remémore la divine robe veloutée de ce soir de juillet, son émotion à peine contenue de toute la soirée, jusqu'à, enfin, tout savoir d'elle, qui elle était, ce qu'elle faisait en ces lieux, tellement médiocres pour elle. Là encore, son nom sort dans un souffle, épris d'amour éperdu. Le Juge jette un regard aux autres membres de ce curieux jury, on y lit de l'admiration. L'homme voudrait rester encore auprès de sa conquête retrouvée, lui crier son bonheur, mais il lui faut déjà découvrir la troisième identité.

Encore une fois, à tâtons, il goûte à même ce temple du plaisir, s'adonne à l'ivresse de la volupté. Et là encore, c'est le déclic. Comment le Jury a-t-il pu réunir les trois grâces qui ont bouleversé sa vie ? L'Homme manque défaillir, s'approche encore de la belle, laisse glisser sur sa langue les saveurs adorées, brûle de la posséder... Il n'en peut plus, la jouissance est trop forte.

"Château Petrus, 1985" murmure enfin l'œnologue, dans un souffle.

Monsieur l'œnologue n'avait pas atteint sa renommée pour son un profil d'oiseau de proie, mais pour les qualités concentrées entre son menton fuyant et son nez crochu, une bouche aux lèvres pleines dessinant en permanence un sourire carnassier. Bien sûr, ce n'était point l'apparence de cette bouche qui était remarquable mais bien ce qu'elle renfermait, un palais exceptionnel capable de disséquer les saveurs les plus subtiles, servie par une langue acerbe toujours prête à empaler ses ennemis au pilori de ses bons mots.

Pourtant, ce que les hommes ignoraient, et que bien des femmes savaient, était le miel que cette bouche savait distiller à la gent féminine, sa promptitude à embrasser et embraser les sens, sa capacité à faire naître le plaisir même dans les cas les plus désespérés. Ainsi, les mauvaises langues de la bourgeoisie provinciale se complaisaient en gorges chaudes, expliquant à mots à peine couverts comment sa langue agile avait su convaincre la veuve de Castignac de le coucher dans son lit et son testament, ce qui lui avait permis de devenir propriétaire d'un des plus beaux châteaux bordelais à la mort de la vieille dame dont, dit-on, le cœur n'aurait pas survécu à la chamade qu'il devait battre chaque nuit.

Monsieur l'œnologue, ainsi veuf, n'avait pourtant pas souhaité unir son cœur à celui d'une des jeunes filles de bonnes familles, dont les mains tendues étaient prêtes à panser sa plaie supposée, et saisir sa fortune nouvelle. Non, il préféra unir son corps à ceux des courtisanes qui voletaient sans répit autour de lui. Et parmi elles, il finit par en préférer une. Non pas qu'elle fût particulièrement belle, mais elle avait ce charme inimitable et cet esprit de libertinage qui lui plaisait tant, lorsque, en sa demeure seigneuriale, il organisait ces mystérieuses fêtes galantes.

Un jour, ou plutôt une nuit, alors qu'il psalmodiait à l'oreille de sa belle une improbable litanie d'amour, elle lui lança un défi. Un défi à sa qualité et son organe le plus remarquable, un défi à l'amour du corps qu'il encensait sans cesse, puisqu'il n'était point question de cœur. Serait-il seulement capable de la reconnaître, elle, avec pour seuls sens ceux qui lui avaient apporté fortune et célébrité, la reconnaître parmi une demi-douzaine d'autres avec sa seule bouche. S'il y parvenait, elle serait son esclave. Sinon elle deviendrait sa femme.

A suivre...

09 avril 2007

Déclaration de guerre

Attention. Ce texte décrit une scène particulièrement violente et cette note risque de heurter votre sensibilité.

sur Evene...« Tout commence par une déclaration de guerre : Je t’aime – et le reste en découle comme par une loi de chute des anges. Je t’aime. Tu es ce qui éveille en moi le sentiment d’amour, puisque tu peux l’éveiller c’est que tu peux le combler, puisque tu peux le combler c’est que tu dois le combler, tu es le complément en moi du verbe aimer, le complément d’objet direct de moi, j’aime qui, j’aime toi, tu es le complément de tout, le masque d’or du père ou de la mère, l’ombre nourricière penchée sur moi petit, tout petit qui crie sa faim, hurle sa misère, son droit sur terre, son droit souverain sur l’univers et donc sur toi, d’abord sur toi. »

Il lut ces mots d’une main tremblante. Ils n’étaient certes pas d'elle mais de Christian Bobin, un auteur qu’elle avait dû trouver à sa hauteur, lui qui l'impressionnait tant. Alors elle les lui avait recopiés sur un papier quadrillé, d’une calligraphie ronde et incertaine qui en ajoutait encore à l’émotion du texte, et qui faisait que ces mots là, c’était un peu les siens. Après tout, ne les avait-elle pas choisis avec amour - même s’il aurait sans doute préféré une déclaration moins fusionnelle ? Et puis elle lui donnait rendez-vous, une fois de plus, derrière l’église d'un village voisin, le soir même, à neuf heures. Il plia la feuille de papier, la porta à son nez, crut sentir le parfum de la belle malgré l’odeur âcre de l’eau de javel qui baignait l'hôpital. Il glissa ce mot sous sa blouse, entre sa peau noire et le coton blanc, juste là, dans l’espace ténu des désirs illicites. Il imagina que ce soir elle se donnerait à lui. Ils devraient se cacher. Il dut chasser à regret cette idée pour se concentrer sur le prochain patient.

Elle porta une petite robe de fête pour se rendre au rendez-vous, heureuse et la peur au ventre. Elle descendit les rues du village, s’efforçant d’ignorer les rideaux qu’on entrebâillait sur son passage, juste assez pour laisser passer des regards angoissés ou visqueux de haine, abîmes de vies désespérées. Elle redressa pourtant la tête, moins par fierté que pour se concentrer sur l’horizon, sur le soleil couchant qui enflammait sa Provence natale de rouge et de noir. Pour ne penser qu’à lui. Il faisait presque nuit lorsqu’elle arriva au lieu du rendez-vous. Ils n’auraient pas beaucoup de temps.

D’abord, elle ne le trouva pas. Et puis elle entendit du bruit, son nom murmuré, « Marie… Marie… » il s’était caché dans les fourrés. Elle s’y glissa en frissonnant, et il l’accueillit dans ses bras grands ouverts. Dans la pénombre, elle ne distinguait pas ses traits, elle n’entendait que sa voix, chaude et grave, sa voix si mâle et si aimante, sa voix qui l’envoûtait, et qui lui dit :

« Celle qu’on aime, on la voit s’avancer toute nue. Elle est dans une robe claire, semblable à celles qui fleurissaient autrefois le dimanche sous le porche des églises, sur le parquet des bals. Et pourtant elle est nue – comme une étoile au point du jour. À vous voir, une clairière s’ouvrait dans mes yeux. À voir cette robe blanche, toute blanche comme du ciel bleu.

Avec le regard simple, revient la force pure. »

Elle reconnut immédiatement le texte qui était sur la couverture de son livre de chevet, une petite robe de fête. Elle le lui avait prêté, non sans fierté. Pour elle, pour une petite caissière sans avenir, il les avait appris par cœur, lui, le médecin étranger. Il lui rendait un peu de sa culture - sa culture à elle, elle qui n'en avait jamais eue - qu’il embrassait malgré tout, malgré toutes les différences. Elle sentit les larmes couler sur ses joues pales. Il ne pouvait pas les voir, mais il en goutta la saveur salée lorsqu’il posa ses lèvres sur sa peau. Alors elle oublia tout. Elle s’abandonna à la chaleur de ses baisers, à la force de son étreinte, à la brûlure de ce corps chaud qui l’embrasait, elle oublia le danger et même le couvre feu. Comme pour être plus près de lui, elle ferma les yeux, pour mieux rejoindre son âme, l’essence de son odeur vanillée, avant de caresser sa peau nue pour la première fois. Leur peau que tout séparait.

Elle fit courir ses doigts blancs sur les épaules musclées de son amant, et puis sur sa nuque, et dans ses cheveux crépus, guidant son souffle ardent vers une gorge offerte. Son visage ouvrit la robe blanche comme un brise-glace déchire la banquise, dans le fracas des passions libérées et du mot d'amour froissé. Ses mains puissantes étreignirent ses seins alors qu’elle ouvrait les cuisses aux lèvres affamées, pour qu’elles la dévorent. La petite culotte arrachée, il embrassa éperdument la vulve offerte, se rassasia de la liqueur que son calice lui offrait, célébrant ainsi la messe de leur amour interdit. Elle ne parvint plus à étouffer ses râles de plaisir, et elle s’en mord encore les lèvres.

A peine savourait-elle sa jouissance qu’un rire gras la fit sursauter. On lui arracha son aimé. Lorsqu’elle sortit des fourrés, la gifle qui l’accueillit fût si forte qu’elle en tomba par terre. Lorsqu’elle leva les yeux sur son amour, il était écartelé par deux miliciens, alors qu’un troisième s’acharnait sur lui à coups de batte de base ball. Son visage n’était plus qu’une plaie. « Regardez-moi cette putain à négros, elle a même pas de culotte ! » Elle n’entendait pas les insultes, seulement les coups qui pleuvaient sur lui. Ils s’arrêtèrent un instant pour reprendre leur souffle et s’occuper d’elle. Ils la traînèrent aux pieds de son aimé et ils baissèrent son pantalon. « Montre-nous comment tu suces les blackos, salope ! » Ils la forcèrent à le prendre dans sa bouche. Il était presque évanoui. « Alors le bamboula, tu bandes mou ? » Ils éclatèrent de rire et ponctuèrent leur plaisanterie d’un mauvais coup de masse. Elle entendit un craquement sinistre. Elle en hurla. « Pleure pas ma jolie, nous on en a une bien dure ». Elle perdit connaissance lorsqu’ils lui enfoncèrent dans le ventre la batte de base-ball ensanglantée.

Lorsqu’elle revint à elle, elle était toute seule derrière l’église. Elle ramassa ses affaires. Sa petite robe de fête était déchirée, maculée de sang et de haine. Elle savait qu’elle ne le reverrait plus jamais, alors, lorsqu’elle retrouva par terre la feuille de papier quadrillée, elle crut y sentir l'odeur de son amant malgré l’odeur âcre du sang qui la tachait. Elle glissa le papier sur sa peau nue, tout contre son cœur. Certains racontent qu’il y est encore.

Cela s’est passé en Provence, en 2010. Ce ne fut jamais relaté par la presse de l’époque. Il faut dire qu’il y avait trois ans qu'un fascisme inavoué avait subtilisé la démocratie. On était en pleine guerre civile implicitement déclarée. Tout commence par une déclaration de guerre : Je t’aime.

30 mars 2007

La rédaction

Cet été, je suis partie à la mer avec papa, maman et mon petit frère.

 C'était rigolo. Tous les gens étaient tout nus sur la plage. Je jouais dans les vagues avec mon bateau. Ça c'était trop bien.

Mon petit frère faisait des châteaux de sable avec les autres garçons. Ils n'étaient pas très gentils. Ils ont même dit des gros mots, mais des très gros qu'on n'a pas le droit de répéter.

Je devais jouer avec eux quand même parce que leurs parents partaient souvent se promener dans les dunes. Alors là les garçons disaient plein de bêtises.

Un soir je les ai même gardés toute seule parce que j'étais la plus grande. C'était des petits de CE1 ou de maternelle. Au début c'était rigolo parce que les adultes s'étaient un peu déguisé. L'amie de maman avait même mis un collier de chien. C'était quand même bizarre.

On a mangé une grosse pizza pendant qu'ils regardaient des photos de gens qui se baisaient partout. Après on a regardé un DVD de Cendrillon. Quand maman, papa et leurs amis sont partis danser, alors là, les garçons ont vraiment fait de grosses bêtises. D'abord ils ont arrêté le dessin animé pour mettre un film porno. C'était un peu dégoûtant. Des dames suçaient le zizi d'un monsieur en criant et il en sortait du lait blanc.

Alors les garçons se sont mis tout nu pour faire la même chose avec leurs petites sœurs jumelles. Je leur ai dit que c'était interdit, et qu'ils allaient se faire disputer par leur maman mais ils m'ont répondu des gros mots. Un des garçons a même pris l'appareil photo de son papa pour prendre en photo sa petite sœur qui suçait le zizi de mon petit frère. Alors là je lui ai dit qu'il n'avait pas le droit de prendre les affaires d'un adulte sans demander la permission. J'ai téléphoné à maman qui m'avait dit de l'appeler si ça n'allait pas, mais c'était le répondeur.

Quand maman est rentrée, elle a pleuré mais elle ne m'a pas disputée.  

 

Amandine, 9 ans, CM1

___________________________

Cette fiction est librement inspirée d'une histoire malheureusement vraie: l'été dernier, alors qu'ils prenaient l'apéritif chez d'autres libertins, des parents en vacances au Cap D'Agde ont trouvé tous les enfants en train de simuler une partouze dans une chambre. Les plus jeunes n'avaient pas 6 ans.

19 mars 2007

Quand j'étais un fake (2)

Moi si j'étais un homme
Je serais capitaine
D'un grand bateau, vert et blanc...

Ce matin, face à mon miroir, cette vieille chanson trotte dans ma tête. Ce matin, face à mon miroir, comme tous les matins, je me maquille. Ce matin, comme tous les matins, j'ai passé plus d'une heure devant ce miroir. Je suis presque prête maintenant. Il ne me reste plus qu'à apporter la touche finale à mon maquillage: un rouge à lèvre vermillon de chez Loréal. Une couche épaisse et onctueuse, que j'étale lentement sur mes lèvres pulpeuses en prenant garde de ne pas déborder. C'est primordial. Ma bouche, c'est mon plus bel atoût de femme. Surtout lorsque mes lèvres sont entrouvertes, comme en attente d'un baiser. C'est fini. Devant le dernier miroir sur le pas de ma porte, je prends le temps de vérifier mes charmes féminins, incrédule devant ma beauté comme un papillon qui déploie ses ailes au premier petit matin. Mon soutien gorge accentue le galbe de mes seins qui pointent sous mon chemisier blanc, dont le décolleté laisse entrevoir un peu de dentelle ivoire. Ma jupe courte souligne la longueur de mes jambes bronzées, fuselées dans mes bas satinés. Mes escarpins à talons hauts accentuent ma cambrure et la rondeur de mes fesses musclées. Mes longs cils noirs papillonnent dans la moue irrésistible que je m'offre avant de refermer la porte de ma chambre de bonne au dernier étage d'un immeuble haussmanien, et j'abandonne ma chrysalide pour dévaler les escaliers et profiter des premiers rayons de soleil de la journée.


 
Il faut dire que les choses ont changé,
De nos jours, c'est chacun pour soi...


 
Le fond de l'air est frais en ce petit matin d'août et Diane Tell chante toujours dans ma tête. J'allonge le pas. Mes talons qui claquent sur le macadam égrainent les secondes qui me séparent de lui. Je traverse la rue de Provence en diagonal, d'une démarche chaloupée digne d'un défilé de Jean-Paul Gautier. Les piétons se retournent sur mon passage. Les yeux rivés sur mes cuisses, un employé de la voirie n'a pas pu se retenir de siffler, et en l'entendant le conducteur du camion benne a abandonné le pauvre gars en pensant que c'était le signal. Je jette à son dépit un sourire narquois, fière de mes effets, sûre de mon charme. Devant une vitrine, je ralentis le pas. Mon regard balaye les articles que je ne vois pas, irrésistiblement attirée par mon reflet, par la cascade de mes cheveux blonds qui coule sur mes épaules et vole au vent. A votre avis, suis-je une femme fatale ?


 
Et pourtant, moi j'aurais bien aimé
Un peu plus d'amour et de tendresse.
Si les hommes, n'étaient pas si pressés, 
De prendre maîtresse...

 

Je pousse les portes du grand magasin. Je fais partie des premières clientes. Dans les rayons, quelques vendeuses s'activent comme des abeilles dans une ruche. Je déambule un moment au rayon des parfums et cosmétiques. Dans leurs petits stands, de jolies filles bien mises et bien maquillées attendent les clientes. Je les envie. J'aimerais travailler là où je passe mes jours de congés, et faire un métier qui me ressemble vraiment. Mais faut pas rêver, ce n'est pas pour moi. Pas encore. Je prends l'escalator pour monter à l'étage supérieur. Derrière moi, un vigile, un grand black, regarde sous ma jupe l'air de rien. Je la rabats sur mes cuisses en souriant. Il n'est pas mon genre mais sous le regard des hommes, je me sens femme, et j'aime ça. Me voici arrivée au rayon de la lingerie fine. Enfin. Je regarde avec envie toutes ces dentelles, si fines, si féminines, en particulier ce petit bustier que j'essaierais bien. Mes yeux dérivent irrésistiblement, presque malgré moi, vers le rayon des cravates de l'autre côté de l'allée. Le vendeur est là. Elancé, costume chic déstructuré, les mains parfaitement manucurées, le visage halé et rasé de près, encadré d'une crinière de cheveux noirs et bouclés qui soulignent son charme méditerranéen, et où brille un regard ténébreux qui me fixe comme un papillon sur une planche.


 
Mais je suis femme et quand on est femme,
Ces choses là ne se font pas...
 

Ses yeux noirs me déshabillent et me brûlent. Entre mes cuisses, je sens mon sexe se gorger de désir. Je minaude un instant, qu'il ne croie pas que je suis venu exprès pour lui, mais inutile de penser à résister à mes pulsions. J'embarque le bustier chiffonné entre mes mains moites et je me dirige vers les cabines d'essayage en roulant des fesses comme une femelle en chaleur, son regard planté dans mes reins. Arrivée dans la cabine, je suspends le bustier au crochet, et je l'attends. Il va venir, je le sens, il va venir, comme à chaque fois. Soudain, il tire le rideau et il s'engouffre dans la cabine. Il me plaque violemment le dos contre la paroi en collant ses lèvres cruelles aux miennes. Sa langue me fouille et je fonds. Ses mains glissent sous ma jupe et empoignent mes fesses pour les malaxer. Mes ongles carmins s'enfoncent dans ses cheveux bouclés, l'attirent à moi, plus bas, entre mes seins siliconés, et encore plus bas. Il a compris. Il s'agenouille, arrache mon string, empoigne ma queue, et il me fait une fellation phénoménale.


 
Moi si j'étais un homme,
je me ferais femme par amour des hommes.

Tessa

medium_tessa.jpg


 

11 mars 2007

Des mots valises

Amandine était une Silphydèle abandonnée par un sentimenteur. En pleine crevaisonge elle alla jusqu'à clavarder avec l'abominable Vagant - cas avéré d'incartadiction - qui lui fit gémiroiter un apéritif gourgandinatoire aux chandelles. Chiche ! dit la jeune antisceptique, et elle décrocha ses porte-jarretelles. Mais n'est pas libidineuve qui veut ! À peine était-elle arrivée sur les lieux du crime, que ce fût la stupréfaction: Amandine était tombée aux mains d'un aristocrabe au beau milieu de cascadeptes festondus. Après moults turlupitudes, Amandine jura, mais un peu tard, qu'on ne la prendrait plus.

medium_murmures.jpg

Vous n'avez rien compris ? Rassurez-vous ami lecteur, il ne vous manque que l'incontournable dictionnaire des mots valises de Pénélope Timiste. A user et abuser sans modération...

25 février 2007

Le gage (2)

Lorsque notre voiture est arrivée au niveau du jeune motard, il s'était déjà avancé entre les voitures, sûr de son fait. Habitué des lieux, il avait sans doute croisé le regard de Sylvie, et y avait lu du désir. J'ai baissé la vitre. Le regard du jeune homme a papillonné sur le visage de Sylvie avant de se poser sur son échancrure.

- Bonsoir, j'ai de la chance ce soir, mademoiselle est vraiment jolie. Je peux vous aider ?
- Bonsoir. On cherche juste une petite exhibition aux abords du bois. Rien de plus. Ca t'intéresse ?
- Oui! Bien sûr! Je vous suis en moto ?
- Ca marche, mais on va voir un autre homme d'abord.

J'ai redémarré pour avancer vers l'homme aux lunettes rondes. Il nous avait probablement vu discuter avec le jeune motard qui nous suivait déjà, et il a semblé à la fois surpris et heureux de voir le grand sourire de Sylvie lorsque notre voiture s'est arrêtée à son niveau.

- Bonsoir, nous a-t-il dit timidement.
- Bonsoir, vous venez souvent dans cette rue ?
- Heu... c'est à dire que... non... c'est la première fois.
- Et ça vous dirait de nous regarder faire l'amour dans la voiture ?
- Heu... oui!
- On va dans le bois. Vous nous suivez ?
- D'accord... Je prends ma voiture. Je suis garé juste là.

Sylvie l'a regardé monter dans sa voiture, en riant de sa timidité, et elle s'est tournée vers moi pour me faire un langoureux baiser. Sa langue a glissé entre mes lèvres, a enlacé ma langue, a fouillé ma bouche passionnément, puis, lentement, ses lèvres se sont détachées des miennes, et elle a plongé dans mes yeux un regard malicieux.

medium_phares.jpg- Ils te plaisent ?
- Oui.
- Tu as envie d'eux ?
- Non, j'ai envie de toi !
- Ca te plait qu'ils nous regardent ?
- Oui, ça me plait.
- Et qu'ils se branlent ?
- Ça, ça m'excite !
- Tu as envie qu'ils te touchent ?
- Je ne sais pas.
- Et de les toucher ?
- Peut-être.
- Et tu veux que je te prenne comment ?
- Fort ! On y va ?

Ces derniers mots m'ont fait bander plus que tout. Sylvie n'était plus la jeune femme craintive qui suit son amant dans ses fantasmes, mais une maîtresse volontaire, prête à assumer la position souveraine de reine de la fête, et peut être même prendre les choses en main.

Nous sommes enfoncés dans le bois ténébreux, où nous avons trouvé une rue calme un peu à l'écart du ballet des voitures autours des travestis qui officiaient à une centaine de mètres de là. A peine avais-je coupé le moteur, que les lèvres de Sylvie se sont posées sur les miennes, comme si, intimidée par la situation, elle voulait se réfugier dans l'action. Nos deux voyeurs étaient à la portière, du côté de Sylvie. Ma main gauche a glissé entre ses cuisses, elle a frôlé ses bas jusqu'à la frontière de la dentelle sur sa peau nue, et elle a remonté sa jupe pour livrer ses cuisses à leurs regards égrillards.

"Il fait chaud, tu ne trouves pas ?" ai-je dit dans un murmure. Sylvie ne m'a pas répondu. Sa bouche avide a glissé le long de mon torse, en direction de mon sexe dur qu'elle a malaxé à travers mon jean. Enfin, elle a fait glisser ma braguette et ma verge raide de désir en est sortie comme un diable de sa boite. Sylvie a lâché un soupir de contentement en prenant mon sexe entre ses doigts, à moins que ce soit le courant d'air frais provenant de la vitre que je venais d'entrouvrir de son côté. Presque rien. Un ou deux centimètres seulement, vers lesquels ses reins se cambraient, comme pour rencontrer le souffle chaud des deux hommes qui se pressaient au carreau. Sylvie m'a pris dans sa bouche et ma main a continué de remonter entre ses cuisses, jusqu'à sa chatte épilée. Elle ne portait pas de culotte ce soir là. J'ai posé ma main droite sur sa tête qui montait et descendait au rythme de la magistrale fellation qu'elle m'administrait. Mes doigts ont caressé ses cheveux, sa nuque, son dos jusqu'à ses reins cambrés, et ont saisi le tissu de sa courte jupe. J'ai tiré dessus très lentement. Peu à peu, j'ai retroussé sa jupe, j'ai livré son sexe lisse à leur regard lubrique. J'ai continué, jusqu'au bout, jusqu'à ce qu'ils voient bien son petit trou, et de deux doigts, j'ai écarté sa vulve pour leur exhiber son clitoris, avant de le masturber doucement.

Malgré la fenêtre entrouverte, nous avions de plus en plus chaud. Avec notre respiration haletante, de la buée s'était formée sur les vitres et nos deux voyeurs devaient nous regarder à travers la petite ouverture de la fenêtre pour voir quelque chose. J'ai décidé de changer de position et je me suis mis à genoux sur le siège, ce qui a obligé Sylvie à se reculer jusqu'à coller ses fesses nues à la vitre. Ah! Se sont écriés les deux hommes qui ont vu d'un seul coup un cul somptueux plaqué contre le carreau. Sylvie a relâché mon sexe un moment pour regarder derrière elle, et elle n'a pas pu se retenir de rire en voyant le motard caresser, et même lécher la vitre qui les séparait du paradis sensuel qu'elle exhibait. Coquine, elle s'est cambrée au maximum pour plaquer sa vulve toute mouillée contre la vitre. Elle a laissé sur le carreau une traînée baveuse comme celle d'un escargot. Le jeune homme à sortit sa queue et l'a plaquée de l'autre côté de la vitre. Il a suivi la traînée à la trace de la pointe du gland.

D'un seul coup, Sylvie s'est retournée pour leur faire face. De mes mains tremblantes d'émotion, j'ai commencé à malaxer ses seins déshabillés de dentelle dans son soutien gorge pigeonnant. "Prends-moi !" M'a-t-elle alors ordonné, assez fort pour que les deux hommes l'entendent. J'ai lentement glissé mon sexe dans sa chatte brûlante. Le plus jeune des deux tenait sa queue à la main, raide comme un cierge de pâque. Il se masturbait, la pointe de son gland tout contre la vitre, là où Sylvie avait laissé le plus de traces de mouille. L'autre, le timide à lunettes, était plus en retrait. Il regardait la scène en souriant. Dans son pantalon déformé, on devinait un sexe monumental. Sylvie était déchaînée. Elle a d'abord fait glisser la pointe de sa langue sur sa lèvre supérieure. C'est d'une sensualité affolante, et elle le sait. Et puis, en plantant bien son regard dans les yeux du jeune homme, elle a approché sa bouche entrouverte de la vitre, à quelques millimètres de sa queue de l'autre côté, et elle s'est mise à lécher les traces de sa propre mouille sur le carreau. Ça nous a tellement excités que le résultat ne s'est pas fait attendre: Il a éjaculé sur la vitre de longs jets de sperme gluant, au moment même où j'ai joui en elle. "Oh Oui!" a-t-elle crié dans la voiture, elle aussi surprise par l'orgasme. Pendant que mon sexe encore dur allait et venait entre ses reins moelleux, le jeune homme a barbouillé la vitre comme s'il étalait son sperme sur le visage ravagé de plaisir de la belle Sylvie. Ravi, il est parti pendant que nous essayions de reprendre nos souffles dans la voiture surchauffée.

- Ouvre s'il te plait, m'a-t-elle demandé doucement
- De quel côté ?
- Celui-là !

      
Sylvie m'avait désigné la vitre barbouillée de sperme à travers laquelle on ne distinguait plus grand chose, sinon la présence trouble de l'homme timide en costume. J'ai descendu la vitre complètement. Notre voyeur ne disait rien, il nous regardait en souriant, sans oser s'approcher. Son pantalon était si déformé qu'il semblait avoir des balles de tennis dans sa poche. J'ai senti Sylvie à la fois curieuse, et rassurée par sa timidité. Approche, lui ai-je dit gentiment. Il a obéi sans rien dire. Ses hanches ont bientôt été au niveau de la vitre ouverte. Sylvie n'avait qu'à tendre la main pour le toucher. Elle voulait voir. Elle en avait envie. Elle hésitait. Ma main s'est égaré sur son sein, l'a extrait de son écrin de dentelle, et l'a pris dans ma main. J'ai fait rouler son téton entre le pouce et l'index. Elle a tressailli. Lui aussi. "Montre !" A-t-elle alors dit d'une petite voix mal assurée. L'homme timide a rougit, puis d'une main tremblante d'excitation, il a ouvert la ceinture de son pantalon. Il a écarté les cuisses pour que son pantalon ne tombe pas dans le caniveau. Il a défait le bouton, et il a fait glisser la fermeture éclair. Le pantalon est resté en place. Il était suspendu à la bosse qui le déformait. Et puis il est enfin tombé.

Sylvie avait beau s'y attendre, elle n'a pas pu retenir un cri de surprise. Sous ses yeux écarquillés se dressait un membre monstrueux. Long comme un pied, large, épais, au gland pourpre rutilant. A sa base pendait une paire de couilles chevalines.

- Je suis trop gros, a-t-il balbutié, je fais peur aux femmes, mais ce soir, j'ai vraiment trop envie... de... de...
- De jouir ? a répondu Sylvie émue par cet aveu.

Alors, comme dans un rêve, elle a approché sa main tremblante de l'énorme phallus. Elle l'a frôlé doucement. Impossible d'en faire le tour d'une seule main. Sa peau était douce, comme celle d'un petit chat tout chaud qu'elle caresserait doucement. Voir Sylvie toucher cet homme m'a follement excité. Toujours derrière elle, mon sexe avait repris sa vigueur. J'ai approché ma main de sa chatte. Elle gouttait sur mes doigts. C'était un mélange de mon sperme et de sa mouille qui coulait, qui ruisselait, qui inondait ma main et ma queue juste en dessous. Mes doigts ont glissé dans son sexe. Un, et puis deux, et enfin trois qui l'ont pénétré doucement, qui ont massé tendrement son vagin incandescent. Le bout de mes doigts s'est attardé sur son point G, cette petite zone parcheminée au coeur de son plaisir. J'y ai appliqué un massage circulaire qui l'a fait gémir. J'ai senti qu'elle n'était pas loin de la jouissance, à son petit trou qui palpitait tout contre mon gland lubrifié par sa mouille. Sylvie avait cessé de caresser timidement le sexe phénoménal dressé devant elle. Elle le branlait furieusement, à deux mains pour pouvoir en faire le tour. Elle a frotté le gland turgescent sur ses seins à moitié sortis de son soutien gorge. L'homme timide a avancé une main timorée. Il a touché la peau de Sylvie, à l'épaule frissonnante. Ses doigts la frôlaient à peine. Ils sont descendus imperceptiblement, plus bas. Les halètements de Sylvie emplissaient tout l'espace de la voiture. Tout n'était plus que plaisir, imminence de jouissance. Au moment où ses doigts ont atteint son tétin tumescent, d'un coup de rein, elle s'est empalée sur ma queue. Elle s'est enfoncée mon dard dans l'anus alors que me doigts se crispaient dans sa chatte. L'homme et moi l'avons inondée en même temps. Mon sperme entre ses fesses, le sien entre ses seins, et les râles de nos orgasmes se sont mélangés dans la nuit noire.

23 février 2007

Le gage (1)

Lorsqu'elle est entrée dans la chambre d'hôtel où je lui avais donné rendez-vous, Sylvie n'avait plus tout à fait son aplomb habituel. Sa démarche était certes assurée, son port toujours aussi altier, mais je pouvais lire dans ses yeux l'ombre d'une appréhension, le timbre du doute dans sa voix volontaire. Ce trouble était sans doute dû à la tenue que je lui avais demandée. Elle laissait présager du pire. Sylvie portait un long manteau sur pas grand chose: des bottes de cuir qui accentuaient sa cambrure, une minijupe qui masquait tout juste le galbe de ses délicieuses rondeurs, une lingerie chic et choc qui mettait en relief ses petits seins pointus sous la cascade de ses mèches blondes. C'était aux antipodes de son costume habituel de working girl. Lorsqu'elle m'a vu prendre des clefs de voiture et me diriger vers la porte de la chambre, elle a compris que je ne serais pas le seul à profiter de son impudeur. Les règles du jeu étaient simples. Quand Sylvie gagnait une de nos joutes amoureuses, elle pouvait m'imposer le gage de son choix. Quand elle perdait, elle s'exposait à mon vice. Lors de notre dernier jeu, elle avait perdu.
 
medium_voiture-nuit.jpgNous sommes montés dans la voiture sans dire un mot. A peine installés, je n'ai pas pu m'empêcher de déposer un tendre baiser sur ses lèvres. Ma main entre ses cuisses crissait contre ses bas. Je l'ai sentie se détendre un peu. Mon regard planté dans le sien, je lui ai alors annoncé le programme de la soirée, le gage auquel elle devait se soumettre sous peine de me décevoir. Sous le trait appuyé de ses sourcils noirs, ses yeux irisés d'émeraude n'ont pas cillé, immobiles comme deux taches sur les ailes d'un papillon cloué dans une vitrine. "D'accord" a été sa seule réponse, aussi tranquille que si je lui avais proposé le choix d'un restaurant. La voiture a traversé Paris tambour battant, le long d'un chemin que j'avais appris par coeur, et qui nous rapprochait à chaque instant, du lieu. Une tension presque palpable montait dans la voiture au fur et à mesure que nous avancions. Une tension mâtinée de désir, qui monterait au rythme des passages dans la rue. J'ai bien cru que nos coeurs s'étaient arrêtés de battre lorsque nous nous y sommes engagés.
 
La première passe a été un round d'observation. Il y avait du monde ce soir là et donc du choix. Des visages dissimulés dans la pénombre, qui apparaissaient entre les véhicules en stationnement lorsque des voitures passaient au ralenti. Des hommes. Seulement des hommes sur des centaines de mètres. Des dizaines d'hommes face à quelques couples en voiture, dans une relation en miroir de mateurs et de matés, où le spectacle des uns est les spectateurs des autres. Sylvie semblait plus détendue après ce premier tour d'horizon. Ces hommes n'étaient pas si laids, certains plutôt mignons, et être le point de mire de tous ces regards envieux, bien à l'abri dans une voiture, semblait l'exciter un peu. Je lui ai proposé de poursuivre le jeu.

- On fait un deuxième tour ?
- Oui, j'en ai vu un ou deux assez mignons. Clean. Il y en a un qui m'a envoyé un bisou avec sa main lorsque nous sommes passés à son niveau, tu ne l'as pas vu ?
- Non, je ne l'ai pas remarqué. Tu veux qu'on s'arrête pour lui parler ?
- Oui, pourquoi pas !


Sylvie avait maintenant les yeux brillants, et j'ai perçu toute la provocation de sa remarque malicieuse. Si mon gage était de nature à la déstabiliser, elle pouvait me prendre à mon propre jeu. Nous avons entamé le deuxième tour, beaucoup plus lentement, pour bien contempler la longue file des mateurs. Il y avait de tout. Des jeunes boutonneux, des vieux décatis, des cadres hagards, des manoeuvres rougeauds, tout un échantillon de misère sexuelle, avec, au milieu, quelques profils qui sortaient du lot. Nombreux se masturbaient à notre approche, ils jouaient des coudes et du poignet pour exhiber une érection présentable, la queue dressée comme un oisillon qui attend la béquée. Sylvie, si cérébrale, regardait la vulgarité du geste avec un dédain affiché, mais je sentais chez elle autre chose de plus profond, un mélange de peur et d'excitation.

- Regarde le jeune là bas, en tenue de motard, au carrefour. C'est lui qui m'envoyait des baisers !
- Tu veux qu'on s'arrête ?
- Non, on fera un autre passage plus tard, je veux d'abord voir les autres.
- Tu en veux combien ? Deux ? Trois ? Plus ?
- Je ne sais pas... deux, ça me plairait bien... Sur les deux, il y en aura au moins un qui m'excitera vraiment. Tu es sûr qu'on ne risque rien ?
- Deux mecs, ça devrait être gérable.

À la fin du second tour, Sylvie les avait choisi: Le jeune motard qui lui envoyait des baisers, bottes et blouson de cuir, gueule d'amour et sûr de lui, il avait lancé un "vous êtes magnifique mademoiselle" lorsque la voiture était passée à son niveau; Et puis un autre, la trentaine, mince, visage anguleux, costume anthracite impeccable, lunettes intello, très discret. Le second n'avait rien d'un exhibitionniste. Pour un peu, nous aurions pu croire qu'il était un simple passant. Mais non, il attendait lui aussi, comme les autres. Nous avons entamé le dernier tour. Dans la voiture la tension avait définitivement fait place à l'excitation. Si le regard de Sylvie s'éparpillait toujours dans la rue, il luisait la luxure, et elle a eu du mal à encore jouer les indifférentes lorsque ma main s'est égarée sur sa cuisse. Elle a fini par tourner vers moi son visage souligné par un sourire carnassier, et sa main est venue directement palper la bosse qui déformait mon pantalon.

19 février 2007

Chez Pandore (3)

Résumons la situation. J'étais assis dans un siège avec une fille sublime sur les genoux, vêtue d'une veste et d'une petite culotte, rectification, d'une petite culotte seulement, et qui se dandinait face à moi, ses petits seins pointus à quelques centimètres de mon visage cramoisi, sa croupe effectuant d'amples mouvements circulaires alors qu'elle imprimait à son string un va et vient qui le faisait disparaître dans sa motte comme un fil à couper le beurre. Inutile de dire que je bandais comme un cerf. Allais-je faire l'amour à Eva là, dans ce club, sur ce fauteuil ? Sincèrement, j'en mourrais d'envie. Je posai le bout de mes doigts sur ses cuisses sans demander la permission. "On touche avec les yeux !" Son sourire ne parvint pas vraiment à adoucir son regard. Les choses, aussi claires furent-elles, n'émoussaient cependant pas mon désir brûlant. Elle arrêta de se dandiner un moment, me considéra avec une moue enfantine, et se pencha à mon oreille. "20 euros de plus et je te fais un petit cadeau" A ce moment là, j'aurais décroché la lune si elle me l'avait demandé. J'acquiesçai de la tête, incapable d'articuler un mot. Alors elle ôta sa culotte et me l'enfila sur la tête, le pif dans l'entrejambe, un oeil de chaque côté, les élastiques derrière les oreilles. Masqué comme un Zorro libidineux, j'assistais à la fin du spectacle en hyper ventilation, m'enivrant de ses effluves alors qu'elle me faisait un grand écart facial, debout, un pied sur le dossier du fauteuil, ouvrant sa chatte avec ses deux pouces en me disant "made in Italia" C'est ainsi que j'appris ses origines piémontaises. Mais les meilleures choses ont une fin. A peine avais-je ôté le slip de ma figure qu'elle en avait enfilé un autre ainsi que son tailleur. Elle glissa le slip usagé dans ma poche, en souvenir, me fit un bisou sur le nez et le monde chavira à nouveau.
 
Je retournai à ma table en titubant. Eva m'y adressa un clin d'œil complice avant de disparaître. Sauf que ce n'était pas ma table. C'était celle de mon beau-frère. Ce gros porc plein aux as faisait sauter la serveuse sur ses genoux, vous savez celle qui voulait me faire boire du champagne. D'ailleurs, il avait droit à toute la bouteille. Et histoire de me montrer qui il était, il en enfonça le goulot dans le sexe de la serveuse grimaçante. Elle se rattrapa en gloussant de rire jaune pour ne pas se faire virer. Il faut dire qu'il était le nouveau proprio de la boite, et l'idée de l'avoir enrichi du montant de mes consommations me faisait proprement enrager. Il daigna me donner une explication, histoire de prendre sa revanche sur moi qui avais fait des études et qui le faisait savoir. Il venait juste de gagner au loto et, grâce à ses fréquentations louches que j'avais toujours décriées, il avait saisi la bonne affaire : "chez Pandore" était à vendre, et il se l'était offerte, cette boite renommée, et tous les notables avec. Il renvoya la serveuse à ses clients avec une bonne claque sur les fesses avant de me faire une réduction royale de 10% sur ma note. "Quand Martine va savoir ça !" ajouta-t-il en rigolant. Que voulez-vous, la chance sourit aux audacieux.
 
Je quittais la boite, les épaules voûtées et la queue basse. Martine était la sœur jumelle de ma femme. Elle s'était entichée d'un apprenti boucher quand elle avait 16 ans, et cet abruti était devenu mon beau-frère. Notez que je n'ai absolument rien contre les bouchers, mais ce représentant ne faisait pas honneur à sa profession. D'ailleurs il n'était plus boucher depuis longtemps. Il avait aussitôt fait trois mômes à Martine pour toucher les allocs, il avait arrêté de bosser pour avoir le RMI, et il vivotait de petits trafics avec la mafia locale, passait des cigarettes et des prostituées albanaises au travers de la frontière italienne, n'hésitait pas à se faire payer en nature, bref, du genre glorieux. Les rêves adolescents de Martine avaient ainsi été réduits à torcher le cul de ses gosses et se faire sauter par ce sale type quand il n'avait pas de chair plus fraîche à sa disposition. L'acquisition de "chez Pandore" n'allait rien arranger, mais elle aurait au moins les moyens de passer ses nerfs sur une bonne portugaise, ça compense. En tous cas, dès que Martine saurait que j'avais passé la soirée avec une strip-teaseuse, ma femme le saurait aussi et je passerais un sale quart d'heure. Tout juste après avoir poussé la porte de la maison, je compris qu'elle savait déjà. Elle en savait même plus que moi. C'est ainsi que j'appris avoir une maîtresse, une certaine Eva que j'allais voir tous les soirs, une cocotte que j'entretenais depuis des semaines avec l'argent du ménage. Je laissais passer l'orage plutôt que de me confondre en inutiles arguties. C'est alors qu'elle me demanda où en était mon augmentation, parce que Martine, elle roulait en Mercedes classe A métallisée ce qui est très pratique pour faire les courses au supermarché. Je sentis la sueur inonder mon front et je m'épongeais par inadvertance avec le slip d'Eva que j'avais sous la main. C'est là que ma femme a vraiment vu rouge. 
 
Le lendemain matin, j'allais au boulot en bus, pour la première et dernière fois. Ma femme était partie chez sa mère avec ma vieille AX bancale qui était maintenant la sienne. Ma dernière journée fût assez productive. Je parvins à terminer mon CV et à envoyer un mail à tout mon service: tout le monde était invité à un pot de départ informel chez bibi, le café du coin. Personne ne vint, à croire que ma disgrâce pouvait être contagieuse. Personne ne vint à part Jean-paul, cette vieille tantouze alcoolique prêt à braver tous les tabous pour se torcher à l'œil. Non content d'ingurgiter tout ce qui restait de mon budget, il crût la source inépuisable et me proposa de finir la soirée "chez Pandore" Non ! Pas question ! Á cause de cette maudite boite j'avais perdu ma voiture, ma femme, mon job, quelle nouvelle catastrophe allait encore fondre sur moi ? Serais-je contraint d'y accepter un poste de groom aux ordres de mon beau-frère pour entrevoir ma dulcinée, Jean-Paul allait-il me sodomiser en me confondant avec un éléphant rose ou pire encore, Eva serait-elle partie en congés ? Non, je n'irais pas y noyer mon désespoir, car tous mes rêves s'en étaient allés. Envolées mes légitimes aspirations de petit bourgeois dignes d'un discours électoral démocrate chrétien, éteintes mes velléités d'assouvir de sombres désirs illicites, évanoui mon espoir de connaître un jour Eva. Je rentrai dans ma maison vide et m'affalai dans un fauteuil. J'hésitai entre ingurgiter la première bouteille ou le premier bouquin venu. Vu mon état, je décidai de ne pas décider, et je tombai sur une bouteille de whisky et un bouquin sur la mythologie. Au premier verre, j'en étais au talon d'achille. Au deuxième verre, Tantale, ce qui me fit prendre aussitôt le troisième verre pour aborder Eros et Psyché. Je ne comptais plus lorsque je me suis affalé sur la page 134. Il y était question d'une certaine Pandore...

"Un matin, Pandore profita de l'absence de son mari Épiméthée pour se glisser dans la pièce où était dissimulée la boîte. Elle la contempla longuement, puis se décida à l'ouvrir.
Elle brisa la serrure, puis, osant à peine respirer, elle souleva lentement le couvercle. Mais avant même qu'elle puisse regarder à l'intérieur, il s'en échappa un hurlement terrible, un long sanglot de douleur. Elle recula d'un bond, épouvantée. De la boîte se mirent à sortir toutes sortes de calamités: la haine et la jalousie, la cruauté et la colère, la faim, la pauvreté, la douleur, le vice, la vieillesse et la mort. Pandore essaya bien de refermer le couvercle, mais il était trop tard. C'est alors que, discrètement, sans faire de bruit, en sortit l'espérance."

18 février 2007

Chez Pandore (2)

Cette vieille fille frustrée avait ses entrées chez le PDG qui ne l'était pas moins, et ces deux corbeaux passaient une bonne partie de leur temps à faire la chasse aux calendriers playboy qui fleurissaient dans les vestiaires des ouvriers plutôt que de redresser les comptes calamiteux de l'entreprise. Si elle m'avait reconnu, j'étais foutu, le PDG puritain me sabrerait sans état d'âme, invoquant un quelconque écart de conduite. J'adorais les femmes, c'était mal vu, et il ne me restait plus qu'à prier tous les seins de la terre pour que cette vieille pie ne m'ait pas vu. Je rentrai chez moi la bouche pleine d'excuses, et allai me glisser au lit prétextant une migraine. Je dormis mal. Le lendemain matin, il ne me restait de la soirée que l'image de la vulve d'Eva à demi masquée par sa petite culotte, et je me rendis au bureau d'humeur guillerette, fin prêt à reprendre l'exploration exhaustive des sites pornographiques francophones. Quelques regards en coins me restituèrent l'intégralité de mes souvenirs. A mon poste de travail, une lettre avait remplacé mon clavier. L'entretien qui suivit fût pénible. Faute lourde. L'historique des accès internet m'accusait. Je plaidais les circonstances attenuantes. En vain. Demain serait mon dernier jour. Je passai ma journée à taper mon CV. Le soir arriva plus vite que prévu. J'allais devoir rentrer chez moi et expliquer à ma femme ma nouvelle situation de chômeur sans l'ombre d'un droit. Ce serait délicat, et je retardai l'épreuve au maximum. Sans même m'en rendre compte, mes pas me portèrent à l'entrée de "chez Pandore". Le souvenir d'Eva surgit alors comme un bouton de fièvre, et je pénétrai à nouveau dans la boite de strip-tease.
 
Je fus accueilli par une slave d'applaudissement. Il y avait beaucoup plus de monde que la veille et, bizarrement, j'arrivais juste à la fin du show d'Eva, comme si ma vie en dehors de cette boite n'avait été qu'une parenthèse. Si je n'étais pas fâché d'avoir échappé au spectacle des parties génitales du transsexuel, j'étais découragé de ne pas avoir la chance de la revoir, elle. La serveuse me trouva une table dans un coin de la salle, à côté des toilettes. Je m'écroulai dans le siège, vaincu d'avance. Oui, une petite coupe, au point où j'en étais. Et un whisky aussi. Un frisson me parcouru l'échine lorsqu'une femme en tailleur-petite culotte passa à côté de ma table. Eva s'arrêta à une table voisine, obtempérant à l'invitation d'un bel idalgo. De là où j'étais, je ne  pouvais entendre leur conversation. Je ne voyais que son profil, à elle, tout en ombres, et qui masquait une partie de la scène où une chinoise se trémoussait. Il avait l'air exubérant. De loin, on avait l'impression qu'il faisait une chanson de geste. Elle parlait peu, le regardait, en souriant. D'un coup, ils se levèrent et se dirigèrent vers le fond de la salle. Il s'assit sur un étrange fauteuil rond, dos au mur. Elle resta debout, tout près de lui, presque sur ses genoux. Et le fauteuil bascula d'un seul coup, faisant un demi-tour rapide pour ne présenter à la salle que son dossier en demi-cercle, presque aussi haut qu'un homme, formant ainsi une alcôve impénétrable. D'Eva, je ne voyais plus que le sommet des cheveux, qui montait et qui descendait.
 
J'étais hypnotisé par ce va et vient, par ces apparitions capillaires plus ou moins régulières, ignorant complètement les shows qui se succédaient sur scène. Parfois elle disparaissait complètement, avant de refaire surface quelques secondes plus tard. J'avais l'impression d'entendre leurs rires étouffés. Cela dura 5 bonnes minutes qui me semblèrent des heures. Enfin, sans préambule, le siège effectua un nouveau demi-tour, et tout était comme avant. Sauf que le type était rouge écarlate. Il retourna à sa place, suivit d'Eva qui le salua et rejoint le ballet erratique des filles entre les tables. J'attendis patiemment de croiser son regard pour esquisser un geste en sa direction. Elle approcha en souriant. 
 
- Bonsoir dis-je.
 
Ma propre voix me surprit. Je parvenais à peine à articuler.
 
- Bonsoir, repondit-elle, vous voulez un peu de compagnie ?
- Oui
- Moi c'est Eva
- Enchanté. Christophe.
- Vous m'offrez un verre ?
- Heu, Oui, bien sûr... qu'est ce que vous prenez ?
- Une petite coupe
- Et un autre whisky pour moi, mademoiselle...
 
Eva avait une voix chaude et grave. Je vous restitue le dialogue comme ça, en gros, mais il était entrecoupé de silences terribles. J'étais à la fois excité et mal à l'aise. Son regard impénétrable me tenait en respect, la queue en l'air et les mains bien à plat sur la table. Je crevais d'envie de lui demander ce qui se passait derrière les fauteuils ronds, et je ne parvenais qu'à aligner des platitudes. Pour circonstances atténuantes, le galbe de ses seins qui apparaissait entre les pans de son tailleur me déconcentrait considérablement.
 
- Tu veux que je te fasse un show privé ?
 
Je ne fus pas mécontent qu'elle aborde la question cruciale par sa réponse. C'était donc un show privé. Mais je n'en savais guère plus, et les questions qui me brûlaient les lèvres ne passaient pourtant pas leur barrière.
 
- Heu, pourquoi pas
- 40 Euros.
- Ah ?
- On y va ?
- Oui.
 
Ce fût aussi simple que cela. Je la suivis vers le fond de la salle, avec le sentiment étrange que l'histoire était en train de basculer, non pas l'Histoire avec un grand H, juste la mienne, la minuscule. Je m'assis dans le fameux fauteuil, le cœur battant, et elle s'approcha de moi, tout près, si près que ses jambes frôlaient les miennes, si près qu'en fermant les yeux j'aurais sûrement pu sentir le parfum de sa peau. Le monde chavira d'un seul coup.

A suivre...

17 février 2007

Chez Pandore (1)

Il faisait chaud à en suer du vice. D'ailleurs, je le sentais couler entre mes omoplates, glisser dans mon dos comme une sueur froide, mouiller mes fesses et gonfler ma queue. J'étais assis face à l'écran, l'œil hagard et la main moite, tripotant fébrilement du majeur la molette de ma souris comme s'il s'agissait d'un clitoris, faisant défiler des chairs multicolores avec pour seule constante le pourpre des vulves écartelées. Oui, je sais, ces photos ne risquaient pas d'améliorer la situation, mais je n'y pouvais rien, c'était plus fort que moi. La moiteur du soir m'accueillit sur le trottoir en sortant du bureau. J'avalais péniblement ma salive. Je reconnaissais cette sensation d'excitation, lorsqu'elle est encore coincée dans la gorge, avant de descendre dans le bas du ventre en passant par le cœur, le faisant battre un peu plus fort au passage. Elle me donnait soif, envie de boire une bière ou n'importe quoi susceptible de me fournir une mauvaise raison pour franchir rapidement l'entrée de "Chez Pandore", et y assouvir ma curiosité entre autres bas instincts.
 
"Chez Pandore" était, selon ses mœurs, le haut lieu départemental du vice et du stupre, ou ses bas-fonds. Les bourgeois rivalisaient d'indignation à propos de cet établissement, et susurraient à qui voulait l'entendre que bien des notables y avaient leurs entrées lors de soirées infernales, auxquelles ils omettaient de mentionner leur présence. Une bonne partie de la gent masculine locale y avait donc été vue, et c'était là le meilleur rempart contre les calomnies. J'évitais cependant de tergiverser aux portes de cet enfer pour ne pas être remarqué par les vipères du coin qui s'empresseraient d'amplifier mon forfait jusqu'aux oreilles de ma femme. Sitôt la frontière de velours rouge franchie, je fus accueilli par l'odeur caractéristique des lieux pour mâles en perdition, une odeur musquée comme un parfum de femme cueilli au creu des reins, fragrance un rien épicée, dont il devait exister des bombes aérosols à base d'essence de bordel comme il existe des bombes de neuf pour mieux vendre les voitures d'occasion. J'en étais à ces réflexions lorsque je réalisai que mes pas m'avaient mené jusqu'au bar, au cœur de l'antre des femmes légères, pour la première fois.
 
Il n'y avait pas grand monde, trois ou quatre clients au regard blasé et une entraîneuse noire juchée sur un haut tabouret, sa robe longue ouverte sur un gros manque de vertu. Probablement trop tôt dans la soirée. Une jeune femme vêtue de court m'indiqua une place au bord de la scène vide, obscure comme un puits sans fond, avant de me tendre une carte aux prix hallucinants. Je compris rapidement les règles du jeu, et j'optai pour une bière plutôt que la petite coupe de mauvais champagne qui m'était proposée, résistant héroïquement à la serveuse et sa moue équivoque desservie par un regard dédaigneux. Le jeu consisterait à boire le plus lentement possible, afin de ne pas avoir à commander une autre boisson. Je trépignais d'impatience de me rincer l'œil et la gorge. La guerre d'usure avait commencé. Une voix off masculine et empressée ouvrit les hostilités en annonçant le prochain spectacle.
 
Eva apparu dans un halo de lumière rouge projetée sur le nuage d'azote qui se répandait complaisamment autour d'elle. Elle ne portait pas une tenue de scène classique, une de ces robes moulantes en lycra dont les bretelles glissantes auraient rapidement libéré des seins meurtriers comme des obus, ni même une de ses tenues exotiques d'infirmière ou de bonne sœur, blasphème aux soins des âmes aux corps perdus. Non, elle portait un tailleur. Un tailleur strict, gris anthracite, une tenue au classicisme exubérant, une tenue de commerciale innocente, totalement déplacée et d'autant plus excitante. Elle avait même poussé la provocation jusqu'à porter un pantalon. Si ce n'était sa démarche chaloupée sur un air suave de Sade "I Never Thought I'd See The Day", si ce n'était son regard à la fois trouble et résolu, on aurait pu croire qu'elle se rendait à un conseil d'administration. Sauf qu'on était "chez Pandore".
 
Eva esquissa un sourire servile en ôtant sa veste avant de l'accrocher au dos d'un fauteuil de bureau qui apparaissait sous les spots, et dont elle flatta le cuir noir de la paume de la main.

- Vous êtes en retard Eva !

La voix qui résonna dans la salle me fit tressaillir. Une voix féminine, jeune, teintée de ce léger et délicieux accent méridional qui n'entamait pourtant en rien son ton autoritaire et cinglant. La voix renchérit à nouveau
 
- Je ne veux pas entendre vos sempiternelles excuses ! Et quelle est cette tenue ? Vous vous imaginez déjà à ma place, dirigeant cette entreprise en costume Yves St Laurent ?
 
Eva se tenait comme une petite fille, tête baissée, les mains croisées devant elle, le rouge aux joues.
 
- Vous n'êtes que ma secrétaire, ne l'oubliez pas. Et à ma merci ! Déshabillez-vous mon petit...
 
L'ordre avait été donné, sans appel, sur une octave imperceptiblement plus basse, d'une voix légèrement voilée où transparaissait un noir désir, laissant déjà imaginer les turpitudes auxquelles Eva serait soumise. Eva leva un visage larmoyant, j'eus l'impression qu'elle m'implorait du regard comme si cet ordre était le mien, elle fit non de la tête, négation aussi effrayée qu'inutile car déjà capitulaient les premiers boutons de son chemisier blanc sous ses doigts tremblants.
 
- Allons mon petit, détendez-vous, je ne vais pas vous manger, mais ne me décevez pas !
 
Le chemisier s'ouvrit sur une lingerie de dentelle blanche qui moulait de petits seins hauts placés.  Son ongle carmin effleura la lisière de dentelle, repoussant lentement ses limites dévoilant une chair pâle, frissonnante, jusqu'à libérer un téton rose et pointu. De loin, j'eus même l'impression qu'une larme venait de couler sur ce sein émouvant. D'un seul coup, Eva rabattit les pans de sa chemise sur sa poitrine et baissa à nouveau son visage cramoisi de honte.
 
- Maintenant, enlève le bas !
 
Retenant de la main gauche les pans son chemisier fermé sur ses seins, la droite glissa mollement le long de sa cuisse, ses doigts hésitèrent un instant, ouvrirent sa ceinture, firent lentement glisser la fermeture de son pantalon, et avec une infinie langueur, elle le repoussa vers le bas jusqu'à ce qu'il tombe à ses chevilles. Elle n'eut qu'un pas à faire pour laisser les oripeaux de sa pudeur sur le sol, alors que la musique qui s'emballait semblait monter comme un frisson le long de ses cuisses fuselées, achevant de transfigurer l'employée soumise en strip-teaseuse lubrique. La voix off semblait celle d'une fille au bord de l'orgasme.
 
"Caresse-toi !" Les pans de son chemiser s'ouvrirent à nouveau sur son ventre, et ses mains qui glissaient sur sa peau, vers ses seins. Eva dégrafa son soutient gorge par-devant, remplaçant les bonnets par la paume de ses mains caressantes, et puis violentes lorsqu'elle tritura ses tétons entre ses doigts, rejetant sa tête en arrière, avant de me jeter au visage un regard fauve. Je sifflai ma bière d'un seul coup. "Montre-moi ton cul !" Elle se retourna, s'accroupit, releva sa chemise comme si elle allait uriner, avant de la jeter au travers de la salle. Sa petite culotte saillait entre ses fesses rondes, deux globes entre lesquels la dentelle n'en finissait pas de glisser. "Branle-toi !" Elle se dirigea vers le siège à quatre pattes comme une chatte en chaleur, s'y agenouilla face au dossier, cuisses écartées, cambrée au maximum, se penchant toujours plus en avant jusqu'à ce que le siège bascule, sa petite culotte tendue à éclater sous la pression de sa vulve gonflée. Sa main glissa entre ses suisses et elle frôla son entre-jambes d'un doigt taquin, qui jouait à repousser l'élastique, toujours un peu plus loin, faisant saillir ses lèvres gonflées. Je déglutissais la petite coupe de champagne sans même m'en rendre compte.
 
Soudain, un spot éclaira une autre partie de la scène. Derrière un bureau cossu, une blonde platinée fumait un cigarillos, une main enfouie sous sa robe rouge sang qui farfouillait entre ses cuisses. Grande, son visage émacié et sévère était outrageusement maquillé. Une bretelle de sa robe avait glissé, libérant un sein lourd et ferme. La blonde se leva, se dirigea vers Eva qui gardait la pose, et approcha de son visage abandonné sur le cuir du fauteuil. Il écarta les pans de sa robe. "Suce-moi !" Entre ses cuisses pendait une queue de vingt bons centimètres. Je faillis m'étrangler avec le cognac. La lumière s'éteignit sur cette vision infernale qui eut le mérite de me faire débander, me permettant ainsi de me lever en titubant. La note acheva de me remettre les idées en place et je me dirigeai promptement vers la sortie.
 
Je franchis les rideaux rouges comme une balle perdue et percutais une passante qui s'écroula sur le trottoir. Je la regardai se lever, tétanisé avant de tourner les talons et prendre la fuite comme si le diable était à mes trousses. Ce n'était pas complètement faux. Je venais de bousculer Madame Michaud, mon chef comptable, une vraie diablesse.

A suivre...

14 février 2007

Rêve 911

C'est un rêve.
Toujours le même.
D'abord une brume. Une brume opaque, opalescente, onirique. Il me semble que j'y avance, lentement, bras tendus probablement, mais je ne peux rien distinguer dans cette clarté diffuse, même pas le bout de mes doigts. D'ailleurs je ne sens rien, ni chaud, ni froid, ni aucun obstacle. Je suis le spectateur d'un travelling avant léthargique, jusqu'à ce qu'une forme apparaisse devant moi.
Une forme diffuse, presque une ombre.
J'en distingue à peine les contours, mais cela ressemble à une femme. Une femme de profil, agenouillée. Ou plutôt prosternée, sa longue chevelure jetée en avant sur ses bras tendus. Immobile, comme dans l'attente d'un Dieu jaloux. De sa nuque à ses reins, la ligne rigoureuse de son dos courbé semble tracée au compas, avant de se perdre dans la brume de ce rêve indolent.

Dans mon rêve, toujours le même, depuis des années, depuis mon enfance, ou plutôt mon adolescence, dans mon rêve je m'approche de cette forme féminine, tout en la contournant, les yeux rivés sur elle. Comme si elle était le centre et l'aboutissement d'une longue spirale. Par derrière, je crois discerner le galbe de ses hanches, tendres rondeurs flottantes. Il me semble bien qu'elle est nue, ou peut-être recouverte d'un simple voile, d'une mousse enveloppante, vaporeuse, translucide, qui ne masquerait rien, sinon les angles les plus vifs, et le tendre pli de son aine à la base de sa cuisse repliée. Il me semble que je pourrais la toucher.
Je tends le bras.

Je m'approche encore un peu plus. Les formes se précisent maintenant, symétriques. Ma main en souligne l'harmonie. Mais je ne la touche pas, par peur de la réveiller, ou de me réveiller, enfin, de la perdre. Je la frôle à peine. Pourtant qu'ai-je à craindre ? Dans mon rêve, je sais qu'elle est mienne. Elle m'attend. Je sais qu'elle m'attend. Elle est là, prosternée, immobile, offerte au plus offrant. Et le plus offrant, c'est moi. Elle est comme une pute de luxe et elle m'appartient. Je la possède. Oui, dans mon rêve, je la possède. C'est un rêve intime. Je n'en parle à personne. Sauf à ma femme. Enfin, mon ex femme. Je lui en parlais, mais elle ne voulait rien entendre, elle ne voulait pas comprendre. Peut-être qu'elle ne pouvait pas. Parce que cela lui rappelait ses propres cauchemars. Mon ex ne voulait absolument pas entendre parler de ce rêve. Comme si c'était une rivale.

Dans mon rêve, je la prends, lentement. Pour ne pas la brusquer, et surtout bien savourer ce moment. Pour que mes souvenirs affluent, ceux de la première fois, quand je l'ai ouverte. Pénétration. Une fois lové à l'intérieur, dans sa douce chaleur, je ne bouge plus. C'est étroit mais confortable, moelleux et enveloppant. J'exulte. Il faut que je me calme. Ne pas partir tout de suite. Dans mon rêve, j'inspire un grand coup. Il me semble même percevoir son parfum délicat. L'odeur du luxe. Du fric. Quel abruti a dit que l'argent n'a pas d'odeur. L'odeur de l'argent, c'est la sienne. C'est aussi pour ça que je l'aime. J'attends encore un peu. Je la connais. Dans ses moindres détails. Je sais que lorsque je serai prêt, elle démarrera, au quart de tour. Elle rugira comme un fauve. Mon plaisir sera alors à son comble. Mais il faudra tenir la route. Aller jusqu'au bout. Avec elle. Maintenant. Je tourne la clef de ma Porsche 911.

29 janvier 2007

Gilda

Les gouttes de pluie éclataient sur le pare brise depuis des heures. Depuis des heures, Johnny fumait cigarette sur cigarette. En fait, il ne les fumait pas vraiment. Il les laissait plutôt se consumer, comme des bâtons d'encens, pour le plaisir de voir les volutes grises, pour l'ambiance. Dehors, l'interminable ruban d'asphalte s'étirait devant ses yeux, jusqu'au bout de la portée de ses phares, jusqu'à se confondre avec l'horizon brumeux. De la grisaille crépusculaire à perte de vue. Parfait. Johnny n'aimait pas les couleurs.

L'essuie-glace passait et repassait devant ses yeux, émettant à chaque fois un couinement de tristesse qui se mêlait au ronronnement chaleureux du camion, grave et régulier. Réconfortant. Il y avait bien la radio, mais il aurait dû parcourir toute la bande FM, avec ses musiques de sauvages et ses pubs nasillardes, tout ça pour un improbable morceau de Jazz, et cette idée le révulsait. Johnny n'aimait pas vraiment la musique, tout au moins pas assez pour risquer de gâcher son bonheur, puisqu'il était déjà heureux. Enfin, un peu. Un bonheur ténu, mais tenace: cette nuit, il verrait Gilda.

Derrière lui, quinze tonnes de citrouilles, d'un orange abominable, mais bien tranquilles. Dans quelques heures, il les livrerait à une grande surface provinciale, pour Halloween, les jeunes aimaient ça paraît-il. Sa remorque enfin vidée, il pourrait y voir Gilda, en grand secret, juste avant le petit matin, aux heures où tout le monde dort. Johnny ne vivait que pour ce rendez-vous et il voyait Gilda de plus en plus souvent. Au début, c'était irrégulier, quand il avait un coup de blues. Et puis, les coups de blues aidant, c'était devenu hebdomadaire. Maintenant c'était quotidien. Pas une nuit sans Gilda. Si ses collègues l'avaient su, ils auraient dit qu'il était fou; Il n'aurait pas pu leur donner tort.

Alors que les kilomètres succédaient aux kilomètres, une lueur d'inquiétude commença à entacher son obscure sérénité. La jauge baissait avec obstination, et il ne pourrait pas éviter de prendre de l'essence à la prochaine station. Il n'aimait pas cette station là. Elle lui rappelait de mauvais souvenirs. En réalité, les mauvais souvenirs l'y attendaient. Il eut la chance de ne croiser personne à la pompe mais constata avec désarroi que la pluie avait cessé. Elles seraient toutes dehors. Il paya en catimini, avant de s'engouffrer dans sa cabine. Maintenant, il devait s'engager sur l'aire de repos réservée aux poids lourds, pas moyen de faire autrement. Une zone étroite et encombrée de camions garés n'importe comment, où il devrait rouler au pas pour ne pas en écraser une. Cela faisait des mois qu'il n'avait pas eu à passer par-là. Et depuis, la situation ne s'était pas améliorée. La mort dans l'âme, Johnny s'apprêta à traverser le baisodrome.

C'est comme ça qu'ils appelaient ce parking. Pourquoi celui-là et pas un autre ? Pourquoi toutes les putains et tous les routiers du monde s'étaient donné rendez-vous ici et pas ailleurs ? Pourquoi s'y était-il arrêté, lui aussi, au moindre prétexte, pour y rester en embuscade, pendant des heures, la bouche pleine de salive, les yeux hagards, jaugeant les gueules et les culs, se demandant si celle-ci le ferait jouir comme jamais, ou bien plutôt celle-là, avant d'en faire monter une, en urgence, n'importe laquelle, pourvu qu'elle semble belle, la payer, et puis la trouver moche, se faire quand même tailler une pipe, et éjaculer la bite molle, pourquoi ? Pourquoi ne pas être rentré chez lui où l'attendait sa femme, avant qu'elle ne l'attende plus, et le laisse, tout seul ? Pourquoi ? Et puis... et puis il avait finit par voir Gilda, et ça non plus, il ne savait pas trop pourquoi. Il se concentra sur cette dernière idée pour regarder droit devant lui, les mains crispées sur le volant, ignorer les clins d'œil aguicheurs, surtout ne pas regarder sur les côtés, ces filles peinturlurées, ne pas sombrer à nouveau...

`Hé ! Mais c'est mon Jeannot ! Alors chéri, tu m'aimes plus ?'. Il respira fort pour ne pas tourner la tête, accéléra et sortit de cette fange. Gilda... Gilda... Il répéta son nom à mi-voix comme pour exorciser les vieux démons qui rôdaient encore, jusqu'à se calmer, complètement. Plus jamais Jeannot... Johnny... Oui, Johnny et Gilda... Plus que cent kilomètres... cent petits kilomètres...

Johnny arriva juste à temps pour l'ouverture de l'entrée fournisseur du grand magasin. Il ouvrit sa remorque, sauta sur le fenwick, et entreposa lui-même les citrouilles dans le hangar, histoire de gagner un peu de temps, et de ne pas dévoiler ce qui était caché au fond du camion. Le manœuvre rigolait en regardant ce pauvre fou faire son boulot à sa place au lieu de se reposer après des heures de route. Il ne pouvait pas comprendre. D'ailleurs il n'y avait rien à comprendre. Dès que le camion fût déchargé, Johnny repartit aussi vite qu'il était venu.

Le soleil n'était pas encore à l'horizon lorsque le camion s'enfonça doucement dans un chemin de traverse, juste assez loin pour ne plus entendre les bruits de la route. C'est là qu'il verrait Gilda. N'importe où pourvu qu'il ne soit pas dérangé. Le cœur battant, il s'enferma dans la remorque. Dans la pénombre, il retira la bâche qui protégeait son installation, et mit tout en place. Enfin, il s'assit dans un confortable fauteuil. Johnny alluma une cigarette. Il savourait tout particulièrement ce moment de détente, juste avant de la voir. Il se prenait à rêver d'être à ses côtés, d'être bien habillé, des souliers vernis, un costume trois pièces au pantalon amidonné, le pli si affûté qu'on aurait pu y couper une tomate, oui, c'est ça, un gangster, un mafieux, ou même un flic, pourvu qu'il soit avec Gilda. Il appuya sur la télécommande de la vidéo. Une lumière gris-bleue envahit les lieux, s'incarnant dans les volutes de fumées, comme dans le casino d'un vieux film des années 40...

medium_Gilda.3.jpg

"When Mrs. O'Leary's car kicked the lantern-in Chicago town,
They say that started the fire-that burned Chicago down.
That's the story that went around, but here's the real lowdown,
Put the blame on mame boys,
put the blame on mame
Mame kissed a buyer from out of town,
that kissed burned Chicago down.
So you can, Put the blame on mame boys,
put the blame on mame."

Gilda (1946)

08:50 Publié dans Fictions | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : Littérature

10 janvier 2007

Comment se débarrasser de sa femme

Hector75: Bonjour ma chérie, comment vas-tu ce soir ?
Hermione28: Mon amouuuuuur, tu m'as manqué aujourd'hui. Plus que 5 jours.
Hector75 :Oui
Hermione28: Dans 5 jours tu seras là, jeudi prochain tu seras là, enfin!
Hector75: Oui, enfin...
Hermione28: Tu as trouvé une solution?
Hector75: Solution?
Hermione28: Pour ta femme
Hector75: Non, pas encore
Hermione28: Tu ne m'aimes plus.
Hector75: Mais si ma chérie, mon amour, mais si...
Hermione28: Tu aurais trouvé une solution si tu voulais vraiment me voir.
Hector75: Mais je viens en vacance avec ma femme, et elle est jalouse comme une teigne...
Hermione28: Ah? Parce que tu penses pouvoir venir seul un jour?
Hector75: Peut être, je sais pas...
Hermione28: Tu ne veux surtout pas risquer de compromettre ton petit confort, pas pour moi en tous cas, parce que sur le forum Séduction...
Hector75: Sur le forum quoi?
Hermione28: Je n'ai peut être pas l'air très maline, mais tu réponds toujours aux posts d'Electre51.
Hector75: Electre51! Tu rigoles, elle a 60 ans!
Hermione28: Tu lui réponds à Elle. La dernière fois, tu n'as pas répondu au mien.
Hector75: Lequel?
Hermione28: "Messieurs, quel alibi inventez-vous pour voir votre maîtresse?"
Hector75: Je n'avais rien d'intéressant à dire.
Hermione28: Et pour cause. Tu as lu au moins les réponses?
Hector75: Oui, j'ai survolé, le coup des cigarettes, sortir le chien et tout un tas de bêtises.
Hermione28: Ulysse31 au moins, il a des idées !
Hector75: Tu parles, cet abruti passe son temps à ça, on dirait qu'il n'a que ça à foutre.
Hermione28: Je me demande si je n'aurais pas du céder à ses avances. Il aurait eu du temps à me consacrer, Lui.
Hector75: Il doit en avoir au moins douze en parallèle. Tu aurais aimé être la numéro 9? Pour moi, tu es la première.
Hermione28: Parce que je ne suis pas la seule? Il y a une autre femme dans tes mails !
Hector75: Mais si tu es la seule.
Hermione28: Je viens de te voir dans le salon Drague:2!
Hector75: Ah? et qu'est ce que tu faisais là?
Hermione28: Je demandais un conseil à Ulysse31, c'est tout.
Hector75: Et qu'est ce qu'il raconte de beau, vous êtes le phœnix des hôtes de ce tchat, ce genre d'ânerie?
Hermione28: Non, il t'a trouvé un alibi.
Hector75: Sa majesté est trop bonne.
Hermione28: Imparable. Tu prends rdv chez le dentiste, je serai dans la salle d'attente.
Hector75: Quoi?
Hermione28: C'est mieux que rien. Que pour me voir, tu ne puisses pas affronter ta femme... mais même pas le dentiste!
Hector75: Mais je ne peux pas prendre rendez-vous chez un dentiste à l'autre bout de la France!
Hermione28: Tu auras une rage de dent. Ce sera une urgence.
Hector75: C'est romantique !
Hermione28: Si tu ne peux même pas faire cet effort là, je crois que...
Hector75: D'accord, on fera comme tu veux.
Hermione28: Comme JE veux?? Tu n'as donc pas ENVIE de me voir?
Hector75: Si si, je simulerai une rage de dent, et enfin nous pourrons nous voir mon amour, ma chérie...
Hermione28: Enfin. C'est le mot.
Hector75: J'ai envie de toi...
Hermione28: Oui mais là je ne peux pas rester trop longtemps, faut que je couche les petits, faut que j'étende le linge...
Hector75: Je te fais des bisous dans le cou, qui glissent partout...
Hermione28: Oui mon amour. Tu me diras tout ça mardi. Baille baille
Hector75: bisous bisous bisous
Hermione28: baille baille :-* clic !
Hector75: clac !

Ainsi partirent en vacances de printemps Hector75, sa femme, sa fille, son fils et snoopy. Hector75 allait enfin rencontrer Hermione28, sa maîtresse virtuelle, la femme en Times italique rose qui faisait battre son cœur à 1Mhz depuis qu'il s'était abonné à Wanadoo, sous des prétextes fallacieux dont la recherche de nouvelles recettes de cuisine. Hector75 avait bien fait les choses. Il avait réservé un bungalow au VVF de Contrexéville, avec tous les équipements sportifs, terrain de foot et pédalos, pour que ses enfants et snoopy puissent prendre un bon bol d'air et lui foutre la paix, alors que sa chère Hermione28 ne serait qu'à un quart d'heure de route. Mais il lui restait à gérer le gros morceau, le plat de résistance: sa femme. Comment se débarrasser de sa femme ? Telle était la question obsédante qui apparaissait de plus en plus souvent entre Hermione28 et lui, et qui lui pourrissait la vie. Finis les torrides ébats nautiques aux caraïbes, terminées les sodomies sauvages sur un cheval au galop, les coïts virtuels et délicieux semblaient définitivement envolés, tout au moins jusqu'à la rencontre fatidique. Et quelle rencontre. Point de ballade en amoureux, nus, main dans la main dans les petits chemins escarpés; point de galipettes dans la paille entre veaux, vaches, cochons couvées; point d'hôtel de charme oú ils se seraient envoyés en l'air des heures durant. Non, cette rencontre sauvage aurait lieu au cabinet du Dr Achille à 17h, là où il y a le plus de monde pour que ça dure le plus longtemps possible.

Comme convenu, Hector75 eut son imprévisible rage de dent à la Cafétéria Casino le lundi soir. Hector75 étant perfectionniste, il crut bon de passer une nuit blanche à gémir constamment, pour bien montrer à son épouse l'urgence de la situation. Il simula le lendemain matin un appel au cabinet du Dr Achille trouvé par hasard sur le bottin téléphonique, afin de se faire soigner de toute urgence, mais pas avant 18h, car tout était complet, qu'il vienne plus tôt et qu'il attende on ne sait jamais. C'est ainsi qu'Hector75 monta dans sa voiture à 16h50 après avoir fait mains et pieds pour que sa femme ne l'accompagne pas. Rien de grave, vraiment, probablement une carie aiguë, mais rien de grave, non, on n'allait pas l'opérer, oui il pouvait y aller seul. À 17h, il sonna à la porte du cabinet. À 17h01 il entra dans la salle d'attente, la mine pale et les yeux cernés mais le sourire aux lèvres. Hermione28, enfin, il allait voir Hermione28.

Il ne la reconnut pas tout de suite.
Son regard balaya la salle d'attente angoissée, de petits vieux en femmes enceintes en passant par des cadres en costar, tout un échantillon représentatif de la population française dont Hermione28 n'émergeait malheureusement pas. Enfin, son regard se posa sur une femme entre deux âges, aux joues pourpres et au regard brillant. C'était elle! Son merveilleux amour l'attendait au fond à droite, à côté du radiateur, où elle lui avait gardé une place bien au chaud, camouflée derrière une plante verte qui leur ferait un peu d'intimité. Hector75, souverain, s'y dirigea sans se douter que ce douillet nid d'amour était le fruit d'un combat homérique entre Hermione28 et madame Priam, une vieille rombière pétrit d'arthrose qui avait toujours cette place là eu égard à ses vieux os. Sans quitter Hermione28 des yeux, il s'installa tel un félin dans le fauteuil en skaï dans un ample mouvement à la noblesse calculée. Il fit glisser sur son nez ses lunettes noires pour planter son regard bleu acier sur les paupières papillonnantes d'Hermione28 qui se trémoussait sur son siège. Il plaça habilement son mollet tout contre celui de sa maîtresse, qui avait laissé son pied en pâture à son grand fauve, et il sentit enfin la douce chaleur de cette femme qu'il avait depuis longtemps perçu derrière les caractères en Times italique rose...

Dzzzzzzzzzoingzzzzoingzzzzzzoing... Aaaaaargh...

Une fugace inquiétude traversa le regard d'Hector75 qui se douta que le Dr Achille ne devait pas être un ange douceur au vu des mines défaites des patients qui l'entouraient. Seule Hermione28 coulait sur lui un regard d'une infinie tendresse.

- Mon amour, tu es venue, pour moi, chuchota-elle en traînant imperceptiblement sur la dernière syllabe qui s'éteignit en un souffle sensuel.
- Ma chérie, enfin, enfin...

Didoudidadidoudidop! Didoudidadidoudidop!

La sonnerie guillerette de son portable le ramena brutalement sur terre. Sa femme. Ce ne pouvait être qu'elle. "Allô !... oui ma chérie... je suis... oui dans la salle d'attente... du monde, oui... non... pas grave... ne t'inquiète pas... à tout à l'heure... je t'embrasse". Il rangea la maudite bestiole dans la poche de son blouson.

- C'était ma femme dit-il d'un air contrit
- Oui, ta chérie, rétorqua t'elle d'un air pincé, avant de se raviser, ils n'allaient tout de même pas gâcher leur merveilleuse rencontre pour une broutille.
- Je suis désolé, tu sais comment elle est...
- Ce n'est pas grave mon amour, l'important c'est nous, ici, maintenant, si tu savais combien je suis heureuse...

AU SUIVANT ! hurla l'infirmière revêche qui venait de débouler dans la salle d'attente. Un homme livide se leva lentement, et approcha de la matrone à pas comptés. Le menton saillant comme une insulte, elle toisa le pauvre ère d'un regard glacial, ouvrit brutalement la porte de la salle de torture et y poussa la loque liquéfiée. Hector75 sentit une goutte de sueur froide glisser sournoisement le long de sa tempe.

- Ne t'inquiète pas mon cœur, il y en a encore deux avant toi.
- Oui, répondit-il doucement.
- Je n'avais pas le choix, tous les autres dentistes de la ville sont partis en vacances...
- Je vois, dit-il d'une voix blême.
N'écoutant que son courage, qui ne lui disait rien, Hector75 approcha son auriculaire de celui de sa belle, le frôla, le titilla, s'y enroula en une torride étreinte digitale aussi rassurante que discrète. Hermione28 clos doucement les paupières alors qu'un sourire à la mona lisa s'esquissait sur son visage alangui. Phalange contre phalange, ils s'adonnèrent à ces attouchements dont la sensualité débridée faisait frémir les narines de la belle. Et dire qu'Hector75 n'y avait mis qu'un doigt.

La porte de l'antre du tortionnaire s'ouvrit avec fracas, devant l'infirmière qui portait sa dernière victime sur l'épaule avec autant de précaution qu'un boucher porte un quartier de bœuf. Elle lâcha le patient évanouit dans son siège encore chaud, se retourna vers l'assistance éberluée et dit avec un sourire sardonique "Ne vous inquiétez pas, c'est juste une petite nature. Il s'est évanouit avant même que le Docteur n'ait eu le temps de le toucher. A QUI LE TOUR !". La mort dans l'âme, une brave mère de famille se leva et tira son gamin vers l'antre du Dr Jeckil, heu Achille. NOOOOOOOON! hurla le pauvre gosse, MAAAAAAMAAAAN...
"Courage mon garçon, tu es un homme !", rétorqua la matrone qui ponctua son discourt à la psychologie si féminine par un "Hop! Et que ça saute !". Les deux femmes tirèrent l'enfant vers l'abattoir dont la porte fût claquée d'un coup de pied. "Tenez-lui les jambes! Moi je m'occupe des mains!", put-on entendre distinctement depuis la salle d'attente.

Dzzzzzzzzzoingzzzzoingzzzzzzoing... MaMaaaaargh...

Hector75 jeta un regard hagard vers Hermione28 impassible, aux portes du septième ciel, captivée par le moite doigté de son divin amant. Il essuya les grosses goûtes qui perlaient sur son front.

Ouiiiiiiiinn ! Tais-toi ! Tais-toi ! Ouvre la bouche ! Dzzzzzzzzzoingzzzzoingzzzzzzoing...

- Partons d'ici, bégaya Hector75
- Ce n'est pas possible, mon amour, songe à ton alibi...
- Mais ce docteur est un monstre !
- Mais c'est juste le Dr Achille, tu ne peux pas affronter un petit détartrage pour moi ?
- Peut importe le détartrage, allons-nous-en !
- Mais j'ai payé d'avance ! Le Dr Achille va te détartrer, tu en as grand besoin ! Regarde-moi ce sourire jaunâtre !

AU SUIVANT !!! Didoudidadidoudidop! Didoudidadidoudidop! Didoudidadidoudidop...

Hector75 se réveilla en sueur et éteignit le réveil. La douce odeur de café qui flottait dans la chambre le rassura un peu alors qu'il reprenait ses esprits. Son épouse entra dans la chambre et finit de lui remettre les idées en place. "Dépêche-toi! On part à Contrexéville et on a de la route à faire!"

08 janvier 2007

Le fantasme de l'hooliganette

Après la fliquette à casquette et galons dorés sur les épaules carrées de sa chemise bleue électrique, fliquette qui fouillerait sans ménagement mais avec un rictus concupiscent, mon petit corps à demi nu, cuisses écartées en garde à vue dans un bureau sordide, après la fliquette disais-je, une bonne amie vient de susciter en moi le fantasme de l'hooligannette ! Mon blog n'ayant pas d'autre objet que de saisir au vol mes pensées impertinentes ou mes récits débauchés, pourquoi ne pas le commencer avec une plaisanterie. Après tout, ce ne sera pas la première fois qu'un destin se joue là dessus, que ce soit le mien ou celui des personnages Kunderiens.

L'hooliganette m'a invité à suivre la finale de la coupe du Monde dans sa chambre d'étudiante. A l'affiche: France-Brésil ! Comme d'habitude, je me suis perdu et je suis en retard, mais je n'ai aucun mal à trouver son petit studio au vacarme qui en émane. J'ouvre la porte. Quel choc ! De part et d'autre de la télé où s'époumone thierry Rolland, des fumigènes crachent une épaisse fumée qui masque les murs recouverts de posters France Football. Face à la télé, mon hooliganette s'agite toute seule sur son Sofa. Elle ne m'a pas entendu arriver. Je m'approche précautionneusement en évitant les canettes vides qui jonchent le sol. Elle se retourne brusquement et me jette un sourire bleu-blanc-rouge halluciné. Sous sa perruque rose frisée, son visage peinturluré me scande "allez les bleus !" en guise de bienvenue. Ses seins tressautent sous son maillot de l'équipe de France qui lui tombe à mi-cuisse, en recouvrant son collant filets homologué par la FIFA. Ses chaussures Adidas à crampons rayent le parquet. "T'es pas en tenue de supporter !" Eructe t'elle d'une haleine Heineken. "A poil les Brésiliens !" Hurle t'elle alors en se jetant sur moi pour arracher mes vêtements. Inutile de résister, et me voilà en deux temps trois mouvement prêt à courir sur la pelouse dans le plus simple appareil. Pendant ce temps là, Zidane envoie la balle au fond des filets. C'est la liesse. "Baise-moi à la footbaleur !" qu'elle me crie en brandissant un condomi spécial footmedium_condomifoot.jpg.
- C'est quoi, à la footbaleur, que je lui demande éberlué ?
- Droit au but et sans les mains, qu'elle me répond en sautant à genoux sur le canapé !

D'un geste vif, elle remonte jusqu'à la taille son maillot de l'équipe de France. A travers les larges mailles de son collant fillet, je constate qu'elle ne porte pas de petite culotte. Ses cuisses à la verticale sont comme deux poteaux blancs entre lesquels je vais tirer mon coup. "J'vais te tirer comme un penalty" que je lui annonce en chaussant le condomi, entre deux rasades de bibine pour me mettre dans l'ambiance. "Tire pas avant que j'ai sifflé", beugle t'elle avant de siffler sa septième canette. Face aux trous, j'opte pour le contre pied. Je fais glisser le ballon du condomi sur son anus qui se contracte aussitôt, pour mieux m'enfoncer d'un seul coup dans sa chatte béante. "Et un, et deux, et trois zéros !" que je me mets à brailler en lui enfilant autant de coups de queue ! Elle se retourne vers moi avec un rictus mauvais, me brandit sous le nez une matraque non homologuée et elle me dit entre ses dents "Attends un peu que je te la mette dans la lucarne !"